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Il passe des métros aux TGV: Jean Castex est choisi par Emmanuel Macron pour diriger la SNCF

L'ancien Premier ministre Jean Castex, PDG de la RATP, au centre de maintenance de Bobigny, le 14 février 2025

L'ancien Premier ministre Jean Castex, PDG de la RATP, au centre de maintenance de Bobigny, le 14 février 2025 - JULIEN DE ROSA © 2019 AFP

Emmanuel Macron propose de nommer l'actuel président de la RATP et ancien Premier ministre. Il remplacera Jean-Pierre Farandou, atteint par la limite d'âge.

Un connaisseur va remplacer un connaisseur. Jean Castex a été proposé par Emmanuel Macron comme président du Groupe SNCF ce vendredi. Il remplacera Jean-Pierre Farandou aux commandes du groupe ferroviaire depuis 2019.

La Présidente de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat sont saisis de ces projets de nomination "afin que la commission intéressée de chacune des assemblées se prononce dans les conditions prévues" par la Constitution, est-il précisé.

Son nom était dans les tuyaux depuis des mois, même si le principal intéressé a, à plusieurs reprises, indiqué qu'il ne se portait pas candidat.

En avril le ministre des Transports Philippe Tabarot avait dressé le portrait rebot du candidat pour la SNCF - "quelqu'un qui sait dialoguer avec ses salariés(...) a une connaissance de la maison, du ferroviaire et du territoire" - ne laissant guère de place au doute.

Jean Castex, 60 ans, est en effet un bon connaisseur du monde ferroviaire et il jouit d'une plutôt bonne réputation auprès des syndicats de la SNCF car rompu au dialogue social et homme de terrain, ce qui constitue un avantage certain.

Selon un ministre, la patronne de la CGT Sophie Binet a elle-même demandé à ce que Jean Castex, qui avait entretenu des bonnes relations avec les syndicats lors de son bail à Matignon, soit nommé à la tête de la SNCF.

Apprécié à la RATP

A la RATP, il a également été apprécié de certains syndicats comme FO et les observateurs ont salué le travail accompli notamment en ce qui concerne l'amélioration des dysfonctionnements dans le métro parisien.

En un an et demi, il négocie des accords sociaux, octroie de généreuses hausses de salaires et lance des plans de recrutement ambitieux qui remettent l'entreprise sur de bons rails.

Les JO sont une réussite. La desserte des sites de compétition est fluide et les transports franciliens impressionnent les touristes comme les plus sceptiques des Parisiens.

"Si le Parlement m'accorde sa confiance, j'aurai dans les semaines qui viennent l'occasion de vous redire la grande fierté qui a été la mienne, depuis bientôt trois ans, d'être votre président et de vous remercier pour les résultats que nous avons tous ensemble obtenus", a déclaré le PDG de la RATP aux salariés dans un mail interne consulté par l'AFP.

Petit-fils de sénateur, formé à l'ENA, passé par la Cour des comptes, Jean Castex est aussi un techno rompu aux rouages de l'Etat, ancien directeur de cabinet de Xavier Bertrand aux ministères de la Santé et du Travail, secrétaire général adjoint de l'Elysée sous Nicolas Sarkozy, puis délégué interministériel aux JO-2024.

"Un fin connaisseur", se félicite le ministre démissionnaire des Transports

"Fin connaisseur des territoires et des défis du secteur ferroviaire, Jean Castex a démontré à la tête de la RATP sa capacité à diriger et transformer avec succès un acteur stratégique des transports dans notre pays. Je connais son exigence pour la qualité du service rendu aux usagers, sa détermination à agir pour la compétitivité de nos opérateurs publics de transport dans un contexte d’ouverture à la concurrence, et son ambition de valoriser l'excellence de notre savoir-faire ferroviaire sur les marchés mondiaux", a réagi Philippe Tabarot, le ministre démisssionnaire des Transports.

Le mandat par intérim de Jean-Pierre Farandou, atteint par la limite d'âge, avait été prolongé quelques mois justement pour préparer la nomination de Jean Castex.

Ce dernier ne pouvait pas être nommé immédiatement car il a présidé l’Agence de financement des infrastructures de transport de France pendant quelques mois en 2022. Il s'agissait d'attendre trois années pleines après la date de son départ en novembre 2022, pour éviter toutes réserves de conflit d'intérêts émises par la HATVP, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Jean Castex aura du pain sur la planche, il devra notamment reprendre le bâton de pèlerin de son prédécesseur sur la question du financement de la régénération du réseau.

Suite à la grande conférence Ambition France Transports, le gouvernement démissionnaire a annoncé que la loi fixera l’objectif de 1,5 milliard d'euros supplémentaire par an affecté au réseau à compter de 2028 pour atteindre 4,5 milliards par an en 2028.

Flou total sur le financement du réseau

Pour autant, les moyens à court terme restent très flous. Le coeur de ce financement repose sur le renouvellement des concessions autoroutières avec "le fléchage de l'intégralité des recettes des futurs nouvelles concessions autoroutières vers les infrastructures de transports, estimées à terme à 2,5 milliards d’euros par an". Un milliard par an serait utilisé pour boucler le budget de maintenance du réseau.

Problème, ces concessions arrivent à échéance entre 2031 et 2036. Alors qu'il n'y a toujours pas de gouvernement et que les exigences d'économies budgétaires n'ont jamais été aussi fortes, Jean Castex pourra s'inquiéter du trou dans la raquette entre 2026 et 2031.

"Si rien n’est fait, avertit la SNCF, c'est-à-dire que si aucun moyen supplémentaire n’est consacré à l’entretien des rails, du ballast et surtout des caténaires, 2.000 trains risquent d’être impactés quotidiennement dès 2028 par des retards, des travaux inopinés, voire des fermetures ponctuelles".

Autrement dit, ce sont 4.000 kilomètres de lignes qui sont menacées par "un effondrement de la qualité de service" et même 10.000 kilomètres dans les années qui suivront.

Olivier Chicheportiche avec AFP