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Pourquoi c'est à partir de 56 ans qu'on a du mal à retrouver un emploi

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Selon une étude de l'Unedic, le taux de retour à l'emploi durable lorsqu'on est au chômage diminue avec l'âge. C'est à partir de 56 ans que le couperet tombe, pour des motifs de préférence d'emploi, de compétences ou de discriminations liées à l'âge.

Des jeunes et des seniors trop éloignés du marché du travail. Le gouvernement a dressé un tableau préoccupant de la situation de l’emploi en France, non pas à titre individuel mais de manière collective. "Nous sommes 8 sur le terrain de foot, quand les Allemands sont 11", a ainsi déclaré la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet sur le plateau de BFMTV ce mercredi.

Selon le chiffre de l'Insee pour 2023, le taux de chômage des seniors est pourtant en deçà de la moyenne tous âges confondus (4,9% pour les 55-59 ans et 6,4% pour les 60-64 ans contre 7,3% en moyenne).

Reste que 21% des seniors ne sont ni en emploi ni à la retraite (chômage ou inactivité pour motif de santé ou autre). Et selon une étude de l'Unedic, l'organisme qui administre le régime d'assurance-chômage, il est plus difficile aux seniors de retrouver rapidement un emploi qu'aux jeunes.

Passé 56 ans, il devient plus difficile de retrouver un emploi durable

56 ans serait l'âge charnière. À cet âge, le taux d'accès à un emploi durable (d'une durée d'au moins six mois) baisse de 2 à 4 points par rapport aux allocataires âgés de 50 ans pour lequel il s'établit à 35%.

Logiquement ce taux d'accès à l'emploi continue de baisser au fur et à mesure que l'on se rapproche de la soixantaine. L'étude relève également des disparités entre différentes segmentations, la chute dans l'accès à l'emploi est plus brutale pour ceux qui occupaient un CDI ou dont le parcours de carrière était marqué par des problèmes de santé.

Plus préoccupant, lorsque l'allocataire occupait depuis longtemps un CDI, le retour à l'emploi se complique encore davantage. Ainsi pour ceux qui étaient en poste depuis plus de 10 ans, le taux d'accès à un emploi durable décroche un peu plus tôt, dès 54-55 ans.

Des difficultés d'appariement entre les attentes des seniors et celles des entreprises

Comment expliquer ce recul, quelques années avant l'âge de la retraite? L'étude donne comme possible explication l'évolution des préférences avec l'âge. Les allocataires seniors sont plus nombreux à chercher des emplois à temps partiel, à durée limitée ou proche de leur domicile. Les seniors pourraient aussi éviter sciemment les emplois pénibles. L'accès à la formation décline aussi avec l'âge (19% des allocataires ayant ouvert un droit chômage à 30 ans ont accédé à une formation contre moins de 10% à 60 ans).

Il y a aussi clairement un problème de discrimination lié à l'âge. C'est la troisième explication avancée par l'Unedic. Les employeurs pensent que les plus de 56 ans sont moins productif avec l'âge, ce qui n'est pas démontré. Au contraire, selon un rapport de France Stratégie, les entreprises ont tout intérêt à mélanger les compétences entre seniors et juniors pour améliorer la productivité.

Enfin, dernière explication mise en avant par le rapport de l'Unedic: la proximité de l'âge légal de départ à la retraite qui décourage la recherche d'emploi de certains allocataires. Notamment ceux qui ont le moins de contraintes financières et qui feraient moins de démarches ou moins de concessions.

En ligne avec toutes ces difficultés, les régimes d'indemnisation chômage appliquent des règles plus souples dès 55 ans. Ainsi, la durée maximale d'indemnisation est allongée à 22,5 mois dès 55 ans et passe à 27 mois dès 57 ans et plus.

Ces chiffres sont basés sur le panel de "nouveaux entrants" seniors ayant ouvert des droits à l'Assurance-chomâge. Cela concernait en 2022, 350.000 personnes âgées de 50 à 65 ans. L'accès à un emploi est ici identifié par l'obtention d'un poste dans les 12 mois suivant l'ouverture d'un droit. Le nombre total d'allocataires-chômage fin 2023 s'élevait à 2,6 millions.

Stéphanie Coleau avec Marine Landau