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Finances publiques

ÉDITO. Finances publiques: Matignon prépare son show

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Le déficit public a atteint 5,8% du PIB en 2024 et devra être ramené à 5,4% en 2025. Pour préparer un budget 2026 compliqué à l'automne, François Bayrou prépare un grand événement le 15 avril.

Si le déficit public 2024 est finalement un peu moins catastrophique que prévu (5,8% du PIB contre 6% attendu), le nouveau dérapage des comptes publics n'en demeure pas moins une source d'inquiétude: 169,6 milliards d'euros, tout de même. C'est 45 milliards de plus qu'en 2022.

Cela fait trois ans maintenant que les comptes publics ne cessent de se dégrader, sans raison extérieure. La France n'est pas en crise. Nous terminons pourtant l'année très loin des 4,4% de déficit prévus en loi de finances initiale, et encore plus loin du déficit moyen en zone euro (3%).

Les causes de ce naufrage budgétaire sont endogènes. Alors qu'on partait d'un déficit déjà très élevé de 5,4% du PIB fin 2023, les dépenses ont encore progressé de 62,8 milliards en 2024, dont 30,1 milliards de dépenses sociales.

La seule bonne nouvelle, c'est que cette moindre mauvaise nouvelle devrait aider à tenir les 5,4% de PIB cette année, alors que des vents contraires arrivent sur la croissance.

Plus compliquée sera la gestion politique du budget, objet d'opposition par excellence. Ce qui va être intéressant, c’est de voir comment l’exécutif compte faire de la politique autour de ça. En coulisse, le gouvernement est en train de nous sortir le grand jeu.

Une grande cnférence sur les finances publiques

Le show a déjà commencé. Le 2 mars, Amélie de Montchalin a déclaré vouloir "ouvrir la boîte noire de Bercy" en associant davantage les Français, les parlementaires et les collectivités locales à la construction du budget.

Terminées les décisions en chambre entre la direction du Budget, les ministres de Bercy et Matignon. Place à une nouvelle méthode de "transparence". Les mêmes éléments de langage de l’Élysée après la crise des Gilets Jaunes. A l’époque on parlait "d’ouvrir les arrières-cuisines" pour mieux expliquer aux Français les processus de décision.

Mobilisation à tous les étages donc. Les secrétaires généraux des ministères ont été convoqués à Bercy, des revues des dépenses ont été commandées ainsi qu’une revue stratégique des participations de l’État. Ça foisonne! Matignon a même demandé à tous les directeurs d’administration centrale de noter leurs propres missions par des codes couleurs en fonction de leur efficacité.

Surtout, un comité d’alerte sur les finances publiques réunissant les collectivités locales, la sphère sociale (présidents de caisses), des parlementaires de la commission des Finances et les ministres en charges des Budgets, sera lancé mi-avril à l’occasion d’une grande conférence sur les finances publiques que prépare le Premier ministre. Un grand exercice pédagogique sur les enjeux budgétaires. Presque un grand débat national!

Le budget 2026, un "cauchemar"

Tout cela ne mange pas pain et permet d’ambiancer le débat public. Mais disons-le franchement: ça a déjà été fait mille fois et ça ne sert pas à grand-chose. C’est de l’habillage politique. Ce qu’il faut, on le sait très bien:

  • Continuer la réforme de l’État pour que chaque euro dépensé soit le plus efficace possible,
  • Tenir d’une main de fer les comptes de la Sécurité sociale pour redresser les dépenses de santé et de pensions,
  • Imposer un cadre financier contractuel aux collectivités locales dont les dépenses ont bondi de plus de 30 milliards en cinq ans.

Et si la porte-parole du gouvernement prévient déjà que "le budget 2026 va être un cauchemar", c’est simplement parce qu’il risque de faire tomber l'exécutif. Pour le reste, c’est une question de volonté. Car comme le dit le diction: "là où il y a une volonté, il y a un chemin".

Raphaël Legendre