"Dans les 15 dernières années, 4.000 officines ont fermé": le cri d'alarme des pharmaciens contre les baisses de remises commerciales sur les médicaments génériques

Et si les pharmacies de proximité venaient à disparaître? C'est en tout cas ce que redoute Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Invité de France Inter ce jeudi 14 août, ce pharmacien d'officine exerçant dans l'Aude a partagé de vives inquiétudes pour l'avenir de sa profession, après la parution, début août, d'un arrêté ministériel rabotant les plafonds des remises commerciales accordées par les laboratoires sur les médicaments génériques (les copies des principes, dits médicaments de marque).
"Cette décision (...) va conduire à la fermetures de centaines, voire de milliers d'officines", a-t-il alerté.
Jusqu'ici les pharmaciens d'officine profitaient de remises allant jusqu'à 40% du prix des boîtes de médicaments génériques. Mais à partir du 1er septembre, les remises seront plafonnées à 30% et ce plafond baissera encore, de manière progressive, pour atteindre 20% au 1er juillet 2027.
"Le gouvernement fait le choix de redonner de la marge à l'industrie pharmaceutique, c'est incompréhensible parce que cela ne rapporte aucun argent à l'Assurance maladie", a fustigé Philippe Besset.
"Une pharmacie ferme chaque jour"
Ces baisses de plafonds représentent un manque à gagner important pour les pharmacies qui n'ont pas atteint une certaine taille critique pour tenir le coup. Il est de l'ordre de "300 millions d'euros en année pleine", selon les chiffres avancés par Pierre-Olivier Variot, président de l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (Uspo), auprès de BFM Business.
Or, les pharmacies subissent déjà depuis plusieurs années "une politique drastique sur le médicament", a insisté Philippe Besset au micro de France Inter ce jeudi.
"Et en même temps, les pharmaciens ont été incités (...) à devenir les acteurs du soin de premier recours, c'est-à-dire la dernière porte de la santé dans les villages, dans une période de désertification médicale", a-t-il souligné.
Malgré les nouvelles missions attribuées aux pharmaciens, notamment en matière de vaccination, les officines sont de moins en moins nombreuses dans le pays alors même que la demande de soins augmente, sous l'effet du vieillissement de la population.
"Dans les 15 dernières années, 4.000 officines ont fermé, on est passé d'un réseau de 24.000 à 20.000 officines en France, on a eu 260 fermetures l'an dernier, 140 depuis le début le début de l'année. Une pharmacie ferme chaque jour sur le territoire, cela atteint les petits villages, les quartiers, ce sont les structures de proximité qui sont atteintes", a alerté le président de la FSPF.
Grève nationale samedi 16 août
Après les grèves des gardes plus tôt dans l'été, le syndicat appelle à renforcer la mobilisation. Samedi 16 août, les officines sont appelées à fermer leurs portes au public toute la journée au niveau national. L'appel à la grève devrait être largement suivi, jusqu'à 90% dans certains départements, selon l'Uspo.
Il faut dire que la colère des pharmaciens est multifactorielle. En plus des baisses des plafonds de ristournes commerciales sur les médicaments génériques, la profession est aussi profondément opposée aux nouvelles augmentations des franchises médicales envisagées par le gouvernement, dont un projet de décret, consulté par BFM Business, a déjà été soumis pour avis consultatif aux caisses de l'Assurance maladie.
Sous prétexte de sensibiliser les patients au coût de la santé et d'en finir avec le mythe du "tout gratuit", le gouvernement prévoit d'impliquer les pharmaciens dans le réglement, par les patients, de ces franchises sur les boîtes de médicaments. "Le fait de transformer le pharmacien en collecteur d'impôt, on ne le fera pas. C'est la pire des mesures que François Bayrou a proposé", a dénoncé Philippe Besset.