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Abandonner les secteurs "perdus", ouvrir le marché européen à l'industrie chinoise: les propositions chocs d'économistes français et allemands

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À l'occasion du conseil des ministres franco-allemand qui se déroule ce vendredi à Toulon, des économistes des deux pays ont formulé des propositions sur la position à adopter face à l'industrie chinoise.

Après des années d'incompréhensions voire de tensions, Paris et Berlin veulent sceller la relance du couple franco-allemand. Réunis depuis jeudi au fort de Brégançon, Emmanuel Macron et Friedrich Merz participent ce vendredi à un conseil des ministres conjoint à Toulon. Objectif: dessiner une feuille de route commune en Europe avec comme sujets de discussion la compétitivité industrielle, l'énergie, le commerce, la défense mais aussi la position à adopter face au géant économique chinois.

Pour l'occasion, des économistes des deux pays ont travaillé ensemble pour apporter leur contribution. "On a produit cinq mémos, à l’attention des deux gouvernements, sur lesquels les économistes sont d’accord. Il y a un accord intellectuel", explique sur BFM Business Jean Pisani-Ferry, co-initiateur de la démarche.

Ouvrir le marché européen aux produits chinois

Sur la question de la Chine, les propositions de ces experts français et allemands sont claires: il faut ouvrir les portes du marché européen aux produits chinois. En particulier ceux pour lesquels l'industrie européenne a décroché, comme les panneaux solaires. "L’industrie chinoise dépasse de très loin tout le monde donc il n’y a plus d’industrie de panneaux solaires en Europe. Ce n’est finalement pas très grave (d'ouvrir le marché européen aux panneaux chinois) puisque les panneaux solaires, une fois qu’ils sont installés, ils sont installés. Cela ne crée pas de dépendance. Ce n’est pas comme le gaz russe dont on a besoin tous les jours", observe Jean Pisani-Ferry.

"C’est une technologie pour laquelle il faut qu’on admette qu’on a perdu la bataille", poursuit-il.
Les Experts : Commerce avec la Chine, un enjeu pour l'Europe - 29/08
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Transfert de technologies

Inutile donc d'empêcher les consommateurs européens de s'équiper au meilleur coût. Les économistes distinguent néanmoins les secteurs dans lesquels l'Europe est dépassée et ceux où elle a encore une carte à jouer malgré des retards accumulés face à Pékin.

"Il y a d’autres technologies pour lesquelles on ne peut pas perdre la bataille, il faut donc avoir une politique très sectorielle avec des objectifs très clairs sur ce qu’on vise", souligne Jean Pisani-Ferry.

Ces technologies, ce sont les batteries, les technologies vertes ou encore certaines biotechnologies. Dans ces domaines, les experts recommandent d'accepter les investissements chinois en Europe mais à une condition: le transfert de technologies obligatoire. L'inverse donc de la tendance passée lorsque c'est l'Europe qui vendait des transferts de technologies à la Chine.

Sur les batteries par exemple, "les Chinois sont en avance", donc "il faut que les Chinois investissent sur le territoire européen et que la technologie chinoise serve à nous apprendre", explique Jean Pisani-Ferry. Comment convaincre Pékin d'accepter? "On a les arguments: ils sont en surcapacité donc ils cherchent des marchés. On va leur dire que l’accès européen, c’est oui mais cela suppose des investissements sur le territoire européen et des transferts de technologies", poursuit l'expert.

Accepter d'abandonner certains secteurs "perdus" pour obtenir des gains de spécialisation sur d'autres: voilà en résumer ce que suggèrent les économistes. Pas question en revanche de laisser la Chine s'imposer en Europe dans des secteurs critiques stratégiques comme la sécurité nationale qui devront être protégés coûte que coûte. Reste que si ces propositions font consensus parmi les économistes français et allemands, le plus dur sera encore de convaincre l'ensemble des États membres de l'Union européenne de les adopter.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco