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Projet de loi "plein emploi": ce que contient le texte qui arrive au Sénat

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Le texte prévoit notamment de mettre en place un suivi plus directif des allocataires du RSA.

Ramener le taux de chômage de 7,1% actuellement à 5%, d'ici à 2027. C'est l'objectif que veut atteindre le gouvernement en opérant une vaste refonte du système d'accompagnement vers l'emploi, prévue par le projet de loi "pour une nouvelle société du travail et de l’emploi" dit "Plein emploi".

Après son passage en commission des affaires sociales du Sénat, en juin, le texte va être débattu par les sénateurs à partir de ce lundi 10 juillet. Au total, 500 amendements seront discutés d'ici jeudi sur ce texte, a priori le dernier à l'ordre du jour du Sénat avant la pause estivale. Les députés l'examineront à leur tour en première lecture à l'automne.

Un guichet unique pour les demandeurs d'emploi

Porté par le ministre du Travail Olivier Dussopt, le projet de loi "Plein emploi" doit donner naissance au réseau France Travail, incluant Pôle emploi comme opérateur principal, pour mieux coordonner les acteurs du service public de l'emploi.

Concrètement, il s'agit d'avoir la même procédure d'entrée pour toutes les personnes en recherche d'emploi ou rencontrant des difficultés d'insertion, quelle que soit la porte à laquelle elles frappent. Aujourd'hui seuls 40% des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) sont à Pôle emploi.

Un nouveau nom pour Pôle emploi?

Le texte initial prévoyait même que Pôle emploi soit également renommé France Travail, dès le 1er janvier 2024.

Mais la commission des affaires sociales a amendé le texte pour que Pôle emploi garde finalement sa dénomination. Cette initiative portée par la rapporteure du texte de loi Pascale Gruny (LR) vise à "éviter toute confusion" avec le réseau France Travail, dont Pôle emploi est l'opérateur en chef.

Ce sera donc un des points de discussion importants abordés au Sénat cette semaine.

Un contrat d'engagement pour les bénéficiaires du RSA

Chaque inscrit à France Travail signera "un contrat d'engagement", y compris les allocataires du RSA et les jeunes suivis par les missions locales. C'est dans ce cadre qu'un accompagnement rénové des allocataires du RSA est aujourd'hui expérimenté dans 18 départements avec la question sensible des 15 à 20 heures hebdomadaires d'activité (immersions, remises à niveau, rédaction de CV...).

"La vraie solidarité, c'est aider à sortir" du RSA, a plaidé Olivier Dussopt lundi sur Public Sénat.

Le gouvernement qui avait évoqué 15 à 20 heures d'activité avait finalement rétropédalé sur ce point. Cette disposition ne figurait donc pas dans le texte initial. Mais les sénateurs, l'ont finalement remise sur la table en commission. Ainsi, en contrepartie du versement du RSA, l'amendement prévoit un contrat fixe d'une durée hebdomadaire d'au moins 15 heures d'activité.

Des sanctions prévues

Dans la même "logique de droits et devoirs", le projet de loi rend plus facile la mise en oeuvre de sanctions pour les allocataires ne respectant pas leurs obligations. Avant le couperet d'une radiation - peu appliqué - le versement du RSA pourra être temporairement suspendu en cas de manquement.

Concrètement, si le demandeur d'emploi ne respecte pas les objectifs fixés par son "contrat d'engagement", le RSA ne lui sera plus versé. Mais le versement pourra reprendre dès lors que le bénéficiaire respectera à nouveau ses obligations. Il pourra aussi bénéficier d'un versement rétroactif des sommes non versées.

En commission, les sénateurs ont limité à trois mois de RSA les sommes qui pourront ainsi être versées rétroactivement. Une durée maximale qui fera également l'objet de discussions.

Une franche opposition à gauche

Outre la série d'amendements déposés en commission qui seront discutés en séance publique dès ce lundi, c'est le principe même du projet de loi qui fera l'objet de débats au sein de la chambre à majorité de droite. Deux motions de rejet en bloc ont été déposés sur ce texte qui devrait voir s'affronter deux visions de la société.

Pour le groupe écologiste, ce texte, "qui aurait dû s'appeler le "plein emploi à tout prix", reflète la logique de l'exécutif et de la minorité présidentielle: faire travailler tout le monde, qu'importe le type d'emploi".

"Il fait fi de la violence sociale, économique et symbolique que ce texte infligera aux plus fragiles."

Les socialistes sont "profondément opposés à la philosophie du texte", pointant comme les communistes "une logique de stigmatisation des plus précaires".

Pour Pascale Gruny (LR), "le plein emploi ne pourra être atteint qu'à condition de mettre en oeuvre un accompagnement donnant un contenu réel aux droits et devoirs des demandeurs d'emploi".

Deux autres volets sur le handicap et la petite enfance

Outre la création du réseau France travail et la réforme du RSA, le texte comporte deux autres volets. L'un vise à améliorer l'accès des personnes handicapées à l'emploi dans le milieu ordinaire et l'autre, sur la petite enfance, reconnaît les communes comme "autorités organisatrices" de l'accueil, avec mission de recenser les besoins, informer les familles et construire l'offre.

Dans le détail, le projet de loi veut améliorer l'insertion professionnelle dans le milieu ordinaire des personnes handicapées. La reconnaissance du statut de travailleur handicapé (RQTH) sera désormais automatiquement transmise à France Travail. Un projet professionnel sera déterminé avec les conseillers de France Travail, afin d'orienter le chercheur d'emploi bénéficiant d'une RQTH vers une entreprise ordinaire, si possible, ou une entreprise adaptée. Par ailleurs, le texte compte également aligner les droits des travailleurs des Esat (établissement et service d'aide par le travail) sur ceux des salariés ordinaires.

Enfin, pour encourager l'emploi, le gouvernement veut créer 100.000 places d'accueil supplémentaires pour les jeunes enfants dès 2027 pour atteindre à 200.000 places supplémentaires d'ici 2030. Par ailleurs, les communes de plus de 3500 habitants vont devenir les "autorités organisatrices" de l'accueil de la petite enfance. Elles devront notamment recenser les besoins. Un guichet d'information sera également mis en place dans les villes de plus de 10.000 habitants.

Nina Le Clerre avec AFP