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Finances publiques

Deuxième journée de solidarité adoptée par le Sénat: les syndicats montent au créneau

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Les sénateurs ont adopté un amendement mercredi afin de créer une deuxième journée annuelle de travail non rémunérée. L’objectif est de financer la branche autonomie de la Sécurité sociale. Les syndicats sont opposés à cette mesure qu'ils jugent "inéquitable" et proposent d'autres solutions.

La chambre haute du Parlement a voté un amendement mercredi instaurant une nouvelle journée de solidarité. Défendue par la droite et le centre, et votée à 216 voix pour et 119 voix contre, cette mesure double le temps de travail "gratuit" annuel en le faisant passer de 7 à 14 heures.

Depuis 2004 en effet il existe déjà une journée solidarité. Les entreprises verront donc leur cotisation de solidarité pour l’autonomie (CSA) passer de 0,3% à 0,6%, générant ainsi 2,5 milliards d’euros supplémentaires pour financer la branche autonomie de la Sécurité sociale. Reste que la mesure sera difficile à faire accepter dans l'opinion publique. D'ores et déjà, les syndicats s'opposent fermement à cet amendement.

Une mesure unaniment décriée

C'est tout d'abord la façon de faire du gouvernement qui est critiquée. La CGT considère qu'"on nous impose sans aucune discussion avec les syndicats cette mesure. Les sénateurs ne sont pas les représentants des salariés, c’est nous."

La plupart des syndicats joints par BFM Business dénoncent une façon de faire inéquitable, qui fait peser le poids de l'équilibre du budget sur les salariés.

"Les salaires ont déjà baissé depuis quelques années alors que les cadeaux aux entreprises ont augmenté", s'insurge Denis Gravouil, secrétaire confédéral à la CGT en charge de la protection sociale.

Si la CGT et la CFTC ne s'opposent pas à ce que l’autonomie soit financée par des cotisations patronales et salariales, en revanche les règles doivent être "les mêmes pour tous". Éric Gautron, secrétaire confédéral FO en charge de la protection sociale confirme: "Ce PLFSS est le concours Lépine des mauvaises idées, qui sont de toujours faire payer les salariés". Pour FO, il faut revenir à quelque chose de "rééquilibré" et arrêter l’exonération des cotisations patronales, qui s'élèvent à 80 milliards d'euros par an, précise t-il.

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L'UNSA dénonce une "rustine supplémentaire" qui fait "à nouveau porter la responsabilité de l’équilibre du budget de la Sécurité sociale -et celui de la branche autonomie- sur les seuls salariés."

"Tout travail mérite salaire", martèle de son côté la CFTC. Dans un tweet, le syndicat rappelle que "les Français travaillent 230 jours par an et c’est justement par leur travail (et la rémunération brute qui en découle) qu’ils financent la sécu, l’assurance chômage et nos retraites."

"Pour mieux financer la sécu, augmentez les salaires!"

Un prélèvement sur le travail qui indigne aussi Christelle Thieffinne, secrétaire nationale à la protection sociale CFE-CGC. "Il n’est pas acceptable de résoudre le financement de l’autonomie par un prélèvement sur le travail", dit-elle. La CFE-CGC s’interroge sur l’efficacité de cette mesure: "Cela revient à faire des prélèvements suspplémentaires dans l’entreprise. Est-ce que cela va créer plus de valeur?", s'interroge t-elle.

D'autres pistes de financement envisagées

Pour financer l'autonomie, les syndicats proposent d'autres pistes. Pour l’Unsa, "d’autres solutions plus justes sont possibles: mobilisation des droits de succession, instauration d’une redevance sur les bénéfices des Ehpad lucratifs, taxation plus forte de revenus financiers ou encore la fin de certaines exonérations sociales."

Interrogé par les Echos, le président du Medef Patrick Martin considère qu’"il ne faut rien s'interdire". "En tous les cas, il faut réfléchir à financer davantage la protection sociale via la fiscalité, par exemple avec une TVA sociale plutôt que par des cotisations qui pèsent abusivement sur le travail." La CFE-CGC, va dans le même sens.

"Le financement de la protection sociale ne doit pas être contributif, mais se faire via des impôts et des taxes", selon Christelle Thieffinne, secrétaire nationale à la protection sociale CFE-CGC

La solution? La taxation des produits importés. "Cela permettra de soutenir le modèle de réindustrialisation en France et de soutenir une production à la française", assure Christelle Thieffinne.

"J’espère que le gouvernement ne fera pas l’erreur de passer cette mesure en force et n’ignorera pas les concertations avec les partenaires", conclut-elle.

Louise de Maisonneuve