On rentre en moyenne à 33 ans dans la fonction publique (c'était 21 ans en 1980): est-ce le signe d'un choix par défaut?

Les nouveaux arrivés dans la fonction publique sont de moins en moins jeunes. Allongement des études, volatilité, aspirations des jeunes diplômés... Plusieurs facteurs expliquent ce vieillissement.

Les jeunes travailleurs accèdent de plus en plus tard à la fonction publique d'État, à plus de 33 ans en moyenne, et principalement comme contractuels, a pointé vendredi 6 juin la Cour des comptes, qui recommande une politique d'attractivité les ciblant spécifiquement.

Dans un rapport, la Cour constate "une transformation profonde du modèle traditionnel de la fonction publique, basé historiquement sur l'accès au statut de fonctionnaire en début de carrière et par la voie du concours".

En 1980, on entrait dans la fonction publique d'État en moyenne à 21 ans. Force est de constater que les choses ont bien changé: en 2022 l'âge moyen des nouveaux entrants est de 33 ans (39 ans pour les fonctionnaires et 31 ans pour les contractuels).

Des études de plus en plus longues

La première explication tient tout simplement à l'élévation générale du niveau de diplôme (dans le secteur public comme privé). Les jeunes sont plus nombreux à accéder aux études suppérieures, qui sont aussi plus longues, ils entrent donc plus tard sur le marché du travail.

Par ailleurs, les exigeances dans la fonction publique se sont relevées d'années en années. "L’accroissement de la technicité de certains emplois a pu motiver une élévation générale du niveau des diplômes exigés", note la Cour. Par ailleurs, le nombre de postes de catégorie C, qui ne nécessite pas d'avoir le bac, s'est réduit.

Les jeunes diplomés semblent aussi moins privilégier la fonction publique d'Etat pour leur premier emploi. Plus de deux jeunes sur cinq ont en effet déjà connu une expérience antérieure dans le secteur privé ou dans un autre versant de la fonction publique (territoriale ou hospitalière).

Une fonction publique trop hiérarchique aux yeux des jeunes?

À la sortie de leurs études, les plus jeunes sont aussi moins tentés qu'avant par les concours d'entrée dans la fonction publique. Pour eux, il s'agit plutôt d'"une seconde étape de leur parcours professionnel, à moyen terme, souvent dans le cadre de concours internes". Les carrières sont finalement moins linéaires et les aller-retours entre publics et privés se plus fréquents.

Enfin, la Cour pointe un sujet d'attractivité de la fonction publique. Elle estime que les aspirations des jeunes générations - recherche de sens dans le travail, organisation souple, relations moins hiérarchisées - "peuvent se heurter à la représentation qu'ils en ont ou à la réalité des pratiques de la fonction publique de l'État".

Face à ce constat, elle préconise "de mettre en oeuvre au plus vite une stratégie dédiée spécifiquement au recrutement des jeunes, fondée sur une gestion prévisionnelle de ses emplois et de ses compétences à cinq, dix ou quinze ans".

Plus de contractuels

Par ailleurs, parmi les quelque 250.000 nouvelles recrues en 2022, plus de 70% ont été recrutés comme contractuels, contre plus 20% comme fonctionnaires (le reste étant des apprentis, ouvriers d'État ou enseignants d'établissements privés sous contrat).

La Cour constate relève aussi un "essor des contrats temporaires à durée limitée", dont la moitié de moins d'un an, un tiers entre un et trois ans et seulement 1 sur 10 supérieurs à trois ans, induisant une volatilité accrue des effectifs.

"Parmi les agents rentrés en 2020 dans les administrations publiques, 91% des titulaires sont encore présents deux ans après et 94% des moins de 30 ans. En revanche, les contractuels ne sont que 52% à être présents en 2023" et 44% chez les moins de 30 ans.

Parmi les défis de la fonction publique d'État, la Cour note notamment "un vieillissement important lié à l'allongement des carrières", ce qui rend "inéluctables (...) des départs massifs à la retraite dans les prochaines années".

MC avec AFP