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Budget: qu'est-ce que la "loi spéciale" annoncée par Macron pour assurer "la continuité des services publics"

Le ministère de l'Economie, dit Bercy, le 15 novembre 2022 à Paris

Le ministère de l'Economie, dit Bercy, le 15 novembre 2022 à Paris - JOEL SAGET © 2019 AFP

Le futur gouvernement déposera une loi spéciale "avant la mi-décembre au Parlement", a annoncé ce jeudi 5 décembre Emmanuel Macron, tablant sur cet outil législatif rare mais déjà utilisé, pour permettre à l'appareil d'État de fonctionner en l'absence de promulgation d'un budget au 1er janvier.

Sans elle, la France sera (vraiment) dans l'inconnu. Une "loi spéciale" sera présentée à l'Assemblée nationale et au Sénat "avant la mi-décembre", a annoncé Emmanuel Macron dans son allocution aux Français ce jeudi 5 décembre. Au lendemain du vote d'une motion de censure historique contre le Premier ministre Michel Barnier, le président de la République a promis que la "priorité" du futur gouvernement sera le "budget".

Et face à un calendrier très serré, la prochaine équipe gouvernementale va donc utiliser une disposition qui permet à l'État de maintenir les recettes fiscales et d'assurer son fonctionnement.

• Quand le texte doit-il être déposé au Parlement?

La "loi spéciale" est prévue à l'article 45 de la loi organique relative aux lois de finances. Si le gouvernement n'a pas réussi à faire adopter un budget par le Parlement - et c'est le cas - il peut déposer, "avant le 19 décembre", "un projet de loi spéciale l'autorisant à continuer à percevoir les impôts existants" jusqu'au vote d'un prochain budget début 2025.

En clair, comme l'a résumé Emmanuel Macron, il s'agira d'assurer "la continuité des services publics et de la vie du pays: elle appliquera pour 2025 les choix de 2024". L'Assemblée nationale et le Sénat examineront ce texte selon la procédure accélérée: il n'y aura pas de double-lecture. Chaque chambre se prononcera donc une seule fois seulement.

Pour qu'il puisse entrer en vigueur, ce "projet de loi spéciale" doit être promulgué par Emmmanuel Macron avant le 1er janvier 2025.

• Quel sera son contenu?

Ce texte pourrait être assez court, avec a minima un article de loi autorisant formellement "l'État à percevoir les impôts existants". Le reste est accessoire. Le président de la République l'a annoncé: le nouveau gouvernement, une fois qu'il sera nommé, "préparera un nouveau budget", sans doute débattu au Parlement début janvier 2025.

"Il est nécessaire d'avoir ce budget pour en tout début d'année prochaine pour permettre au pays d'investir comme prévu. Pour nos armées, notre justice, nos forces de l'ordre, pour aider nos agriculteurs en difficulté", a affirmé Emmanuel Macron.

À noter qu'il est possible, à tout moment de l'année, de déposer un PLFR: un projet de loi de finances rectificative, afin de faire des modifications sur le budget de l'exercice en cours. Ce fut le cas au lendemain des législatives en 2022, ou pendant la crise sanitaire et la pandémie de Covid-19 en 2020.

• Qui va voter cette loi?

"Et je compte bien qu'une majorité puisse se dégager pour l'adopter au Parlement", a martelé le chef de l'État. En fonction de son contenu, tous les députés pourraient voter ce projet de loi, y compris ceux qui ont censuré le gouvernement Barnier.

"Si Monsieur Macron ne nomme pas un gouvernement du Nouveau Front populaire, la loi spéciale est l’option raisonnable en attendant un vrai budget, avec un vrai débat politique", explique au Monde le président LFI de la commission des Finances de l'Assemblée nationale Eric Coquerel.

Du côté du Rassemblement national, Marine Le Pen indiquait sur TF1 quelques minutes après le vote de la motion de censure ce mercredi qu'elle "votera bien sûr" une loi spéciale. "Nos institutions sont en granit", a-t-elle dit, interrogée sur le risque d'instabilité du pays.

L'équation est plutôt simple. Si la loi spéciale n'est pas adoptée, il ne restera à Emmanuel Macron qu'une seule arme constitutionnelle pour prendre des mesures budgétaires au-delà du 1er janvier: l'article 16. Et si la France reste sans budget en 2025, ce serait un "shutdown", inédit dans l'histoire de la Ve République.

A.G avec AFP