Propos sexistes, illégitimité: les femmes managers sont également victimes de discriminations notamment de la part des plus jeunes

Si le déséquilibre entre hommes et femmes dans les postes à responsabilités est encore important, la situation a néanmoins doucement tendance à s'améliorer.
Ainsi, on compte aujourd'hui plusieurs femmes aux manettes d'entreprises du CAC 40, quand quinze ans auparavant, il n'y en avait aucune. Et le quota de 30% de femmes au Comex (Comité exécutif) prévu par la loi "Rixain" a été atteint pour 12 de ces entreprises (en 2022).
Par ailleurs, le seuil de 30% des femmes dans les conseils d’administration des grandes entreprises est désormais dépassé. Cela fait de la France le pays le mieux placé au sein de l’Union européenne. Et selon l'OCDE, la part des femmes cadres supérieures en France se situe autour de 35% en 2018.
Près d'un quart des actifs préfèrent être dirigés par un homme
Dans le même temps, le degré d'acceptation progresse. Être dirigé par une femme ou un homme importe peu pour 7 actifs sur 10 contre 44% en 1987.
Néanmoins, les préjugés ont encore la vie dure. Ainsi, selon une étude* réalisée par l’Ifop pour Flash (une agence spécialisée en data) et Hostinger (entreprise d’hébergement web), 22% des actifs préfèrent toujours aujourd’hui travailler sous les ordres d’un homme plutôt que sous ceux d’une femme (contre 46% en 1987).
Le plus étonnant, c'est que cette vision est la plus partagée par les jeunes actifs qui pourtant devraient être les plus concernés par l'égalité femmes/hommes. Ainsi, 34% des moins de 35 ans disent préférer travailler sous les ordres d'un homme.
Et quand 29% des actifs jugent qu’il est "plus facile de travailler avec un homme qu’avec une femme", c'est le cas de 55% des hommes de 18 à 29 ans...
Surtout, "les remarques sexistes sur la capacité de la gent féminine à diriger et les discriminations dont les femmes se sentent victimes au travail montrent qu’un travail important reste à accomplir dans ce domaine", souligne l'étude.
Ainsi, 53% des actifs et retraités interrogés ont déjà entendu sur leur lieu de travail des propos sexistes visant une femme manager. Les femmes sont 58% dans ce cas, et parmi elles, 74% des 18-29 ans.
Des propos dégradants, plus souvent entendus chez les jeunes actifs
Ces propos et clichés semblent relever du début du siècle dernier... 36% des personnes interrogées ont ainsi déjà entendu qu'une femme qui fait preuve d’autorité "a ses règles".
Là encore, les jeunes sont les plus concernés puisque cette proportion monte à 50% chez les 18-29 ans.
Autre exemple tout aussi consternant, 27% des actifs et retraités ont déjà été témoins de propos laissant entendre qu’une femme en situation de direction avait obtenu son poste en échange de faveurs sexuelles.
Plus globalement, 50% des femmes exerçant des fonctions de management ont le sentiment d’avoir fait l’objet d’au moins une forme de discrimination sur leur lieu de travail.
"On voit ainsi dans cette enquête qu’un nombre non négligeable de jeunes hommes affichent clairement leur préférence pour un environnement et un management au masculin, confirmant l’émergence d’une vision plus traditionaliste, voire l’adhésion pour certains d’entre eux à des thèses très masculinistes", commente Louise Jussian Chargée d’études Opinion & Stratégies d’Entreprise à l’IFOP.
Auto-censure
Ce contexte anxiogène pèse évidemment sur la motivation et la capacité à se projeter pour les femmes en entreprise. Elles sont 79% à estimer qu’il est plus aisé pour un homme de faire carrière que pour une femme.
Pire, parmi les salariées qui aspirent à devenir manager ou à intégrer une équipe de direction dans l’avenir, elles sont 57% à estimer ne pas avoir la personnalité d’un manager et 44% ont le sentiment de ne pas se sentir légitimes pour ces postes. Des chiffres très importants.
"Les raisons pour lesquelles certaines femmes y renoncent – manque de confiance, sentiment d’illégitimité ou crainte de ne pouvoir assumer vie privée et vie professionnelle – restent marquées par un conditionnement toujours très présent", ajoute Louise Jussian.
Cette sorte d'auto-censure s'observe également lorsqu'il s'agit de demander une augmentation. Une autre étude réalisée pour Indeed fin 2023 montre que si 73% des femmes estiment qu'elles ne sont pas assez payées, 46% n’ont jamais demandé une augmentation de salaire au cours de leur carrière...
*: Étude réalisée par l’IFOP pour Hostinger du 7 au 13 mai 2024, par questionnaire autoadministré auprès d’un échantillon de 2.500 personnes (dont 1.254 en activité professionnelle) représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon global a été assurée par la méthode des quotas.