"Le président doit être plus clair": les agriculteurs se remobilisent jeudi et vendredi à l'appel de la FNSEA

Actions de sensibilisation en supermarchés, convois de tracteurs, rassemblements... La première alliance syndicale agricole FNSEA-Jeunes Agriculteurs appelle ses troupes à se mobiliser jeudi et vendredi, contre les importations "aberrantes" qui minent selon elle l'agriculture française.
Dans son viseur, le projet d'accord de libre-échange entre l'Union européenne et des pays sud-américains du Mercosur dont Bruxelles a lancé le processus de ratification et vis-à-vis duquel la France, hier très opposée, semble depuis se montrer moins défavorable. Loin des grandes journées de blocage des deux derniers hivers, il s'agit cette fois de se mobiliser contre "le Mercosur, les taxes imposées par Donald Trump et le flot des importations internationales qui ne respectent pas les normes qui sont les nôtres", résume Arnaud Rousseau, le président de la FNSEA.
Sur l'accord UE-Mercosur, le dirigeant syndical interpelle Emmanuel Macron depuis que la Commission européenne a présenté le 3 septembre un projet de texte amendé de "clauses de sauvegarde renforcées" pour satisfaire les réticences françaises. "Le président doit être plus clair. L'État nous dit 'on expertise' [le texte, ndlr]. À un moment, il faudra nous dire!", a-t-il réclamé mardi à la presse à l'Assemblée nationale, où tous les syndicats ont été entendus sur ce projet de traité.
Des actions dans les supermarchés
L'accord UE-Mercosur doit permettre à l'UE d'exporter davantage de voitures, machines ou de vins. La filière viti-vinicole, confrontée à un phénomène général de déconsommation et à des conflits commerciaux aux États-Unis et en Chine, a exprimé son intérêt, par le biais de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS). Mais l'accord facilitera aussi l'entrée de bœuf, volaille, sucre, miel, riz, exemptés de droits de douane. Alors que Bruxelles insiste sur la faiblesse des volumes attendus, les filières européennes crient au risque de déstabilisation et de baisse des prix, et surtout à la concurrence déloyale du fait de normes moins-disantes sur le plan sanitaire et environnemental et de contrôles défaillants.
Dès jeudi les manifestants sortiront leurs tracteurs à Dijon et bloqueront un rond-point à Chartres. Ils iront en Bretagne sur les marchés du porc pour dénoncer la baisse des tarifs et les taxes infligées par Pékin au cochon européen dans le cadre d'un conflit commercial avec l'UE. Vendredi des actions sont annoncées en supermarchés en Dordogne, en Haute-Vienne, dans l'Aisne ou encore dans le Doubs.
En Île-de-France, une manifestation régionale avec tracteurs se tiendra sur la place d'Armes, devant le château de Versailles. Sont aussi prévus des rassemblements devant la préfecture de Privas (Ardèche) ou d'Angers (Maine-et-Loire) où est annoncé un "banquet de la honte" avec produits importés, une opération-escargot à Charleville-Mézières (Ardennes), la distribution de produits locaux à Saint-Omer (Pas-de-Calais), ainsi que la présentation dans le Sud-Ouest de produits jugés "aberrants", comme les pommes du Chili ou les noix des États-Unis. Des rencontres sont prévues avec des parlementaires et des eurodéputés.
"C'est vraiment symbolique. On suit l'appel national, mais la période est compliquée", en cette saison de vendanges ou de récolte de maïs, souligne Enzo Rodriguez, président des JA des Pyrénées-Orientales, sans fermer la porte à de nouvelles mobilisations dans les prochaines semaines.
Des syndicats en ordre dispersé
Le texte sur le Mercosur doit encore être approuvé par les États membres puis par le Parlement européen, la Commission espérant leur aval d'ici fin décembre. À l'Assemblée nationale mardi, les syndicats ont exprimé leur opposition au traité dans un rare mouvement d'unanimité. Mais ils se mobiliseront en ordre dispersé. La Coordination rurale (CR), dans une volonté de se démarquer, veut être reçue par le Premier ministre Sébastien Lecornu pour lui présenter ses propositions, avant une mobilisation "avant la fin de l'année".
Le troisième syndicat, la Confédération paysanne, pour sa part a annoncé une manifestation à Paris, "tracteurs en tête", le 14 octobre. Rappelant son engagement de toujours contre les traités de libre-échange, elle dénonce les "contradictions profondes des dirigeants de la FNSEA et de la CR" dont la lutte contre les normes "empêche une réelle stratégie gagnante contre les accords de libre-échange".