Après une nouvelle nuit de gel, les agriculteurs inquiets

Un an après, un nouvel épisode de gel menace les cultures françaises. Un couloir de froid traverse plusieurs départements, dont la Charente, les Pyrénées-Atlantique ou encore le Puy-de-Dôme. Pour la deuxième nuit consécutive, la plus froide pour un mois d'avril depuis 1947 selon Météo France, les agriculteurs se sont battus pour protéger les jeunes pousses d'arbres fruitiers ou de vignes des dégâts liés aux gel.
Et ce n'est pas fini puisque des températures négatives sont encore attendues pour la nuit de lundi à mardi.
Tours antigel, brassage du vent, bougies
Parmi les solutions déployées pour gagner quelques degrés: des tours antigel, le brassage du vent, des bougies antigel ou encore l'aspersion d'eau pour entourer les jeunes pousses d'une couche protectrice. Le but: éviter que des cristaux de glace ne se forment et qu'au lever du soleil, ils fassent un effet "loupe" qui brule les bourgeons.
"Il est encore un peu tôt pour l'annoncer mais ça a tout d'une catastrophe agricole avec des températures entre -3°C et -6°C, ce qui correspond à des pertes de 50% à 100% en une nuit", témoigne sur BFMTV Serge Zaka, agro-climatologue.
Les épisodes de gel tardifs ont toujours existé à cette période de l'année mais à cause du dérèglement climatique, les températures sont plus douces les semaines précédentes. Résultat, les bourgeons sortent plus vite qu'avant. Par rapport à il y a 30 ans, cette étape arrive deux à trois semaines plus tôt et les gelées de printemps sont alors particulièrement violentes pour les bourgeons et les jeunes feuilles.
"Pour la vigne, on devrait mieux s'en sortir que l'année dernière car les bourgeons sont moins avancés. Par contre, pour l'arboriculture, presque toutes les espèces sont en floraison, un stade très sensible au gel. Donc il risque d'y avoir des dégats proches de ceux de l'année dernière", indique Serge Zaka.
Parmi les cultures menacées, tous les fruits à noyaux comme les cerises, les pêches et les mirabelles, ainsi que les fruits à pépins (pommes, poires, kiwis...).
Le gouvernement sur le pont
Jean Castex a promis dimanche d'aider les agriculteurs touchés par le gel, en demandant au ministre de l'Agriculture de mobiliser "dès le début de semaine" le dispositif des "calamités agricoles". Le Premier ministre a également évoqué l'ouverture, si nécessaire, d'un "fonds d'urgence" pour les départements les plus concernés.
Car protéger ses cultures a un coût pour les agriculteurs. Gagner quelques degrés grâce aux bougies antigel nécessite un investissement de 3000 à 5000 euros pour un hectare.
"Si on avait eu les moyens, on l'aurait fait", confie à BFMTV Isabelle Bareix, arboricultrice à Mesnil-Jourdain dans l'Eure.
L'année dernière, un épisode de gel tardif et extrême du 3 au 10 avril avait touché 50% de la production de fruits à noyaux. Une enveloppe exceptionnelle d'un milliard d'euros avait été mise à disposition par le gouvernement, notamment pour les arboriculteurs et viticulteurs qui avaient perdu tout ou partie de leur récolte de l'année, ainsi que pour certains céréaliers.
Avec le dérèglement climatique, ces phénomènes météorologiques pourraient se multiplier dans les années à venir. Les agriculteurs devront peut-être changer leur calendrier pour retarder la reprise de la végétation.