L'armée de terre n'en a plus que neuf: la France doit remplacer "de toute urgence" son artillerie longue portée, alerte un rapport parlementaire

Le lance-roquettes unitaire (LRU) sur châssis chenillé M270 - Armée de Terre
Les députés Jean-Louis Thiériot (LR) et Matthieu Bloch (UDR) tirent la sonnette d'alarme dans un rapport parlementaire: la France risque de se retrouver démunie de capacités d'artillerie à longue portée, si rien n'est entrepris rapidement pour remplacer le système de lance-roquette unitaire, qui sera frappé d'obsolescence à l'horizon 2027.
A l'aune du concept de guerre de "haute intensité", les rapporteurs expliquent qu'en l'absence de supériorité aérienne – comme c'est le cas dans le conflit en Ukraine – l'artillerie joue "un rôle central". Selon les données recueillies, en Ukraine, "près de 70% des destructions ennemies, notamment dans la première phase de la guerre, résultent de frappes d'artillerie".
"La France a un vrai retard sur l'appui dans la profondeur et nous risquons une réduction temporaire de capacité après la fin du LRU", alerte Jean-Louis Thiériot, interrogé par BFM Business.
Conçu sur un châssis chenillé, le lance-roquette unitaire peut emporter 12 roquettes, et affiche une portée de 15 à plus de 70 kilomètres. Il a été brièvement utilisé au Mali dans le cadre de l'opération Serval/Barkhane en 2016. Trois exemplaires sont actuellement déployés en Roumanie.
Problème: il n'en reste que neuf exemplaires dans l'armée de terre, selon une étude de l'IFRI publiée en novembre 2024, quatre systèmes ont été cédés à l'Ukraine, alors même que la Loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030 prévoit une cible d'au moins 13 systèmes de frappe à longue portée fin 2030, 26 en 2035.
Dans cette optique, et alors que les LRU français pourraient être inutilisables dans deux ans en raison de l'absence de pièces de rechange, il devient urgent et impératif de développer un système pour les remplacer dès que possible.
Les députés déplorent "la non-anticipation avant 2023 de la rupture temporaire du LRU, alors même que l’utilité des lance-roquettes unitaires avait été largement démontrée dans des conflits antérieurs au 24 février 2022, à l’instar de la guerre du Haut-Karabagh".
Prévoir "l'après-LRU"
Jean-Louis Thiériot prévient: il faut développer "une solution souveraine, mais sous réserve d'aller vite et d'être capable de le faire à un coût acceptable".
La phase de préparation du programme "frappe longue portée terrestre" a été lancée en 2023. Deux consortiums ont lancé des travaux de développement en 2024: Safran et MBDA d'une part, Thales et Arianegroup de l'autre. Selon le calendrier initial, un premier tir de démonstration doit avoir lieu en avril 2026 et la mise en service en 2030, "c'est tard", selon le député.
De plus, le programme aurait d'ores et déjà pris du retard, un facteur d'inquiétude supplémentaire sur la rupture capacitaire pour l'armée de terre.
D'autres alternatives sont évoquées dans le rapport: une solution d'achat "sur étagère" d'un système étranger déjà opérationnel (Himars américain, K239 sud-coréen, Europuls germano-israélien, Pinaka indien), mais aussi le projet de l'entreprise française Turgis & Gaillard, qui vient de dévoiler son système baptisé Foudre, potentiellement capable de prendre le relai des LRU dès 2027. Une solution intérimaire en complément des projets en cours de développement par les grands donneurs d'ordre. "Il faut examiner toutes les solutions", insiste Jean-Louis Thiériot.