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"Une descente en gamme historique": comment la consommation des Français a été bouleversée par l'inflation

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L'étude annuelle de NielsenIQ montre à quel point les Français ont multiplié les arbitrages face à une inflation élevée l'an passé. Une inflation moins brûlante en 2024 changera-t-elle ces nouvelles habitudes?

Ce n'est pas une surprise, l'inflation élevée en 2023, encore plus sur l'alimentaire, a profondément modifié les habitudes de consommation des Français. Une évolution détaillée dans le bilan annuel de NielsenIQ.

D'abord, de nombreuses dépenses ont été réduites: 51% des Français interrogés ont moins dépensé dans l'habillement, 48% dans les loisirs en dehors du domicile. 61% sont moins allés au restaurant.

Le coup de main conso : Les marques distributeurs séduisent de plus en plus - 27/08
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Plus inquiétant, face à la flambée des prix, 22% ont limité les dépenses en nourriture et autres produits alimentaires essentiels. Comment? Ils sont 47% à comparer plus attentivement les prix, 44% à acheter davantage en promotion, 38% à acheter moins de viande et de poisson.

1 produit sur 2 acheté est un produit de Marque de Distributeur

Mais surtout, en s'orientant massivement vers les marques de distributeurs. NielsenIQ évoque même "une descente en gamme historique des Français".

Ces marques ont représenté 20,9 milliards d'euros de ventes l'an passé contre 20,5 en 2022 et 20,3 en 2021. Il s'agit de leur meilleure performance depuis 2017.

"Aujourd’hui, 1 produit sur 2 acheté par les Familles est un produit de Marque de Distributeur", souligne l'étude.

"Les MDD (marques de distributeurs) ont performé en 2023, enregistrant leur meilleure performance depuis 2017. La France est même dans le Top 3 des pays d’Europe de l’Ouest où la MDD a le plus progressé", commente Daniel Ducrocq, analytique et expert consommation chez NielsenIQ.  

Le choix de ces marques concerne tous les profils de consommateurs. Ainsi, les achats progressent de 2,3% pour les familles modestes, de 5,6% pour les foyers moyens et de 9,5% pour les ménages aisés.

"Dans ce contexte inflationniste, les enseignes à forte image prix surperforment. C’est notamment le cas de Leclerc", souligne l'étude. La chaîne voit sa part de marché passer de 21,5% en 2021 à 22,6% en 2023 tandis que Lidl passe de 7,5% à 8% sur la même période.

Succès des solderies, Action en tête

Autres grands gagnants de 2023, les solderies dont "le boom ne se dément pas, via notamment leur rayon droguerie, parfumerie, hygiène qui est pris d’assaut par les consommateurs. 11% des pertes du rayon en hypermarché sont récupérées d’ailleurs par les solderies", peut-on lire.

Exemple avec l'enseigne Action qui voit son nombre de foyers acheteurs progresser de 18% en 2023 et son chiffre d'affaires prendre 23%, alors que son parc de magasins n'augmente que de 10%.

A l'inverse, certains marchés ont bu la tasse, pénalisés par des prix jugés élevés. Le bio est en première ligne avec une baisse de 11,3% en volume et de 3,1% en valeur à 5,6 milliards d'euros, à fin 2023, selon NielsenIQ. Une tendance qui n'a pas échappé aux distributeurs puisque dans le même temps, le nombre de références baisse de 10,9%.

Aucune catégorie d'acheteurs n'est épargnée: -15% chez les moins de 35 ans sans enfant, -14% chez les familles, -10% chez les seniors. 60% de ceux qui ont fait le choix de limiter leurs achats de bio considèrent que ces produits sont trop chers par rapport aux bénéfices qu'ils apportent.

Reste à savoir si cette tendance va perdurer cette année. Certes l'inflation va se maintenir mais elle devrait ralentir sensiblement à 2,5% environ. De quoi peut-être assouplir les restrictions observées l'an passé.

Une inflation plus faible en 2024 pourrait desserrer l'étau

"Pour les marques et enseignes qui progressent et recrutent, un mot d’ordre en 2024: fédérer! Ceci passe notamment par l’accessibilité prix, des formats familiaux ou de partage, le tout sans compromis sur les bénéfices du produit. Elles devront donc continuer d’innover tout en restant compétitives", souligne l'étude. 

"Consommer moins et mieux n'empêchera pas les Français de goûter aux petits plaisirs. En effet, le plaisir confirmera en 2024 son statut de valeur refuge mais restera sous contrôle", ajoute-t-elle.

"Malgré tout, le consommateur cherchera des alternatives moins chères qui lui apporteront du plaisir en fonction du moment de consommation choisi". 

"Les produits sains pour un corps sain (cible jeune), la carte de l’exotisme pour séduire des consommateurs de plus en plus mondialisés et réceptifs aux tendances de l’autre bout de la planète, ou bien encore la réponse personnalisée aux besoins des différentes communautés, sont parmi les tendances qui marqueront encore 2024 et les années à venir", complète David Lecomte.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business