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Assurance Banque

Que peuvent proposer les banques face à la perte de pouvoir d’achat de leurs clients?

Le pouvoir d'achat des ménages est menacé par l'inflation.

Le pouvoir d'achat des ménages est menacé par l'inflation. - Unsplash

[AVIS D'EXPERT] Face à l'inflation, le budget des ménages est sous pression. Certaines banques et fintechs commencent à proposer des solutions pour aider leurs clients. Décryptage avec notre expert Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor.

Depuis des années, les banques ne parlent que de personnaliser davantage les relations qu’elles entretiennent avec leurs clients. Elles s’efforcent de se centrer sur les besoins, les attentes et les usages de ces derniers. Vaines formules? Alors que, plus que des inquiétudes, de véritables contraintes commencent à apparaître en matière de pouvoir d’achat, le contexte actuel va permettre d’en juger. Que proposent les établissements financiers à cet égard? Le contexte va-t-il précipiter des changements dans la relation des banques avec leurs clients?

A ce stade, seule une poignée d’établissements – banques aussi bien que fintechs - se sont emparés du sujet. A l’instar de la Caisse d’épargne Auvergne Limousin qui, en avril dernier, proposait un Bilan Pouvoir d’Achat à ses clients particuliers. Une initiative intéressante dont on peut s’étonner qu’elle n’ait pas été reprise dans la mesure où, pour les populations financièrement en risque, les choses seront d’autant moins difficiles qu’elles parleront au plus vite à leur banque. Il est pourtant fréquent qu’elles ne l’osent pas, craignant que cela ne fasse que précipiter leurs difficultés. Il est donc important de positionner les conseillers dans un rôle d’assistance préventive, qui est finalement assez nouveau.

Aux Etats-Unis, face à l’inflation, quelques banques cherchent à jouer sur les cashbacks, associés à l’usage des cartes bancaires, pour qu’ils s’appliquent aux dépenses courantes dont les prix s’enflamment. Chase en propose de 5% (sous des conditions assez limitées toutefois) pour l’essence. Il s’agit non seulement d’augmenter le nombre de produits bénéficiant de cashbacks mais même d’étendre ces derniers à l’ensemble des dépenses - ainsi Capital One, à l’adresse des étudiants. Le problème cependant est que plus les cashbacks couvrent de nombreuses dépenses, moins ils sont généreux.

En Europe, l’approche est sensiblement différente. La première difficulté face au renchérissement du coût de la vie consiste à savoir en quoi, précisément, on lui est exposé. Sur ce constat, la start-up britannique Nous propose d’analyser toutes les dépenses récurrentes des utilisateurs de son appli, de tenir compte des hausses tarifaires prévisibles ou annoncées et d’en anticiper en conséquence l’impact sur les dépenses à venir, avec des projections de budget. L’idée est très simple ainsi: évaluer l’impact de l’inflation sur son pouvoir d’achat. Et Nous ambitionne de pouvoir ensuite proposer de choisir, en fonction des besoins, des fournisseurs proposant de meilleurs tarifs.

Un cap franchi en France

Cela, d’autres fintechs le proposent déjà, comme Snoop au Royaume-Uni ou Papernest en France. Et, justement, plusieurs grands établissements comme Société Générale se sont mis à relayer directement auprès de leurs clients les services de Papernest. BNP Paribas devrait même prochainement les intégrer à son appli bancaire, à travers un bouton d’accès qui apparaîtra avec les relevés de comptes. Dans le contexte actuel et pour faciliter la défense du pouvoir d’achat, un cap vient ainsi d’être franchi en France en matière d’open banking.

Que proposer d’autre? Une solution pour se protéger de l’inflation est bien entendu d’acheter le plus vite possible ce dont on a besoin. Ou plutôt, puisque l’on ne dispose pas forcément des fonds pour le faire, d’acheter maintenant et de payer plus tard. Cette solution, qui revient à rendre possible ou à généraliser les achats à terme pour les particuliers, suscite désormais un certain nombre d’initiatives, comme le projet Adva en France. Il y a également la solution de la fintech américaine Accrue Savings.

Vous voulez acheter un bien dont vous redoutez que le prix monte mais vous ne disposez pas des fonds nécessaires? Accrue Savings vous propose d’ouvrir une cagnotte, que vous abonderez périodiquement jusqu’à une date d’échéance fixée. Rien de plus banal. Oui mais l’idée d’Accrue Savings, toute simple, est d’avoir pensé à prévenir le vendeur du bien qui vous intéresse. Celui-ci trouve ainsi un nouveau canal de vente sur lequel, pour encourager ses clients, il peut proposer des promotions qui réduiront la hausse de prix possible lors de l’achat. A terme, Accrue Savings ambitionne ainsi de développer une marketplace d’un genre tout à fait nouveau.

Enfin, si les prix grimpent en flèche, le recours à quelques emprunts sera peut-être nécessaire. Il s’agit donc de faciliter l’accès au crédit. Et dans les pays anglo-saxons où ce dernier est conditionné par un credit score, lui-même dépendant d’un historique de crédit, la néobanque Monese propose son Credit Builder, une solution aussi simple qu’astucieuse qui consiste à transformer l’épargne en emprunt. On choisit en effet de mettre de côté périodiquement une certaine somme jusqu’à un certain montant pendant douze mois sur un compte bloqué. Monese fait alors un prêt du même montant sans intérêts. Ainsi, en même temps que l’on épargne, on rembourse un crédit, ce qui va améliorer le credit score. Certes, une telle solution parait plutôt limite, surtout s’il s’agit finalement de faciliter l’endettement, ce qui n’est pas le plus prudent en période de restriction du pouvoir d’achat. Mais on avait rarement vu une banque prendre ainsi le parti de ses clients!

Par Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor