Qui sont les bénéficiaires de l'aide alimentaire en France?

"C'est une situation qu'on n'a jamais connue". Alors que les Restos du coeur viennent de lancer leur 38e campagne d'hiver, le président de l'association fondée par Coluche, Pierre Douret, a fait part de son inquiétude dans les colonnes du Parisien. "Avec cette succession de crises, d'abord sanitaire puis économique et climatique, l'année s'annonce très particulière", a-t-il déclaré.
Le retour de l'inflation en particulier pourrait en effet augmenter le nombre de recourants à l'aide alimentaire cet hiver. L'an passé, entre le 15 novembre et le 10 décembre, 1,2 million de personnes s'étaient déjà rendues dans un ou plusieurs des 8000 sites de distribution alimentaire, selon une étude de l'Insee parue ce mardi. En ajoutant les membres composant leur ménage, l'institut de la statistique a estimé entre 3,2 et 3,5 millions le nombre total de bénéficiaires de l'aide alimentaire en nature des associations en 2021.
Dans le détail, sept sur dix (71%) fréquentent les distributions de colis, 28% les épiceries sociales et 12% les distributions de repas. A noter par ailleurs que si neuf recourants sur dix ne fréquentent qu'un seul type de distribution (colis, épiceries sociales ou distribution de repas), 30% disent solliciter plusieurs associations sur une année entière.
"Les plus pauvres des pauvres"
D'après l'Insee, "les bénéficiaires de l'aide alimentaire sont souvent les plus pauvres des pauvres". Ces derniers déclarent en effet 2,3 fois plus de difficultés financières que la moyenne des ménages pauvres.
De fait, les bénéficiaires disposant d'un logement personnel ont un niveau de vie de 637 euros par mois en moyenne, "soit à peine plus du quart du niveau de vie moyen des ménages" et "moins de trois quarts du niveau de vie moyen des ménages pauvres". Au final, seuls 5% des recourants déclarent des revenus supérieurs au seuil de pauvreté.
Les personnes immigrées et logées en hébergement collectif, premières concernées
Si elles représentent 10% de la population métropolitaine, les personnes immigrées composent 44% des effectifs des bénéficiaires de l'aide alimentaire en France. "Une part sous-estimée, puisqu'elle n'inclut que les personnes en mesure de répondre à un questionnaire en français", précise l'Insee. Parmi cette population, 90% sont originaires d'Afrique.
L'institut de la statistique note de surcroît que la grande majorité des recourants à l'aide alimentaire vit en logement ordinaire (86%), qu'il s'agisse de leur logement personnel ou d'un logement dans lequel des proches les hébergent. Les autres sont logés en hébergement collectif (8%), à l'hôtel (2%) ou sont sans abri (4%).
"La situation de logement est particulièrement déterminante. En effet, stocker les produits alimentaires bruts puis les cuisiner suppose de disposer d’un logement", relève encore l'Insee. C'est ainsi que les personnes résidant en hébergement collectif, en hôtel ou les sans-abri recourent respectivement 3,2 fois, 4,3 fois et 9 fois plus aux distributions de repas prêts à consommer que les bénéficiires occupant un logement personnel. Ce recours est aussi 2,9 fois plus important chez les personnes seules que chez les recourants en couple avec des enfants.
Au total, 84% des bénéficiares de l'aide alimentaire reçoivent d'autres formes d'aide (prestations sociales, chèques alimentaires, aide non alimentaires d'associations, etc.). En revanche, les recourants logés en hôtel ou sans abri ont une probabilité 2,8 à 3,9 fois plus élevée de faire partie des 16% ne recevant aucune autre aide que l'aide alimentaire. De la même manière être immigré multiplie ce risque de 1,6 à 2,6 par rapport aux recourants non immigrés.