Boulangeries: une "nouvelle taxe" concerne-t-elle vraiment les sachets à baguette?

Des baguettes de pain dans une boulangerie (photo d'illustration). - AFP
L'information a agité le monde de la boulangerie. Ces derniers jours, de nombreux boulangers se sont agacés dans les médias de l'instauration d'une "nouvelle taxe" sur les emballages des baguettes ou des viennoiseries, qui les contraindraient à verser un peu moins d'un centime d'euro pour chaque passage en caisse depuis le 1er janvier 2025. Dans les faits, il ne s'agit pas d'une taxe mais d'une contribution payée à un éco-organisme, et cette dernière n'est pas formellement nouvelle.
Depuis les années 1990, les filières à responsabilité élargie du producteur (REP) imposent aux entreprises productrices de déchets de participer au financement de la gestion des dits-déchets qu'ils produisent, appliquant le principe du "pollueur-payeur". Différentes filières REP couvrent les produits textiles, les équipements électriques et électroniques, les médicaments non-utilisés ou les emballages ménagers, c'est-à-dire ceux consommés ou utilisés par les ménages. L'objectif est de responsabiliser les metteurs en marché d'emballages pour diminuer les quantités de déchets.
S'il est possible d'opter pour un système individuel, les entreprises concernées peuvent recourir à des éco-organismes – des structures collectives de droit privé, à but non lucratif – pour leur transférer cette responsabilité, en échange d'une cotisation financière annuelle que l'on nomme "écocontribution". Ces écocontributions sont reversées en grande partie aux collectivités ou aux opérateurs qui assurent la collecte et le tri des déchets. Une petite partie est aussi utilisée pour des campagnes de sensibilisation des consommateurs ou la conception d'emballages plus vertueux.
Des éco-organismes
Du côté des boulangeries, les sachets à baguettes, les boîtes en carton pour les pâtisseries ou encore les poches à viennoiseries s'inscrivent dans le cadre de la filière REP des emballages ménagers. Techniquement, elles sont tenues de la respecter depuis une trentaine d'années. Mais la déclaration afférente est longue et fastidieuse pour des artisans, nécessitant d'énumérer le nombre, le poids et le type de chaque catégorie d'emballages pour calculer le montant de la contribution annuelle.
Constatant la complexité de la situation pour les petits artisans, l'éco-organisme Adelphe et la Fédération des entreprises de boulangerie (FEB), s'exprimant au nom du secteur de la boulangerie, ont travaillé ensemble pendant plusieurs mois pour parachever un dispositif simplifié. "L'État [n'a pas] participé à ces travaux, qui relèvent de négociations tarifaires", a précisé le ministère de la Transition écologique auprès de BFM Business. Filiale de Citeo, Adelphe est l'un des deux éco-organismes agréés par l'État dans le cadre de la filière REP des emballages ménagers.
Une contribution forfaitaire unique pour les boulangeries a été mise en œuvre par Adelphe. Elle ne nécessite plus de compter précisément tous les emballages, au profit d'un calcul reposant sur le nombre de passages en caisse. Plus précisément, une boulangerie est désormais redevable de 0,0075 euro (moins d'un centime) pour chaque passage en caisse, au titre de l'année 2024. Pour les déchets de l'année 2025, elle a été portée à 0,0079 euro. Un dispositif similaire a été mis en place pour les bouchers-charcutiers, les crémiers-fromagers, les chocolatiers ou les poissonniers.
Contribution unique
Cette contribution forfaitaire unique est proposée à tous les boulangers et les autres commerces de bouche qui mettent entre 10.000 et 500.000 unités de vente consommateur (UVC) sur le marché au cours d'une année. Une boulangerie n'est toutefois pas obligée d'y faire appel, elle peut lui préférer une déclaration au réel de ses emballages (ou mettre en œuvre son propre système de gestion des déchets, sans passer par un éco-organisme). Par ailleurs, le deuxième éco-organisme agréé par l'État, Leko, propose également son propre barème d'écocontribution.
À titre d'exemple, une boulangerie qui est ouverte 300 jours dans l'année et qui accueille 300 clients quotidiens cumule 90.000 passages en caisse. Dans le cadre d'Adelphe, cela représente une écocontribution de 675 euros au titre de l'année 2024. Concrètement, il ne s'agit pas d'une taxe, mais "d'un paiement pour service rendu entre des entreprises privées", martèle le ministère. Cette écocontribution finance des services qui seraient, en son absence, payés par les contribuables.
La contribution simplifiée proposée par Adelphe est effective pour la première fois sur les déchets de l'année 2024, qui ont fait l'objet d'une déclaration par les boulangers en janvier-février 2025. En outre, un partenariat a été récemment signé entre Adelphe et la Confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie française (CNBPF), la Confédération générale de l’alimentation en détail (CGAD), la Confédération française de la boucherie, boucherie-charcuterie et traiteurs (CFBCT) et la Fédération des fromagers de France (FFF) pour simplifier les démarches administratives.