Deux morts au travail chaque jour: le gouvernement veut poursuivre et punir les employeurs qui mettent en danger leurs salariés

En France, on meurt encore beaucoup (trop) au travail. En 2023, 810 personnes sont décédées au travail, dont 38 âgées de moins de 25 ans, selon le ministère du Travail. Près de 590.000 accidents du travail, dont 40.000 graves, ont été recensés. Le chiffre de deux morts par jour au travail en moyenne ne baisse plus depuis 2010 et la France fait figure de mauvais élève. Pour lutter contre ce fléau, le gouvernement veut plus de verbalisation et de poursuites pénales, selon une circulaire consultée ce mercredi 9 juillet par BFM Business et dévoilée initialement par Le Monde et France Culture.
Contre les employeurs qui manquent à leurs devoirs et qui mettent en danger leurs salariés, les sanctions doivent être bien plus systématiques. C'est en tout cas l'ambition affichée.
Car ces accidents "sont fréquemment la conséquence de l'absence ou de la mauvaise évaluation des risques par l'employeur", précise le document.
La circulaire cosignée par les ministres de la Justice, Gérald Darmanin et du Travail, Catherine Vautrin et Astrid Panosyan-Bouvet, cite aussi "des manquements (...) dans la mise en oeuvre des mesures de prévention nécessaires"
Les inspecteurs du travail devront verbaliser même en l'absence d'accident
L'objectif est donc la tolérance zéro face aux manquements. Les trois ministres veulent ainsi s'appuyer sur une "meilleure coordination des services judiciaires et de l'inspection du travail" et "renforcer l'effectivité de la réponse pénale". Ils souhaitent un "renforcement de la verbalisation des infractions" par les inspecteurs du travail "dans les situations les plus graves" et ce "même en l'absence d'accident du travail".
Sont concernés, notamment, la prévention des risques de chutes de hauteur, l'utilisation des équipements de travail et moyens de protection non conformes, la formation à la sécurité des travailleurs, l'exposition à des agents cancérogènes, la protection des jeunes travailleurs et travailleurs intérimaires.
"S’ils ont des causes diverses, les accidents du travail graves et mortels ont en commun d’être, pour beaucoup, évitables", a fait valloir le ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet.
Malgré ces ambitions, le gouvernement ne prévoit pas de renforcer les moyens alloués à l'inspection du travail, dont les effectifs ont été réduits ces dernières années.
La justice devra "poursuivre l'ensemble des responsables impliqués"
La circulaire invite par ailleurs les parquets et les Directeurs régionaux de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) à favoriser "largement" le "recours à la transaction pénale". En cas de refus, "les procureurs de la République veilleront à engager des poursuites".
Lorsqu'un accident grave ou mortel, ou un risque grave, surviendra, le procureur de la République "veillera à ce qu'une réponse pénale ferme et appropriée soit apportée".
En outre, il devra "identifier et poursuivre l'ensemble des responsables impliqués dans la survenue d'accidents du travail", qu'il s'agisse des personnes morales, ou des "personnes physiques pour les infractions involontaires", sous certaines conditions. Le rôle des maîtres d'ouvrage et donneurs d'ordre devra être analysé et l'enquête devra rechercher "l'imputabilité de l'infraction d'homicide ou de blessure involontaire à toutes les personnes débitrices d'une obligation de sécurité au travail" qu'il y ait un lien contractuel, licite ou illicite, ou "en l'absence de toute relation contractuelle".