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Passage à l'heure d'été: les économies d'énergie sont-elles au rendez-vous?

Un agent effectue manuellement le changement d'heure à l'heure d'été sur une horloge à Paris, le 26 mars 2021

Un agent effectue manuellement le changement d'heure à l'heure d'été sur une horloge à Paris, le 26 mars 2021 - BERTRAND GUAY

En gagnant une heure supplémentaire d'ensoleillement, l'idée est de réduire la consommation en électricité des Français. Mais dans les faits, le bilan est mitigé.

Dans la nuit de samedi à dimanche, la France est passée à l’heure d’été. Ainsi, à 2 heures du matin il était en réalité 3 heures.

Si nous avons perdu une heure de sommeil nous gagnons une heure d'ensoleillement, car l'objectif historique de cette mesure est bien de nous faire consommer moins d'énergie. Un objectif d'autant plus prégnant aujourd'hui alors que les factures d'électricité des Français flambent littéralement.

Un bilan pour le moins mitigé

Il faut en effet rappeler que cette mesure est entrée en vigueur en 1976, à la suite du premier choc pétrolier en 1974. Il s'agissait alors de réduire la facture énergétique du pays en limitant par exemple l'utilisation de l'éclairage artificiel mais aussi la facture des Français amenés à allumer les lumières dans les foyers plus tard.

Malheureusement, le bilan énergétique de cette mesure est discutable. Selon une étude de 2017 du Service de recherche du Parlement européen, le changement d’heure permettrait de réaliser une économie de 0,5% à 2,5% selon les pays.

Concernant la France, l'Ademe (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) estime que le passage à l'heure d'été permet de générer des économies d’environ 0,07% de la consommation annuelle d’électricité, soit 351 GWh/an (ce sont les derniers chiffres connus qui datent de 2014). Cela correspond à la consommation annuelle d’environ 70.000 foyers.

44.000 tonnes de CO2 ont ainsi été évitées, en considérant que pour cet usage, 1 kWh consommé produit 100 gramme de CO2, explique l'agence.

Des économies qui ont tendance à baisser

Pour autant, ces économies ont tendance à baisser puisqu'en 1996, l’économie de consommation en électricité était estimée à 1200 GWh/an par an et de 440 GWh/an dans les années 2000. Toujours selon l'agence, la projection pour 2030 serait au mieux de 300 GWh/an.

Bref, les économies existent mais elles sont sur une tendance baissière et ont un impact assez limité. Il faut dire que dans le même temps, beaucoup d'habitudes ont changé. Les villes utilisent de plus en plus d'éclairages à basse consommation ou un éclairage public calé sur la nuit solaire, tout comme les foyers avec les ampoules basses consommation.

Un bénéfice sur les usages thermiques, si...

Un gain sur les usages thermiques, et notamment sur la climatisation a été étudié en détail mais il s’avère, toujours selon l'Ademe, que les baisses ou hausses de consommation induites par le changement d’heure n’apparaissent pas significatives en 2009.

"En revanche à l’horizon 2030, des gains additionnels de 130 GWh électrique pourrait être atteints du fait du changement d’heure à condition que des systèmes de régulation automatique soient installés pour respecter des consignes de température. Considérant ces gains supplémentaires ainsi que ceux liés aux autres énergies de chauffage, les différents scénarii contrastés conduiraient en 2030 à une réduction globale des émissions de 70.000 à 100.000 tonnes de CO2 grâce au régime d’heure d’été", analyse l'agence.

Le changement d’heure permet par ailleurs un gain en puissance notable du côté des centrales car les pointes de consommation d’avril, même si elles n’atteignent pas les niveaux du plein hiver, sont un enjeu important pour le système électrique.

"En effet, c’est au printemps, et à l’automne, que des risques élevés de marges insuffisantes de puissance sont observés" rappelle l'Ademe.

En 2009, le changement d’heure a permis une diminution de 3,5 GW de la puissance appelée à 19 heures. En 2030, cet avantage resterait en moyenne de l’ordre de 2 GW.

La fin du changement d'heure? Pas pour tout de suite

Ces faibles économies et les effets sur le sommeil et la santé provoqués par ce changement d'heure sont mis en avant par ses opposants. En France, un sondage en 2019 montrait que 84% des Français étaient désormais opposés aux changements d'heure.

La Commission européenne avait proposé de le supprimer en 2019 mais le Parlement européen avait repoussé cette décision à 2021. Avant que la crise sanitaire renvoie la question aux Calendes grecques. La guerre en Ukraine, et la flambée des prix de l'énergie ne devrait pas non plus permettre à ce sujet de revenir sur la table.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business