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ÉDITO. Au gouvernement, déjà l'heure des premiers couacs

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L'ÉDITO DE RAPHAËL LEGENDRE. Le recadrage de Michel Barnier par Marine Le Pen révèle au grand jour la nouvelle donne politique : la présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale a désormais davantage de pouvoir sur le Premier ministre que le président de la République lui-même.

Le nouveau locataire de Bercy, Antoine Armand, 33 ans, a mis le feu à l’Assemblée et à Matignon en déclarant sur France Inter que le Rassemblement national ne faisait pas partie de l’arc républicain et que donc il ne travaillerait pas avec lui.

Réaction immédiate de Marine Le Pen: la présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale a très directement demandé au Premier ministre "d'aller expliquer à l'ensemble de ses ministres quelle est la philosophie de son gouvernement”.

C'est là qu’on a vraiment pris conscience de cette nouvelle donne politique: désormais, quand Marine Le Pen lève un sourcil, le Premier ministre s’exécute.

Ce qui est encore plus incroyable, c’est que l’appel du chef du gouvernement à la présidente du RN pour calmer les choses et le savon qu’il a ensuite passé à son jeune ministre, se fassent quasiment au grand jour. Quelle humiliation! Et pour Matignon, et pour la coalition.

Il semble loin le temps où le Premier ministre appelait ses ministres à "plus d’action et moins de communication", à être "irréprochables" et à éviter "l’esbroufe". Ce n'était pourtant qu'il y a deux jours.

L’Edito de Raphaël Legendre : Au gouvernement, déjà les premiers couacs - 25/09
L’Edito de Raphaël Legendre : Au gouvernement, déjà les premiers couacs - 25/09
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Passes d'armes

Et ce n’est pas le seul couac que Michel Barnier va devoir gérer. Dès lundi soir en réalité, on a vu les premières passes d’armes par JT interposés entre Bruno Retailleau et Didier Migaud, le premier dénonçant une justice laxiste quand le second lui a répondu que la justice était indépendante et qu’on n'avait jamais autant appliqué de peines.

On pressent un beau duel en perspectives entre le numéro 2 et le numéro 4 du gouvernement. Mais là encore, deux ministres se tirant dans les pattes au 20h dès le premier jour, ce n'est pas vraiment de bon augure pour la suite.

D'autant plus que les vrais sujets de crispations sont encore à venir, comme la réforme de l’aide médicale d'Etat qui risque d’embraser la coalition cet automne.

Hier, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a mis en garde contre un "contournement" du Parlement si le gouvernement choisissait de réformer par décret. Au même moment, la ministre Agnès Pannier-Runacher, représentante de l'aile gauche de la macronie, a déclaré qu’une suppression “ne serait pas acceptable”, après que Bruno Retailleau a dit sa volonté de réformer l'AME.

Bref, un gros bazar qui ne fait que commencer et qui pose 1/ la question de l’autorité de Michel Barnier, coincé entre un RN tout-puissant et des ministres indisciplinés, et 2/ celle de la place de Marine Le Pen dans l'écosystème gouvernemental qui, telle une vice-présidente, semble disposer de davantage d'autorité sur le Premier ministre que le président de la République n'en a lui-même.

On comprend mieux pourquoi Michel Barnier a décrété la santé mentale grande cause nationale de l'année.

Raphaël Legendre