Cumuler des congés en arrêt maladie? La Cour de cassation contredit le droit du travail français

Le Code du travail français va-t-il devoir se mettre en conformité avec le droit européen? Les magistrats viennent en quelques semaines de mettre deux coups de canif dans la législation française en matière de protection des salariés malades. C'est d'abord la Cour administrative d'appel de Versailles qui dans un arrêt daté du 17 juillet a contredit l'article L3141-5 du Code du travail en estimant qu'un salarié malade devait avoir le droit de cumuler des jours de vacances.
Ce mercredi la Cour de cassation a pris une décision similaire.
"La Cour de cassation met en conformité le droit français avec le droit européen en matière de congé payé, explique la juridiction dans un communiqué. Elle garantit ainsi une meilleure effectivité des droits des salariés à leur congé payé.
Dans les faits, des salariés avaient contracté une maladie non professionnelle qui les avait empêchés de travailler. Par la suite, ils avaient calculé leur droit à congé payé en incluant la période au cours de laquelle ils n’avaient pas pu travailler. Ce que le droit du travail français n'autorise pas, sauf dispositions plus favorables de convention collective.
L'article L3141-5 est très clair sur le sujet. Les arrêts maladies ne sont pas considérés comme des "périodes de travail effectif" susceptibles de déterminer la durée du congés à la différence des congés maternité et paternité, les accidents du travail et maladies professionnelles ou les congés payés eux-mêmes.
Une décision applicable dans les entreprises ?
Des dispositions qui ne sont pas conformes avec la législation européenne et notamment la directive de 2003 sur le temps de travail
Selon le droit de l’UE, lorsque le salarié ne peut pas travailler en raison de son état de santé, situation indépendante de sa volonté, son absence ne doit pas avoir d’impact sur le calcul de ses droits à congé payé, rappelle la Cour de cassation. Selon le droit français, un salarié atteint d’une maladie non professionnelle ou victime d’un accident de travail n’acquiert pas de jours de congé payé pendant le temps de son arrêt de travail.
La Cour juge donc que les salariés atteints d’une maladie ou victimes d’un accident, de quelque nature que ce soit (professionnelle ou non professionnelle) ont le droit de réclamer des droits à congé payé en intégrant dans leur calcul la période au cours de laquelle ils n’ont pas pu travailler.
Pour autant, est-ce que cette décision va changer les règles applicables pour les salariés en France ? Les entreprises se réfèrent au Code du travail ou aux conventions collectives dans l'organisation du travail et non au droit européen. Il faudrait une évolution législative pour que cette décision devienne une obligation sauf si les salariés portent l'affaire en justice.
A date, les fonctionnaires pourront réclamer l'application de ces dispositions car la décision de la Cour administrative d'appel de Versailles est d'application directe.
Les salariés du privés devront attendre que le Code du travail se mette en conformité pour que leur entreprise leur accorde automatiquement ces jours mais à défaut ils peuvent porter l'affaire devant la justice par la jurisprudence de la Cour de cassation est d'application directe pour les employeurs.
L'exécutif n'a pour l'heure pas réagi à la suite de ces nouvelles jurisprudences. S'il ne pourra pas échapper à une évolution du droit du travail, il n'en reste pas moins que la situation est complexe. Les directives européennes se réfèrent en effet à quatre semaines de congés payés annuels alors que c'est cinq en droit français. Les nouvelles dispositions pourraient prendre en compte ces références communautaires et calculer les droits à congés payés sur la base de quatre semaines et non pas cinq durant les périodes d'arrêt maladie.
