Négociations commerciales: quelles sanctions en cas de non respect de la date butoir?

Ils n’ont plus que quelques heures pour se mettre d’accord. Distributeurs et industriels ont jusqu’à ce mardi, 23h59, pour conclure les négociations commerciales annuelles. Mais les discussions sont particulièrement tendues cette année alors que les transformateurs cherchent à répercuter l’inflation sur les prix de vente en supermarché. Résultat, beaucoup de contrats n’étaient toujours pas signés à quelques jours de la date butoir.
Il y a une semaine, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, déplorait en effet que la proportion de contrats signés était de "20 points" inférieure à celle que l’on observait habituellement à la même période, notamment pour les grands groupes. La Fédération du commerce et de la distribution revendiquait elle 75% de signatures dans les PME mais seulement 30% pour les grands groupes.
Les retards dans la conclusion de contrats commerciaux ne sont certes pas rares, mais ils pourraient être encore plus nombreux cette année. Avec des sanctions susceptibles de frapper les distributeurs et industriels au portefeuille s’ils ne parviennent pas à se mettre d’accord dans les temps. Ces derniers sont passibles "d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75.000 euros pour une personne physique et 375.000 euros pour une personne morale", selon la loi Egalim 2, qui précise:
"Le maximum de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive".
Julien Denormandie n'exclut pas le "name and shame"
En 2020 Carrefour, Système U et Intermarché avaient été sanctionnés par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à des amendes respectives de 2.9310.000, 1.140.000 et 211.000 euros pour des manquements observés lors des négociations 2019. "Les constatations réalisées par les agents (…) ont mis en évidence le fait que la règle fixant une date butoir au 1er mars pour la signature des conventions annuelles n’avait pas été respectée pour un nombre significatif de fournisseurs", expliquait la DGCCRF.
Cette année encore, la DGCCRF assure mener des centaines de contrôles. "Julien Denormandie ne fait pas encore de ‘name and shame’ (dénoncer publiquement, ndlr) mais en fera si la situation n’évolue pas", avait également averti le cabinet du ministre de l'Agriculture le 23 février.
"A minuit autour de pizzas, en catastrophe"
Selon l'Association nationale des industries alimentaires (Ania), les industriels devraient vendre leurs produits de l'ordre de 6% plus cher que l'an dernier pour répercuter l'inflation qu'ils subissent sur les matières premières agricoles, sur les emballages et sur l'énergie. "Raisonnablement pessimiste", son président Jean-Philippe André constate que ces négociations vont encore une fois se terminer pour beaucoup "à minuit autour de pizzas, en catastrophe" faute d'avoir pu se mettre d'accord plus tôt.
"Ça va être un petit peu dur en cette dernière journée", a résumé le médiateur des relations commerciales agricoles, Thierry Dahan, saisi de dizaines de dossiers d'entreprises ne parvenant pas à se mettre d'accord. Au final, les tractations devraient aboutir à une "hausse significative des prix autour de 3%", estime auprès de l'AFP le délégué général de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), Jacques Creyssel. "Comparé à zéro l'année dernière, c'est un changement très notable", ajoute le porte-parole des enseignes.