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Char du futur: le MGCS "devrait être opérationnel entre 2040-2045", assure le ministère des Armées

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Le char du futur sera opérationnel avec quelques années de retard sur le programme initial. Le ministère des Armées a dévoilé quelques détails techniques de ce blindé connecté.

Le char du futur franco-allemand avance à pas feutrés. Lors de leur rencontre fin septembre, Sébastien Lecornu, ministre français des Armées, et son homologue allemand, Boris Pistorius, ont signé une feuille de route commune en présence des chefs d'état-major de l'armée de Terre des deux pays.

Il s'agit de "graver dans le marbre des "exigences opérationnelles communes" pour faire taire ceux qui avancent que le projet serait mort-né. Pour Paris et Berlin, il naîtra, mais l'accouchement aura lieu plus tard que prévu.

Programmé au départ pour remplacer les chars Leopard 2 allemand et les Leclerc français en 2035, le MGCS (Main Ground Combat System, en français Système principal de combat terrestre) "devrait être opérationnel entre 2040-2045", prévoit le ministère des Armées.

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Armes laser et tir à 8000 mètres

Désormais, il s'agit de définir les piliers technologiques à développer et préciser la part que devra prendre les deux pays partenaires. Financièrement, la France dispose d'un budget de 500 millions d'euros inscrit dans la loi de programmation militaire 2024-2030. De son côté, l'Allemagne puisera dans son fonds spécial de 100 millions d'euros pour financer le programme par tranches: 83 millions en 2024 et 177 en 2025 et 2026.

Dans un document, le ministère des Armées dévoile ce que devra être le MGCS.

"Bien plus qu’un engin blindé lourd traditionnel, le MGCS est pensé comme un système multiplateformes: un char proprement dit, équipé d’un canon gros calibre, accompagné d'autres modules complémentaires interconnectés".

Ces modules comprennent "un blindé lourd équipé de missiles antichars puissants, un véhicule d’appui robotisé et doté d’armes laser, des drones et autres armements innovants". Une intelligence artificielle sera développée pour fournir du renseignement, planifier les missions et coordonner les tirs de ces modules. Conformément à la doctrine des armées françaises, elle n'engagera pas de tirs sans ordre.

"L’humain sera toujours dans la boucle et de fait, au cœur des décisions", rappelle Martial, architecte capacitaire en charge du MGCS à la Direction générale de l’armement (DGA).

La capacité au combat sera décuplée par rapport aux chars actuels. Le blindé lourd pourra tirer à une distance de 8000 mètres pour mener des frappes dans la profondeur. Le système permettra une observation jusqu’à 10.000 mètres de distance. Par ailleurs, les modules disposeront d'une bulle de protection (camouflage actif, blindage renforcé, contre-mesures et neutralisation) "pour agir contre des menaces aériennes et terrestres".

Cet ensemble sera bien sûr compatible avec le programme de combat collaboratif Scorpion, mais aussi avec Titan, son sucesseur dès 2040, qui permettra à l'armée de l'Air et de l'Espace ainsi qu'à la Marine de disposer de la même interface de combat. Le Scaf (système de combat aérien du futur) et le PA-NG (porte-avions de nouvelle génération) seront compatibles avec Titan.

Le plan de transition de l'Ifri

Le programme MGCS est ambitieux, mais arrivera-t-il avant la mise en retraite des chars Leclerc? Un plan de modernisation a démarré pour repousser leur départ en retraite. L'Institut français des relations internationales (Ifri) préconise toutefois prudence et prévoyance. Dans un rapport sur l’évolution de l'armée allemande, la Bundeswehr, l'Ifri recommande de s'équiper au plus tôt de "quelques unités du prototype EMBT (Enhanced Main Battle Tank) auprès de l’alliance KNDS".

L'EMBT est une évolution du Leclerc et du Leopard 2. Présenté en 2018 sur le salon Eurosatory par KNDS, la co-entreprise franco-allemande (Nexter et Krauss-Maffei Wegmann), ce blindé se compose d’un châssis de Leopard et d’une tourelle de Leclerc. Conçu pour moderniser les armées européennes et pour l'exportation, sa production sera lancée en 2025 pour une commercialisation en 2030.

Pour l'Ifri, "un parc de transition d’E-MBT allégerait la charge sur les Leclerc restant, leur permettant d’atteindre 2040 et la relève du MGCS, une perspective difficile à envisager en l’état actuel".

Autre intérêt, cette fois industriel, cette commande permettra aussi à Nexter de "maintenir une compétence industrielle sous-utilisée depuis la fin de la production du char Leclerc, et dont le maintien en l’état jusqu’à l’aboutissement du MGCS reste incertain".

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco