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Coronavirus: comment le gouvernement fait face à la pénurie et au trafic de masques FFP2

Jérôme Salomon

Jérôme Salomon - BFMTV

Pour faire face à la pénurie et au trafic, les masques de protection FFP2 seront réquisitionnés jusqu'au 31 mai. Un décret publié ce mercredi vise les stocks détenus par "toute personne morale de droit public ou de droit privé" et ceux détenus par les entreprises qui en assurent la fabrication ou la distribution

Les masques FFP2, ceux qui protègent du coronavirus se font rares. Volés dans les hôpitaux, réclamés par les médecins, réquisitionnés par Emmanuel Macron: les masques de protection sont au centre de toutes les attentions au moment où l'épidémie provoquée par le nouveau coronavirus s'intensifie en France.

Au moins 8300 masques ont été volés dans des établissements de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). A Marseille, on en a dérobé 2000 à l'hôpital de la Conception. Au niveau mondial, l'OMS a alerté sur le "rapide épuisement" des équipements de protection.

Pour éviter une pénurie, l'Etat a décidé de réquisitionner les stocks et la production de masques de protection, a annoncé le président Emmanuel Macron, mardi dans un tweet.

Dès mercredi, un décret a été publié au Journal officiel. Le texte "relatif aux réquisitions nécessaires dans le cadre de la lutte contre le virus Covid-19" vise à assurer un accès prioritaire à ces équipements aux professionnels de santé et aux patients atteints par la maladie.

Sont réquisitionnés jusqu'au 31 mai, les stocks de masques de type FFP2 détenus par "toute personne morale de droit public ou de droit privé" et les stocks de masques anti-projections détenus par les entreprises qui en assurent la fabrication ou la distribution. Les masques de protection respiratoire de type FFP2 et les masques anti-projections produits d'ici au 31 mai sont réquisitionnés, insiste le décret.

Ces deux catégories sont concernées par le port du masque, et pas le grand public, martèlent les autorités depuis le début de la crise. Pourtant, aux yeux du grand public, l'objet symbolise plus que tout autre cette crise sanitaire, à travers les images de presse ou les photos rigolardes sur internet, avec par exemple des soutiens-gorges utilisés comme masques.

15 millions de masques prélevés sur le stock de l'Etat

Il existe deux types de masques. Les premiers, les masques chirurgicaux, sont ceux qu'un malade doit porter pour éviter de contaminer d'autres personnes. Les autres, dits FFP2 (en forme de bec de canard), sont plus perfectionnés. Ils ont un système de filtrage et sont étanches quand on les place sur le visage, pour offrir un plus haut niveau de protection.

Devant les inquiétudes des médecins de ville (hors hôpital), le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé mardi qu'à ce stade 15 millions de masques chirurgicaux avaient été prélevés sur le stock de l'Etat à leur intention, ainsi que pour les Ehpad. Ils pourront les retirer dans les pharmacies. Quinze à vingt millions d'autres devraient suivre, également issus des quelque 145 millions en stock.

Mais ces derniers jours, des syndicats de médecins libéraux ont réclamé que des masques FFP2 soient fournis d'urgence à ces soignants. Ils font valoir que les masques chirurgicaux ne suffisent pas à protéger les médecins.

La question des stocks

L'Elysée n'a pas précisé si les réquisitions concerneraient les masques chirurgicaux, les FFP2 ou les deux à la fois. Devant l'Assemblée nationale mardi, Olivier Véran a toutefois évoqué les deux types de masques.

"Nous disposons de quatre grandes entreprises sur le territoire national qui fabriquent ces masques, auxquelles nous avons passé les commandes publiques les plus massives qui soient" et à qui il a été demandé de "fonctionner jour et nuit, H24, 7 jours sur 7, de manière à fournir le maximum de masques possible", a-t-il dit. 

Précision importante: il a indiqué que l'Etat ne disposait pas de stocks de masques FFP2. Une situation qui remonte selon lui à 2011: après l'épidémie de grippe A/H1N1 de 2009-2010, pour laquelle la réponse de l'Etat s'était révélée surdimensionnée, il avait été décidé que "la France n'avait pas à faire de stocks d'Etat de ces fameux masques FFP2".

"Ce qui n'a peut-être pas été anticipé en 2011"

"Ce qui n'a peut-être pas été anticipé en 2011, et c'est sans aucune polémique, c'est que parfois des crises sanitaires peuvent entraîner des crises industrielles", a avancé Olivier Véran. En 2011, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, le ministre en charge de la Santé était Xavier Bertrand. Quant à l'efficacité des différents masques, le N.2 du ministère, Jérôme Salomon, a voulu "rassurer les professionnels de santé".

"Il y a une équivalence stricte des masques chirurgicaux avec les masques FFP2 pour les virus transmis par voie gouttelettes" (c'est-à-dire par les postillons des malades comme c'est le cas du nouveau coronavirus), a-t-il assuré mardi soir, en conférence de presse.

Il s'est appuyé pour cela sur une étude publiée en septembre dans la revue médicale américaine Jama, qui comparait les protections offertes par les deux types de masques contre la grippe. Le "masque chirurgical, surtout s'il est associé au port du masque par le malade, protège efficacement" les professionnels de santé, a-t-il ajouté. 

Selon Jérôme Salomon, les masques FFP2 sont avant tout préconisés pour "les personnels soignants qui pratiquent des soins très particuliers", c'est-à-dire ceux qui prennent les malades en charge de façon rapprochée à l'hôpital.

Pascal Samama