En janvier les emballages jetables seront interdits dans les fast-foods (qui ne sont pas tout à fait prêts)

Plus de burger dans une boîte en carton ou de soda dans un gobelet en papier: dès le 1er janvier prochain, dans toute la restauration, la vaisselle jetable sera interdite pour le service à table. Dans les faits, c'est surtout la restauration rapide qui est contrainte de changer ses habitudes: de McDonald's à KFC en passant par Burger King ou Subway, toutes les grandes enseignes devront s'y plier.
Difficile à imaginer lorsque l'on y mange aujourd'hui: carton, papier et plastique s'accumulent encore sur les plateaux et dans les poubelles à quelques semaines de l'échéance.

Dans les fast-foods, la vaisselle sera désormais réutilisable: gobelets, couvercles, assiettes, couverts et autres contenants devront être collectés et lavés après avoir été servis aux clients qui consomment sur place, en vertu de la loi anti-gaspillage adoptée en janvier 2020. Seul le papier qui entoure le sandwich (et évite qu'il ne se délite lorsqu'on le mange) reste autorisé. Selon le ministère de la Transition écologique, la restauration rapide engendre chaque année 180.000 tonnes d'emballages immédiatement jetés après utilisation.
"Des enseignes ont bien anticipé l'interdiction, d'autres viennent de le découvrir ou feignent de le découvrir", confie le ministère, qui note un "attentisme" de certaines entreprises.
"Un changement d'habitude"
Pour ne pas perturber le consommateur, assiettes et gobelets seront siglés aux couleurs des enseignes, de la même manière que les contenants jetables. Le géant McDonald's avait testé sa vaisselle réutilisable dans une dizaine de restaurants l'année passée et l'a déjà déployée dans un grand nombre de restaurants. "Les investissements ont été supérieurs à 100 millions d’euros", précise l'enseigne. Le déploiement de la vaisselle réemployable est néanmoins difficile à mettre en oeuvre dans quelques restaurants, notamment en région parisienne, par manque de place.
Son grand concurrent Burger King assure, lui aussi, être prêt pour l'échéance du 1er janvier: certains de ses restaurants commencent à utiliser dès maintenant la nouvelle vaisselle réemployable, d'autres attendront le jour J, mais tous en seront équipés d'ici là, affirme l'entreprise.
Accroché à ses habitudes, le client risque peut-être de jeter tout son plateau à la poubelle en sortant de table. Burger King, qui a choisi des contenants en résine, avait équipée toute sa vaisselle de puces RFID dans un restaurant-test. L'objectif était d'estimer la proportion de contenants jetés à la poubelle ou qui disparaissaient au lieu de revenir en plonge. Le nombre "était assez élevé au début, puis il a diminué au fil du temps", rapporte Muriel Reyss, directrice communication et RSE de Burger King France.
"C'est un geste nouveau qui demande un changement d'habitude pour nos clients", souligne Muriel Reyss.
Big Fernand a voulu pousser le curseur un peu plus loin: la chaîne française de burgers a décidé de supprimer le papier autour des sandwichs au profit d'un dressage à l'assiette, comme dans un restaurant classique. "La différence entre restauration rapide et restauration traditionnelle va devenir de plus en plus floue", pronostique Maurizio Biondi, à la tête de l'enseigne. L'enseigne propose des burgers un peu plus chers que ses concurrents, autour de 17 ou 18 euros, et la présentation à l'assiette "change la qualité perçue par le consommateur", avance-t-il.

Pour un secteur qui s'est édifié sur la vaisselle jetable, c'est une lourde conversion. Dans beaucoup de restaurants, il a fallu pousser les murs pour installer les équipements nécessaires au lavage et au stockage des nouveaux contenants, adaptés aux gros volumes des enseignes de fast-food. Ce sont aussi des investissements importants pour acheter ces contenants et ces équipements, et du temps de travail supplémentaire pour les employés. À défaut de plonge, certains établissements pourront aussi recourir à des prestataires externes, comme le fait l'hôtellerie avec le linge.
Cantines, cafés, cafétérias
L'application de la mesure n'est pas forcément évidente. Domino's Pizza, concentrée sur la livraison, compte quelques restaurants où les pizzas peuvent être mangées sur place. L'entreprise planche actuellement sur une alternative à l'assiette, mais "nous ne pourrons pas la déployer" dans les prochains mois, explique Joël Tissier, président de Domino's Pizza France. Le dirigeant insiste plutôt sur le travail de l'entreprise autour du suremballage dans la chaîne logistique, la "partie immergée de l'iceberg" dans la livraison de pizza.
À Starbucks, on affirme être sur les rangs pour le 1er janvier, en proposant déjà de servir sur place les boissons dans des tasses en céramique. Car les burgers et les pizzas ne sont pas les seuls concernés: on compte aussi les chaînes de cafés, les cantines, les cafétérias des musées et des supermarchés ou encore les chaînes de sandwich, soient tous les lieux de restauration de plus de vingt places assises. Les petits établissements évitent l'interdiction, difficilement applicable pour une bonne partie d'entre eux. Le petit kebab du coin, par exemple, passera entre les gouttes.
"Durant la première année de rodage, nous allons privilégier une approche pédagogique. Les sanctions concerneront ceux de mauvaise volonté", note le ministère de la Transition écologique.
Contrôles et sanctions
Dès l'année prochaine, des inspecteurs des Directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) et de la DGCCRF mèneront des contrôles. En cas de non-respect de l'interdiction, le ministère évoque des amendes de cinquième classe et des astreintes journalières pour les restaurants les plus récalcitrants. Il espère toutefois éviter de telles mesures, misant plutôt sur la mauvaise publicité que risque l'entreprise retardataire, d'autant plus que ses concurrentes ne se priveront pas de le faire savoir.
Qui sera vraiment prêt? Réponse en janvier prochain. Le ministère, en tout cas, ferme la porte à un éventuel report de l'entrée en vigueur de la mesure.