Doigts d'honneur, incivilités... Des conducteurs de Tesla pris pour cible par des anti-Elon Musk

Est-ce le début d'une "Tesla shame" (honte d'avoir une Tesla)? Il y a quelques jours un tweet d'Alyssa Milano anti-Tesla est devenu viral. L'actrice américaine y annonce avoir abandonné sa Tesla pour une Volkswagen électrique.
"Je ne sais pas comment les annonceurs peuvent acheter de l'espace sur Twitter, explique-t-elle. Les produits d'une société cotée en bourse poussés dans l'alignement de la haine et de la suprématie blanche ne semblent pas être un modèle commercial gagnant."
L'actrice vise la stratégie d'Elon Musk qui a décidé de rétablir sur Twitter les comptes de Donald Trump et d'un certain nombre de ses soutiens, comptes supprimés après l'attaque du Capitole en 2020.
Si de nombreux messages en réponse ont ironisé sur l'origine nazi de Volkswagen, le "Tesla bashing" de Milano semble se répandre depuis quelques mois.
Une popularité en chute libre
En août déjà, un article du site américain Axios faisait état d'un certain nombre d'incivilités subies au volant par des conducteurs de Tesla dans l'Iowa. Gestes obscènes, blocage dans la circulation pour accéder aux bornes de recharge, queues de poisson de camions... Le compte Facebook Iowa Tesla Owners fait état de dizaines d'intimidations qu'auraient subies des propriétaires de Tesla.
La faute à la personnalité du patron du constructeur de véhicules électriques américain. Très actif sur les réseaux sociaux, provocateur et clivant, Elon Musk a vu son image se dégrader dans l'opinion publique, notamment depuis le feuilleton du rachat de Twitter.
Un sondage réalisé en juillet aux Etats-Unis par Civic Science faisait état de 54% d'opinions négatives concernant la personnalité d'Elon Musk contre 54% d'opinions poisitives trois mois plus tôt en avril.

D'autres études et enquêtes similaires confirment cette détérioration de l'image du très médiatique patron.
"Lorsque nous parlons aux propriétaires de Tesla, il n'est pas rare de les entendre dire: "Vous savez, je pense vraiment à justifier mon achat parce qu'Elon a fait un autre tweet et c'est odieux"", assurait déjà en 2021 Mike Dovorany, consultant dans le secteur automobile.
Le journal The Guardian qui a interrogé des possesseurs de Tesla a recueilli des témoignages similaires.
"Des conducteurs grossiers au hasard font une embardée dans ma voie pour me crier dessus, ou lancent un échappement diesel lourd qui souffle de la fumée noire", assure Paul Albertson, un automobiliste américain de l'Oregon qui précise ne jamais subir ce type d'incivilités au volant de sa vieille Chevrolet.
Des intimidations qui vireraient même au harcèlement routier, à en croire certains témoignages. Comme celui de Theresa Ramsdell, originaire de Bellevue dans l'Etat de Washington.
"Les gens nous coupent sur l'autoroute, nous font un doigt d'honneur, me crient dessus par les fenêtres, témoigne-t-elle dans le Guardian. Quelques personnes n'ont pas vraiment essayé de me pousser hors de la route, mais elles conduisaient très près de ma voiture en souriant. Ça m'est arrivé deux fois à 105km/h et c'est effrayant."
Au confluent de toutes les haines
Les conducteurs de Tesla seraient au confluent de deux courants de haines contradictoires. Auparavant villipendés par des conservateurs qui jugeaient les possesseurs de voitures électriques comme des "bobos" électeurs du parti démocrate, ils seraient désormais pris à partie par des gens du camp opposé, jugeant Elon Musk complaisant avec Donald Trump.
"C'est ironique mais le fait est que Tesla est un aimant à haine pour diverses raisons", assure au Guardian Marc Geller, porte-parole de l'Electric Vehicle Association aux Etats-Unis.
"Ils ont fait l'objet de rage au volant parce qu'ils représentaient l'environnement et étaient perçus comme l'incarnation de cette guerre culturelle, poursuit-il. Mais maintenant certaines personnes de gauche ont une réaction épidermique parce qu'Elon Musk a pris ce virage inquiétant vers la droite politique, alors maintenant ils jettent les mêmes briques."
Après avoir contribué au succès retentissant de Tesla, la personnalité clivante d'Elon Musk serait-elle devenu un handicap pour le développement de la marque? Pour l'heure le conseil d'administration du constructeur fait le dos rond et continue de soutenir le fantasque patron. Il y a deux semaines, les administrateurs se sont succédés à la barre d'un tribunal du Delaware pour défendre la faramineuse rémunération de 56 milliards de dollars accordée à Elon Musk pour s'assurer de sa fidélité.
Car pour l'heure, les ventes de véhicules ne semblent pas pâtir des saillies polémiques du Pdg de Tesla. Avec plus de 908.000 Tesla livrées lors des trois premiers trimestres, le constructeur a quasiment déjà fait aussi bien que sur l'ensemble de l'année 2021 (935.000 véhicules) qui était déjà un exercice record.
Seule ombre au tableau, le cours de Bourse du fabricant a fortement dévissé ces derniers mois. La valeur de l'action été divisée par plus de deux depuis le début de l'année et la capitalisation boursière qui atteignait 1250 milliards de dollars en janvier est depuis tombée à moins de 580 milliards.
