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Les cours du pétrole sont au plus bas depuis mai 2021: pourquoi les prix à la pompe restent plus élevés qu'à l'époque?

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Le prix du baril tourne actuellement autour des 64-65 dollars, un niveau qu'on avait plus observé depuis mai 2021. Mais à cette époque, les prix à la pompe étaient bien moins élevés.

C'est un constat que font tous les automobilistes en ce moment. Les prix du carburant restent relativement élevés malgré des cours du pétrole bas. Le prix du baril tourne en effet autour des 64/65 dollars, un niveau qu'on avait plus observé depuis mai 2021. Or à cette époque, le prix de gasoil était d'environ 1,40 euro le litre, c'est-à-dire 30 centimes en moyenne de moins qu'aujourd'hui.

Comment expliquer ce décalage? Rappelons que le prix mondial du pétrole brut n’est qu’une composante du prix final du carburant raffiné appliqué à la pompe. Les experts du secteur mettent en avant la hausse sensible des coûts de production des carburants à partir de l'or noir, et essentiellement le coût du raffinage. Il a augmenté de six centimes par litre depuis 2021.

Les taxes sur le carburant sont également plus élevées qu'il y a quatre ans tout comme les taxes liées aux certificats d'économies d'énergie (CEE) qui ont augmenté de six centimes le litre également. Or ces taxes représentent 60% du prix payé par le consommateur. Certaines de ces taxes, comme la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, sont indépendantes des fluctuations du cours du baril.

Un délai de 15 jours

Du côté des biocarburants, les coûts de production ont progressé de deux centimes sur la période.

Les distributeurs peuvent également tarder à répercuter les baisses en station. Généralement, ils attendent de constater une vraie tendance à la baisse avant de revoir leurs tarifs. Or, sur un mois par exemple, la baisse des cours n'est que de 1,66% (mais elle est de 4% sur trois mois). Il faut en général 15 jours pour qu'une baisse tangible soit répercutées dans les stations-service.

"Si le prix du brut diminue, les distributeurs peuvent différer stratégiquement la répercussion de la baisse du prix du baril sur les prix à la pompe en jouant sur le manque d’information de la part des consommateurs – ces derniers ne sachant pas si les fluctuations constatées à la pompe proviennent des variations du prix du baril ou de celles des marges du distributeur", explique Valérie Mignon, Membre du Cercle des économistes, professeur de sciences économiques à l’Université Paris Nanterre.

"En situation de forte volatilité des cours du baril, obtenir cette information est difficile, ce qui explique qu’en période de baisse du prix du brut, les distributeurs ne diminuent pas immédiatement leurs prix, profitant du délai de réaction des consommateurs pour maintenir leurs marges", explique-t-elle.

Les distributeurs attendent de voir

Néanmoins, une petite répercussion de la baisse des cours du pétrole devrait s'observer à court terme. "Plus le prix du baril est faible, plus la répercussion à la pompe va se voir rapidement. On a déjà vu en fin de semaine dernière des débuts de baisse de l'ordre de 2 à 3 centimes", explique à BFMTV, Francis Pousse, président national de Station service Energie nouvelle chez Mobilians.

A moins que des éléments exogènes cassent cette dynamique. Outre le contexte géopolitique qui rend les cours du pétrole plus volatiles que jamais, la hausse de la production de la part de l'Opep joue également. L'Arabie saoudite, la Russie, l'Irak, les Emirats arabes unis, le Koweït, le Kazakhstan, Oman et l'Algérie, qui ont déjà rehaussé leurs objectifs de plus de plus de 2,5 millions de barils par jour depuis avril, ont décidé ce dimanche d'une nouvelle hausse de 137.000 barils par jour pour le mois de novembre.

Ce lundi, le prix du baril de Brent de la mer du Nord, pour livraison en décembre, prenait 1,47% à 65,48 dollars tandis que son équivalent américain, le baril de West Texas Intermediate, pour livraison en novembre, gagnait 1,49% à 61,79 dollars.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business