Conditions de travail pas respectées: la justice annule l'accord "forfait jours" des cadres de Disney France

L'arrêt de la Cour de cassation débouche indirectement sur l'annulation pure et simple de l'accord annuel de forfait en jours qui s'applique aux cadres de Disney France. - AFP
C'est un cadeau de Noël que Disney France aurait aimé éviter. Ce mercredi 18 décembre, la Cour de cassation a donné raison à un ancien salarié du groupe, décision qui débouche indirectement sur l'annulation pure et simple de l'accord annuel de forfait en jours qui s'applique aux cadres de l'entreprise.
Rappelons que ce dispositif prévoit une durée du travail différente de la durée légale ou conventionnelle, sur la base d'un forfait établi en heures (sur la semaine, le mois ou l'année) ou en jours (sur l'année).
Le salarié bénéficie d'un certain nombre de jours de repos, prévus à l'avance. En contrepartie, il bénéficie d'une majoration de son salaire pour les jours de travail supplémentaires. Si le salarié renonce à une partie des jours de repos, il ne peut pas travailler plus de 235 jours dans l'année.
Dans tous les cas, le nombre de jours travaillés ne doit pas remettre en cause les garanties du salarié en matière de repos quotidien et hebdomadaire, de congés payés et de jours fériés chômés dans l'entreprise.
Garanties
Ce sont ces garanties qui n'ont pas été respectées dans ce dossier.
Rappel des faits. Le plaignant a été engagé en qualité de manager d’exploitation informatique en 2001 et a signé une convention individuelle de forfait en jours en 2007. En 2018, il obtient une rupture conventionnelle et quitte Euro Disney.
La même année, il saisit les prud'hommes afin d'obtenir le paiement de diverses sommes au titre de l’exécution du contrat de travail.
Après deux décisions de justice contradictoires notamment par la Cour d'appel, la Cour de cassation a estimé que le cadre proposé par l'entreprise n'était pas conforme aux exigences légales.
Ses dispositions n'instituaient pas "de suivi effectif et régulier permettant à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, ne sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié", peut-on lire dans l'arrêt.
Pour la Cour de cassation, la Cour d'appel "aurait dû déduire que la convention de forfait en jours était nulle".
Un accord collectif non conforme
S'appuyant sur l'alinéa 11 du Préambule de la Constitution de 1946, l'article 151 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (Charte sociale européenne) et sur la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, la plus haute juridiction rappelle que "le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles".
"Faute de validité de l'accord collectif en l'absence de garanties suffisantes, le forfait jour au niveau individuel n'est pas conforme. L'invalidation de l'accord collectif est applicable au plaignant, mais aussi pour tous les cadres soumis à cet accord", nous explique Olivier Bongrand, l'avocat du plaignant.
"Les garanties suffisantes n'ont pas été respectées, cet accord n'assure donc pas la protection et la santé du salarié", poursuit-il.
Outre la remise en cause de cet accord, Disney France devra indemniser le plaignant au titre du rappel pour heures supplémentaires et congés payés. Sur ce point, la Cour de cassation renvoie l'affaire devant la Cour d'appel de Paris.