L'absentéisme en entreprise est en recul (mais tout ne va pas bien)

Les différents baromètres le confirment: l’absentéisme recule en 2023. Mais tous les signaux ne sont pas au vert, particulièrement pour les TPE et les arrêts longue durée.

En 2023, l’absentéisme en entreprise recule, mais tous les signaux ne sont pas au vert. Selon le dernier baromètre Malakoff Humanis, 42% des salariés ont été arrêtés au moins une fois en 2023. Des chiffres comparables à 2021, en baisse de huit points par rapport à 2022, où l’absentéisme avait atteint des niveaux records. Une tendance à la baisse confirmée par le baromètre Ayming / AG2R La Mondiale qui donne une volumétrie moyenne de 6,11% d’absentéisme sur 2023, en recul de 9% par rapport à 2022.

"L’indicateur d’exposition, qui est la proportion de salariés ayant eu au moins un arrêt maladie dans l'année, n’est pas suffisant", analyse Guillaume Pertinant, spécialiste de la prévention de l’absentéisme, fondateur de la société Havasu. "Il faut regarder la volumétrie relative, c’est-à-dire le nombre de jours d’arrêt par rapport aux jours théoriquement travaillés pour prendre la mesure du problème."

L'année 2023 signe également le retour des maladies ordinaires. Après le boom des arrêts Covid, les arrêts concernent principalement des affections communes (grippe, angine, gastro-entérite). Enfin les 18-34 ans sont davantage touchés par l’absentéisme que leurs aînés et les femmes plus concernées que les hommes.

Hausse significative des arrêts longue durée

Si le volume moyen des arrêts maladies est en baisse, plusieurs signaux sont à l’orange.

Bien que le baromètre Malakoff Humanis n’en fasse pas état, d’autres analyses démontrent une hausse significative des arrêts longue durée. 30% de hausse des arrêts longs par rapport à 2019 pour le baromètre Ayming / AG2R La Mondiale, et "un taux d’absentéisme record lié aux arrêts longs" pour le baromètre Diot-Siaci. "La baisse de l’indicateur d’exposition ne doit pas nous éloigner de l’analyse du vrai sujet qui est l’augmentation de la durée des arrêts et du nombre d'arrêts longs", alerte Guillaume Pertinant.

En 2022, il y a eu un effet conjoncturel fort, les arrêts qui nous préoccupent désormais sont de nature structurelle.

Les TPE commencent à être concernées par les arrêts de courte durée.

Autre point qui interpelle, la prévalence plus grande des arrêts maladie chez les TPE avec une hausse de dix points par rapport à leur niveau de 2021 alors qu'elle baisse significativement pour les entreprises de 1000 salariés et plus. "Les TPE commencent à être concernées par les arrêts de courte durée. Auparavant il y avait probablement des arrêts non pris car lorsqu'on est absent dans une TPE, cela a un impact sur le reste de l'équipe", relève Marie Content, avocat Associé, experte en droit du travail. À l’inverse, la diminution des arrêts dans les grandes entreprises est peut-être liée aux politiques de mise en œuvre de QVT, prévention des RPS dont la négociation est obligatoire principalement pour les entreprises qui comptent plus de 50 salariés et ont un délégué syndical".

Vers une érosion de l'engagement des salariés dans les petites entreprises

Cette progression de l'absentéisme dans les TPE s’explique par plusieurs facteurs selon Anne-Sophie Godon, directrice Accompagnement social et prévention en entreprise chez Malakoff Humanis, qui a piloté l’étude. "La proportion de jeunes recrutés augmente davantage dans les petites entreprises que dans les grandes. Or les jeunes sont plus enclins à s’arrêter. Il y a donc une corrélation mathématique entre l’emploi des jeunes en TPE et l’absentéisme."

Autre point marquant, "l’érosion de l’engagement" des salariés dans les petites entreprises, où 48% des salariés se déclarent engagés, un chiffre en recul de sept points par rapport à 2020. Cette diminution de l’engagement est un des facteurs d’explication de l’absentéisme, les salariés suivraient davantage les arrêts maladie prescrits par leur médecin.

Lorsqu'on est absent dans une TPE, cela impacte le collectif. C'est fini, la jeune génération ne va plus au-delà de sa propre santé, souligne Marie Content.

Enfin, l’augmentation des arrêts maladie est plus fréquente pour les personnes "en situation de fragilité", alerte la directrice de l'étude Malakoff Humanis. "Lorsque le quotidien devient plus compliqué, qu’un salarié est confronté à des difficultés financières, qu’il n'a par exemple plus les moyens de faire un plein d’essence et qu’il doit se tourner vers les transports en commun, il a moins la capacité de faire face aux aléas et de venir travailler". Les arrêts pour troubles psychologiques ou épuisement professionnel représentent 15% des arrêts, un chiffre qui se stabilise.

Lechypre d’affaires : L'absentéisme au sein des entreprises en baisse en 2023 - 09/04

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Attention à bien analyser les causes de l'absentéisme pour y apporter les réponses appropriées. "Mal interpréter les différents baromètres sur les chiffres de l’absentéisme conduira à des tendances généralisantes, de type "les salariés n’en font pas assez", alerte Guillaume Pertinant. Ce qui empêchera de conduire les mesures de prévention spécifiques à chaque organisation".

Le Baromètre Absentéisme 2024: étude de perception menée pour Malakoff Humanis par l’IFOP auprès de 2488 salariés et 400 dirigeants d’entreprise ou DRH du secteur privé sur les données 2023

Le Baromètre de l’Absentéisme et de l’Engagement Ayming / AG2R La Mondiale s’appuie sur une étude quantitative de l’absentéisme en France en 2023, basée sur les données du Groupe AG2R LA MONDIALE issues de la Déclaration Sociale Nominative (dans le respect des règles RGPD) de 55 465 entreprises du secteur privé employant 3 525 929 salariés en CDI

Marine Landau