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Les salariés devront-ils rembourser leur formation en cas de démission?

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L'engouement récent pour la formation professionnelle et l'apprentissage ont vidé les caisses de son organisme de régulation qui accuse un déficit de 2,5 milliards d'euros. Pour Franck Morel, un des artisans de ce succès, il faut désormais apporter des ajustements.

Faut-il se plaindre quand tout va bien? La récente réforme sur la formation professionnelle et l'apprentissage a porté ses fruits. 2020 aura été une année record pour l'alternance avec 495.000 contrats signés en entreprise, contre 353.000 en 2019. Le Compte personnel de formation (CPF) a aussi trouvé son public.

Mais cette bonne nouvelle cache de nouveaux problèmes. "On est un peu victime du succès de la réforme" explique sur BFM Business l'ancien conseiller d'Edouard Philippe sur les questions sociales, Franck Morel. "L'organisme France Compétences est en déficit de plusieurs milliards (2,5 milliards d'euros, NDLR) et il va falloir faire un certain nombre de choix si on ne veut pas augmenter les prélèvements."

Artisan de la réforme, il propose ainsi "d'optimiser" le levier de la formation, notamment avec une mesure controversée pour endiguer une crainte que connaissent les entreprises: celle de former des salariés qui finissent rapidement par voir ailleurs.

"C'est un frein dans les petites entreprises qui est peut-être en partie psychologique mais qui est réel" souligne Franck Morel. "Un des moyens de répondre à cette objection c'est précisément d'organiser des systèmes de dédit-formation."

Indémnité de transfert

En l'occurrence, il s'agit d'une clause qui prévoit une indemnisation financière si un salarié, qui a profité d'une formation coûteuse, quitte l'entreprise avant un certain nombre d'années. En clair, rembourser tout ou partie de sa formation pour partir. "Peut-être seulement lors de situations de concurrence" tempère Franck Morel.

L'idée séduit, en tout cas la CPME. "Que l'entreprise bénéficie d'un retour sur investissement, c'est la moindre des choses", explique aux Echos son président François Asselin. "On peut comprendre qu'il existe une forme d'engagement du salarié." Les syndicats sont en revanche plus réticents.

Une autre idée émerge également: contraindre une entreprise qui décide de débaucher un salarié à verser une indemnité financière, soit une sorte d'indemnité de transfert.

Se tourner vers les vrais besoins de l'économie

Au-delà de cette épineuse question, Franck Morel estime que la formation doit aussi répondre à une meilleure employabilité. "Les métiers bougent", rappelle-t-il, souhaitant "mieux orienter les dépenses".

"En matière d'alternance, on se rend compte que le boom a surtout profité aux niveaux supérieurs de qualification et pas assez aux bas niveaux de qualification" insiste-t-il. "Il faut trouver un moyen de mieux les cibler."

Même chose pour le CPF. "Il marche très bien. Mais est-ce que les formations qui sont financées sont toute véritablement en lien avec les besoins de l'économie dans la mesure où celui qui a la main sur la formation c'est l'actif et non l'entreprise? Là aussi il y a peut-être quelque chose à creuser pour mieux orienter les fonds vers les vrais besoins de l'économie."

Thomas Leroy Journaliste BFM Business