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Les parfums, les cigarettes ou les Toblerone détaxés ne font plus recette: les ventes dans les duty free des aéroports en chute libre de 13% depuis le Covid

Des bars, restaurants et boutiques duty free au terminal 3 de l'aéroport d'Orly, le 24 juin 2020 quelques jours avant sa réouverture

Des bars, restaurants et boutiques duty free au terminal 3 de l'aéroport d'Orly, le 24 juin 2020 quelques jours avant sa réouverture - STEPHANE DE SAKUTIN © 2019 AFP

Selon une étude du cabinet Kearney, seuls 5 à 10% des voyageurs effectuent des achats à l’aéroport dans les boutiques détaxées.

Il y a encore quelques années, c'était un passage obligé dans les aéroports. Les boutiques de duty free, avec leurs nombreux produits comme les parfums, les cigarettes et les chocolats vendus sans aucune taxe, faisaient le plein. Mais depuis la fin de la crise sanitaire du covid, les ventes s'effondrent.

Alors que le trafic aérien a retrouvé quasiment le niveau de 2019, "la crise Covid a brusquement interrompu une décennie de forte et régulière croissance (+9% par an) sur le marché du retail dans le secteur du voyage", peut-on lire dans une étude* du cabinet Kearney publiée à l'occasion du salon Tax Free World Association.

Concrètement, l'étude observe une dépense moyenne par voyageur qui a chuté de 29% en 2022 sur un an, soit 17 dollars par voyageur et s'est fixée à 15 dollars en 2024 contre 24 dollars en 2019. En valeur, les ventes mondiales ont atteint l'an passé à 74,1 milliards de dollars, en recul de 13% par rapport au pic prépandémique.

Par ailleurs, seulement 5 à 10% des voyageurs achètent dans une boutique duty free contre 40 à 60% dans les centres commerciaux classiques.

Prix jugés élevés et une expérience décevante

"Un phénomène qui dans n’importe quelle autre industrie devrait suffire à tirer le signal d’alarme", peut-on lire.

Les explications sont nombreuses avec en premier lieu les prix et l'offre. 64% des passagers se déclarent insatisfaits des prix (50%) ou de l’offre produits des boutiques duty free. La question du prix est prégnante car les consommateurs ont été frappés par deux phénomènes: l'inflation générale qui a entamé leur pouvoir d'achat et l'inflation spécifique qui a touché les billets d'avion.

Il y a donc des arbitrages qui ont été appliqués. Et qui touchent également le temps disponible: de plus en plus de passagers, notamment les plus jeunes, préfèrent consacrer le temps d'attente dans les aéroports à des usages numériques notamment.

Cette cible (générations Y et Z) qui représentent une part grandissante des voyageurs ont par ailleurs des attentes différentes en termes d'offres commerciales, souligne l'étude.

"Pour 77% de ces générations, l’expérience d’achat est ce qui prime avant tout pour un éventuel achat en duty free, loin devant la question du prix. Les acteurs du secteur doivent impérativement renouveler leur mode de fonctionnement s’ils veulent regagner l’attention des voyageurs et redonner collectivement aux aéroports l’attractivité de centre commerciaux attractifs pour l’ensemble des voyageurs", peut-on lire.

Plus d'expérience et de technologies

Comment? "En plus de prix avantageux et de promotions spéciales, les voyageurs veulent disposer d’une large gamme de produits, d'une interaction personnalisée, d'une expérience d'achat sur mesure et de services de première qualité", préconisent les auteurs.

Ainsi, selon l'enquête de Kearney, 37% des sondés achèteraient plus dans les aéroports si des produits exclusifs étaient proposés, 17% si la livraison était disponible. Globalement 32% citent l'expérience comme un facteur clé d'achat et 69% perçoivent leur temps d’attente en aéroport comme un moment propice au shopping s’il est bien valorisé .

"Les acteurs du retail ont tout intérêt à renforcer leur coopération grâce à de la data collaboration entre les aéroports, les distributeurs, les marques et les transporteurs et les partenaires numériques. Seule une réelle remise en question du mode fonctionnement actuel et une prise de conscience collective permettront au travel retail – notamment européen – de trouver un élan qui fasse sens pour les générations à venir", conseille l'étude.

*: Kearney a mené son étude approfondie auprès de 3.500 clients dans 10 pays, ainsi que des entretiens avec plus de 40 hauts dirigeants d'aéroports mondiaux, de compagnies aériennes, de la vente au détail dans les voyages et de marques.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business