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Du petit-déjeuner au nettoyage des chambres: comment les hôtels s'adaptent au coronavirus

Les hôtels adoptent un protocole sanitaire

Les hôtels adoptent un protocole sanitaire - Pixabay

Nettoyage plus fréquent, room service... Ces dernières semaines, les hôteliers ont mis en place une série de mesures sanitaires dans leurs établissements. Avec l'espoir que cela suffise à faire revenir la clientèle.

S’ils n’ont jamais reçu l’ordre de cesser leur activité, nombreux sont les hôtels à avoir fermé leurs portes pendant le confinement, faute de clients. Pour ces établissements, cette période fut aussi l’occasion de mettre en place un protocole sanitaire rassurant afin d’accueillir à nouveau leur clientèle. D’autant que 83 % des Français placent l’hygiène en tête de leurs critères de choix pour leurs prochaines vacances d’été, selon un sondage d’Opinion Way pour B&B. 

B&B qui a justement fermé 40% de ses 300 hôtels français pendant le confinement. Aujourd’hui, le taux de réouverture de la chaîne créée dans les années 1990 atteint près de 75% et devrait se situer aux alentours de 95% mi-juin. Et cette reprise progressive de l’activité s’est bien entendu accompagnée de nouvelles règles sanitaires. "On a mis en place beaucoup de nouvelles procédures pour l’accueil des clients, le nettoyage des chambres, ou même le petit déjeuner", détaille Vincent Quandalle, Directeur Général Europe de B&B. 

Certification

Le groupe s’est notamment rapproché de l’organisme indépendant SOCOTEC pour travailler sur un référentiel de certification hygiène et sécurité. "Nous avons mis à profit cette période difficile pour nous engager autant que possible dans ce projet de certification. Nous voulons que nos clients n’aient aucun doute quand ils entrent dans un hôtel B&B: ils sont ici en sécurité!", assure Vincent Quandalle.

Concrètement, cela se traduit par l’installation d’écran en plexiglas à la réception, la mise en place de distributeurs de gel hydroalcoolique devant tous les points de contact (réception, ascenseur, etc.), l’équipement des salariés en masques et le nettoyage plus fréquents des chambres. Dans certains établissements, il est également possible de procéder à l’enregistrement et au check-out en ligne de façon à ce que les clients n’aient pas besoin de passer par la réception (l'accès aux chambres se fait avec un code). 

"Nous avons aussi défini des protections collectives et individuelles en matière de désinfection, une procédure si un cas de Covid-19 est constaté, organisé la traçabilité...", détaille le président exécutif de Socotec, Hervé Montjotin. Tous les hôtels de l’enseigne devraient obtenir leur certification d’ici juin. 

Côté restauration, le petit-déjeuner se fait désormais à emporter. Le client doit venir le chercher avant de remonter dans sa chambre ou de le prendre à l’extérieur s’il le souhaite. Et si les hôtels B&B ne proposent pas de salle de restaurant pour le déjeuner et le dîner, des solutions de livraison ou de bocaux à réchauffer sont mises en place pour pallier la fermeture des restaurants. 

Accor s'allie à Bureau Véritas

Le groupe Accor (Ibis, Mercure, Novotel…) a pour sa part lancé un label avec Bureau Véritas, spécialiste des essais, de l'inspection et de la certification, pour mettre en place de nouvelles mesures sanitaires. Ce label sera utilisé dans les hôtels et restaurants du groupe et d’autres chaînes ainsi que dans les établissements indépendants qui pourront se l’approprier. 

"Aujourd’hui, et plus que jamais nos collaborateurs, nos clients, nos partenaires ont besoin d’être rassurés sur notre capacité à les accueillir dans les meilleures conditions", affirme Franck Gervais, directeur général Europe d’Accor. Développé à partir d’avis de médecins épidémiologistes, le label doit définir "les standards sanitaires applicables" pour réduire au maximum les risques de contamination. 

Les clients pourront ainsi s'enregistrer et régler en ligne, une vitre en plexiglas sera installée à l'accueil, des notices indiquant quand et comment la chambre a été nettoyée devraient aussi se généraliser. Et "le buffet du petit déjeuner où tout le monde vient se servir" devrait disparaître, note Franck Gervais. Côté employé, le groupe compte sur le port généralisé du masque, le nettoyage plus fréquent des lieux de passage (lobby, ascenseurs) ou encore des poignées de portes, télécommandes de TV...

Les hôteliers indépendants s'adaptent eux aussi

Les représentants des hôteliers indépendants se sont mis autour de la table pour discuter du protocole sanitaire à mettre en place alors que les réouvertures se font plus nombreuses chaque jour. S’agissant du personnel, "nous proposons à nos salariés de prendre leur température à l’entrée de l’établissement, de se laver les mains toutes les trente minutes", déclare Franck Trouet, Directeur général du Synhorcat (Syndicat National des Hôteliers, Restaurateurs, Cafetiers et Traiteurs). 

Les clients devraient pour leur part avoir le nécessaire à disposition: "Dans grand nombre de nos hôtels nous allons mettre à disposition de nos clients des lingettes, des masques et du gel hydroalcoolqique", poursuit Franck Trouet qui recommande aux indépendants de fournir un "kit sanitaire" dans toutes les chambres. Le nettoyage sera aussi plus fréquent, notamment dans les parties communes. 

La difficile organisation du service de restauration

Pour les hôtels dotés de salles de restaurant, la situation s’annonce toutefois plus complexe. Si les établissements qui le peuvent se préparent à renforcer leur room service, "on ne pourra pas le faire à 100%, on n’en a pas les moyens", prévient Franck Trouet. Seules les structures haut de gamme pourront se le permettre. C’est par exemple le cas de l’hôtel de luxe du Petit Nice-Passedat dont le propriétaire Gérald Passedat propose des plats gastronomiques uniquement en room service. 

Mais pour les plus petits établissements, "il faut que les clients reviennent en salle de restauration", assure Franck Trouet. Impossible pour l’heure, les restaurants n’étant toujours pas autorisés à rouvrir. Et quand bien même ils le seraient, le gouvernement préconise un distanciation sociale de 4m2 entre chaque personne. "Ca veut dire qu’un couple mangerait en diagonale? Ce n’est pas imaginable, ni réalisable. Ca ne couvrirait même pas nos charges fixes", alerte le directeur général du Synhorcat. 

Il demande ainsi au gouvernement de renoncer à cette mesure qui relève selon lui d’une position "dogmatique" et non "pragmatique". Il promet à la place un nettoyage sérieux des tables entre chaque service, une "multiplication des services" pour limiter le nombre de clients en salle ainsi qu’un "plan de table fait au fur et à mesure des réservations". Par ailleurs, les menus seront présentés de telle sorte qu’il n’y aura pas de "manipulation par le client ". 

"Les réservations ont été multipliées par trois"

De manière générale, les hôteliers attendent avec impatience la réouverture des restaurants au sein de leurs établissements. Mais aussi des restaurants situés à proximité. Car "la restauration est au coeur de l’attractivité touristique de la France", assure Franck Trouet. En attendant, les réservations semblent tout de même repartir depuis qu'Edouard Philippe a donné le top départ pour les vacances en juillet et août

"Entre la première semaine de mai et cette semaine, les réservations ont été multipliées par trois, pour l’été évidement, mais c’est aussi le retour de la clientèle business, du bâtiment, etc. Les entreprises ont besoin de retravailler, de se déplacer, de trouver des hôtels", observe Vincent Quandalle qui se dit "assez confiant" pour la saison à venir avec, il l’espère, "un flux de touristes français" cet été "qui compensera en partie l’absence de la clientèle étrangère". 

Du côté des indépendants, on remarque aussi l’effet provoqué par le discours d’Edouard Philippe avec "des réservations qui commencent à reprendre tout doucement" et des "sites internet hyperfréquentés", note Franck Trouet. "Mais les Français sont très méfiants", tempère-t-il. "Ils veulent bien réserver mais ils veulent avoir l’assurance qu’en cas d’annulation ils seront bien remboursés". C’est pourquoi les membres des trois principales organisations représentatives des hôteliers indépendants se sont engagées à rembourser les réservations réalisées directement sur le site des établissements (et non sur les plateformes type Booking ou Expedia) en cas d’annulation liée à l’évolution de l’épidémie. 

Reste une interrogation: les coûts supplémentaires générés par les mesures sanitaires seront-ils répercutés sur les prix? "Non", promet B&B qui table sur des tarifs équivalent au prix moyen global pratiqué sur l’année 2019. "On veut essayer de contrôler les prix en faisant des économies là où on peut facilement en faire", assure également Franck Trouet. 

Paul Louis