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Le télétravail poursuit son recul à mesure que les bureaux s'embellissent

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Selon la dernière édition du baromètre Paris Workplace Ifop-Société foncière lyonnaise (SFL), la fréquence de télétravail en Île-de-France est au plus bas depuis le Covid.

Devenu quasiment une norme dans le monde de l'entreprise pendant et après le Covid, représentant même un pré-requis pour les candidats à un poste, le recours au télétravail semble devenir de moins en moins systématique. C'est l'une des conclusions de la 11e édition du baromètre* Paris Workplace Ifop-Société foncière lyonnaise (SFL).

Concrètement, la fréquence de télétravail en Île-de-France est au plus bas depuis le Covid avec 1,5 jour par semaine en 2024 contre 1,7 en 2023, 1,6 en 2022 et 2,3 en 2021. Elle reste néanmoins bien supérieure à la période précédant la crise sanitaire où elle était de 0,7 jour par semaine.

Les entreprises réaménagent leurs bureaux

Comment expliquer cette inversion de tendance alors que toutes les études montrent que les salariés sont attachés à ce mode de travail hybride qui permet (en théorie) de mieux respecter son équilibre vie pro/vie perso?

Il y a bien sûr la pression de certaines entreprises qui considèrent qu'un retour quasi intégral au bureau est indispensable pour des questions d'efficacité. Mais pas seulement. Il y a eu aussi une importante prise de conscience quant à l'importance de l'attractivité des bureaux pour faire revenir les salariés.

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38% des salariés interrogés indiquent en effet que leur entreprise a réaménagé ses bureaux depuis la fin de la crise sanitaire. Selon le baromètre, les salariés votent massivement (47%) pour les bureaux qui ont une approche hôtel (avec les codes de l’hôtellerie).

"A contrario, le bureau start-up, qui était au top de la 'hype' dans les années 2000, ne fait pas vraiment consensus avec ses baby-foot, ses hamacs, ses couleurs vives ou son identité visuelle marquée. Il n’arrive qu’en 4e position sur le critère esthétique et 3e position pour la désirabilité", peut-on lire dans le baromètre.

Le bureau en mode hôtel

Il semble que les salariés souhaitent, et soient sensibles, de plus en plus à un bureau sur-mesure, un lieu de rencontre et de convergence. Des lieux qui sont protéiformes où peuvent s’exercer des activités diverses. Si le mouvement reste encore marginal, il est bel et bien enclenché dans certaines grandes entreprises.

"Réinventée, la présence au bureau doit être synonyme de plaisir, de facilité et de convivialité. Elle se doit de prendre le contrepied des habitudes prises en télétravail et d’apporter cette valeur ajoutée que l’on ne retrouve qu’au bureau", nous expliquait l'an passé Anne Griffon, la directrice de Châteauform', un spécialiste des séminaires et événements d'entreprise qui a justement créé une offre baptisée "Inside" visant à réaménager les bureaux.

"C'est souvent de l'intangible quand il s'agit de créer du collectif, des moments de rencontre", précise-t-elle.

Mais cela quand même passe par des choses très concrètes comme "une offre de restauration adéquate". "Quand la table est bonne, les gens y vont ensemble et se parlent, c'est simple. Ça incite à venir au bureau."

"Ces espaces présentent des atouts différenciants: des volumes hors norme synonymes d’espace, de services intégrés (restauration, conciergerie, accueil), un soin apporté au design avec la recherche d’une signature identitaire, un mobilier qui casse les codes du bureau classique tout en offrant un bon niveau de confort, des espaces ouverts facilitant les rencontres et les interactions tout en préservant l’intimité", confirme le baromètre.

Merci le coworking

"Ensuite, cette nouvelle esthétique a été largement adoptée et popularisée par les tiers-lieux et les espaces de coworking, eux-mêmes étant associés aux notions de souplesse", peut-on aussi lire. En cela, le monde de l'entreprise peut remercier les espaces de coworking type Wework, dont le concept a été largement validé malgré la faillite de l'entreprise.

Outre des bureaux luxueux et confortables, Wework a introduit des concepts assez peu connus dans les bureaux souvent tristes des entreprises: services (conciergerie, garderie...), convivialité, prestations diverses et variées (sports, détente, cuisine de qualité...), approche communautaire...

L'approche semble efficace puisque dans le baromètre Paris Workplace, pour la première fois depuis 2018, une majorité de salariés estime que le bureau est plus un "lieu de vie où on aime passer du temps" (53% contre 38% en 2018) plutôt qu’un "lieu de travail où on préfère passer le moins de temps possible" (47% contre 62% en 2018).

Facteur de bien être mais aussi de recrutement

Résultat, plus un salarié trouve ses bureaux beaux, plus sa note de bien-être au travail est élevée. "Les salariés qui accordent une note esthétique très élevée à leurs bureaux (supérieure ou égale à 9 sur 10) ont une note de bien-être largement supérieure: 8,9 contre 7,1 en moyenne pour l’ensemble des salariés", peut-on lire.

A contrario, ceux qui trouvent que leurs bureaux sont moins beaux que chez eux font plus de télétravail (2,1 jours en moyenne) et sont alors moins attachés à leur entreprise.

"Chaque jour, le télétravail nous met face à un choix cornélien: soit je reste à la maison, soit je vais au bureau. Le salarié est confronté à deux options très différentes d’environnements de travail. C’est bien en se distinguant sur un plan fonctionnel, en encourageant le collectif plutôt que l’individuel, mais également par son esthétique singulière que le bureau va se démarquer du domicile", souligne Dimitri Boulte, directeur général de la Société foncière lyonnaise.

"Plus les collaborateurs ont ce choix, plus ils sont sensibles à la désirabilité de leur bureau et donc à l’esthétisme. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles nous assistons depuis quelques années à une entrée fracassante des codes de l’hôtellerie dans l’univers du bureau."

C'est donc un facteur de bien-être, de recours moins fréquent au télétravail mais aussi un argument pour recruter. Pour 57% des sondés, les bureaux ont été un élément important dans le choix de rejoindre leur entreprise actuelle contre 51% en 2020 et 30% en 2017.

*Étude menée par l'Ifop auprès de 1.300 salariés franciliens. En complément des questions écrites, les sondés ont été invités à réagir à des visuels: 45 photos d’espaces de travail, d’immeubles et de quartiers, choisis pour être également attractifs et représentatifs de l’offre de bureaux dans la région capitale. Certaines des images ont été générées par l’intelligence artificielle. Pour approfondir son étude, SFL a réuni à Paris, en partenariat avec le spécialiste allfactory, deux panels d’employés franciliens, sélectionnés selon des critères de représentativité, pour écouter et analyser leurs perceptions et attentes en termes de "beau".

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business