La journée du 6 juin sonne-t-elle la fin des mobilisations contre la réforme des retraites?
Cela fait presque 5 mois déjà que la contestation contre la réforme des retraites a commencé. Unies, les principales organisations des travailleurs ont réussi à rassembler des millions de personnes autour d’un texte rejeté par la majorité de la population. Les Français ont déjà battu le pavé lors de 13 journées nationales et la RATP, SNCF, les éboueurs et les énergéticiens, parmi d’autres, se sont mis en grève pour tenter de faire céder le gouvernement.
Mais si le mouvement social contre la retraite à 64 ans est l’un des plus importants de ces dernières décennies, l’exécutif est resté inflexible sur son principal objectif: les Français travailleront plus longtemps. La réforme a été promulguée en avril dernier à l’aide du 49.3, le Conseil constitutionnel n’a pas invalidé le nouvel âge de départ, deux motions de censures ont été rejetées et les premiers décrets ont été publiés.
Le champ d'action se rétrécit pour les syndicats et la journée de mobilisation du 6 juin –qui précède l'examen, deux jours plus tard, de la proposition de loi pour abroger la réforme- pourrait être l'ultime bataille de la rue sur les retraites avant de tourner la page de ce chapitre social mouvementé… Du chapitre, mais pas du livre car pour les centrales, si la lutte change de forme, elle ne s'arrête pas là.
"Après le 6 juin, on mobilise sur quoi?"
"C’est certain qu’on ne va pas faire des manifestations à répétition." Ces mots de Laurent Berger dans les colonnes du Journal du Dimanche mi-mai ne sont pas passés inaperçus. Ils marquent un tournant dans la communication du leader de la CGT qui, tout en maintenant que "la bataille des retraites ne cessera jamais", ne considère plus que celle-ci doit nécessairement continuer à se jouer dans la rue.
"Notre sujet aujourd'hui, au sein de l'intersyndicale, est de se demander si on envoie dans le mur cette force populaire en lui faisant poursuivre un but difficile à atteindre? Ou est-ce qu'on la transforme en énergie pour mettre nos interlocuteurs sous pression et obtenir des avancées concrètes ? Je préfère la deuxième option", a-t-il poursuivi.
Alors, la mobilisation du 6 juin sera-t-elle un baroud d’honneur? Son confrère de la CFTC, Cyril Chabanier, va dans ce sens. "Il est clair que le [vote du] 8 juin, c’est quand même un peu la dernière chance […] Après le 6 juin, on mobilise sur quoi? Il n’y plus d’enjeu qui donne de l’espoir", explique-t-il à BFM Business.
Mardi prochain s’annonce comme une ultime bataille de la rue pour Cyril Chabanier, à moins qu’une situation exceptionnelle –comme l’utilisation de l’article 40- ne vienne secouer la séance à l’Assemblée et en décide autrement. "On est plusieurs à penser ça", assure Cyril Chabanier.
Sur France Inter lundi matin, le leader de la CFE-CGC, François Hommeril, a quant à lui parlé de "trêve" dans la mobilisation. "On a su faire des trêves à plusieurs occasions. Il est fort probable qu'on en fera aussi une cet été," dit-il.
Le combat continue sur d'autres fronts
Si mardi pourrait bien sonner la fin, ou l'interruption, des rassemblements nationaux, pour autant, le combat continuera pour les syndicats. "C’est scandaleux de vouloir appliquer cette réforme à marche forcée. Nous regarderons les 31 décrets et dès qu’il y a une faille juridique, oui on les attaquera", a dit Sophie Binet, leader de la CGT, sur BFMTV dimanche alors que le décret sur les 64 ans venait d’être publié au Journal officiel.
"On continue le combat […] on va travailler sur les décrets", confirme également Cyril Chabanier.
Fort de l'ampleur de la mobilisation et de la lutte qu’ils ont initiées mi-janvier, les syndicats se savent en bonne position pour obtenir des faveurs du gouvernement qui, pour sa part, sort fragilisé de ces mois d'affrontement.
"On doit profiter de cette position de force pour négocier sur le pouvoir d’achat, les salaires…", martèle le leader de la CFTC. Les autres centrales aussi ont, depuis plusieurs semaines, opté pour la même stratégie.
Dans son communiqué du 30 mai, l’intersyndicale appelle d'ailleurs "les travailleuses et les travailleurs, jeunes et retraité.es à faire du 6 juin une grande journée de grèves et de manifestations sur l’ensemble du territoire pour gagner le retrait de la réforme des retraites et des avancées sociales". Le mot d’ordre est clair: mobiliser à nouveau. Mais elle a élargi ses sujets de revendications puisqu'elle évoque aussi "des avancées sociales".