Pourquoi la fonction publique suscite de moins en moins de vocations

On savait que devenir fonctionnaire faisait moins rêver les Français que par le passé. Et à la lecture du très gros rapport que France Stratégie a publié sur le sujet, on prend conscience, chiffres à l’appui, de l’ampleur de ce désamour et de ses conséquences sur le renouvellement de ses effectifs.
Les chiffres les plus flagrants concernent les concours organisés chaque année pour recruter de nouveaux fonctionnaires. Avant la crise Covid, les candidats restaient assez nombreux et d’un niveau suffisamment correct pour que 95% des postes soient pourvus. Sur l’année 2022 (la dernière pour laquelle on dispose de données consolidées), la proportion de postes non pourvus a triplé, passant à 15%. Et encore, selon les concours, cette proportion peut être bien plus élevée.
Le nombre de candidats par poste divisé par 3 depuis 2010
Cela signifie à la fois que trop peu de candidats se présentent au concours, et surtout qu’ils ne sont pas assez nombreux à avoir le niveau souhaité pour remplir leur mission. En 2010, la moyenne était de 12 candidats pour un poste. Cela laissait de la marge pour sélectionner des candidats ayant un bon profil.
En 2022, on est passé à seulement quatre candidats par poste à pourvoir. Sachant qu’une partie des candidats ne se présentent même pas aux épreuves alors qu’ils se sont inscrits. L’État est donc contraint de multiplier les recrutements de contractuels.
Le rapport évoque également le cas de ces jeunes fonctionnaires qui, après quelques années, préfèrent quitter la fonction publique. C’est une tendance qu’on observe notamment parmi les jeunes enseignants. Il y a une dizaine d’années, ils étaient une poignée. Désormais, ces démissions -le plus souvent en début de carrière-représentent 15% de l’ensemble des départs volontaires (les 85% restants étant des départs à la retraite).
La garantie de l'emploi est moins perçue comme un avantage
Mais pourquoi la fonction publique séduit-elle de moins en moins? C’est d'abord une question de salaire, notamment parce que le différentiel avec le privé s’est accentué. Mais ça n’est pas la seule cause. Il y a aussi la garantie de l’emploi qui est moins perçue comme un avantage. Et puis, comme dans le privé d’ailleurs, les conditions de travail se sont détériorées, en partie à cause des difficultés de recrutement.
Les pénuries de personnel mettent ceux qui sont en poste sous pression. On peut parler de cercle vicieux, qui explique par exemple les départs de personnel soignants dans la fonction publique hospitalière. Par ailleurs, même si, dans la fonction publique, sur l’année, on travaille moins que dans le privé, la différence entre public et privé se réduit d’année en année.
Enfin, il y a le fait que de nombreuses missions de service public doivent être assurés 24h/24. La part des fonctionnaires qui doivent accepter de travailler la nuit, le dimanche et les jours fériés est bien plus importante que dans le privé. Une contrainte que de nombreux jeunes ont du mal à accepter.
