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"Des cafards partout": appartements sales et factures salées, quand les vacances tournent au cauchemar

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Depuis plusieurs jours les témoignages affluent sur les réseaux sociaux de touristes déçus de leurs locations de vacances et des échanges avec Airbnb. Accusés d'avoir dégradé une location de vacances, ou demandes de relogement refusées, ils racontent à BFM Business leurs vacances "amères et stressantes".

C’est un premier tweet qui déclenche une véritable avalanche de témoignages de clients mécontents: Ewen, un étudiant de 21 ans, témoigne sur le réseau social de sa mésaventure avec la propriétaire d'un Airbnb de Marseille. Elle lui réclame 290 euros à cause d'une tache de gel douche dans un tiroir. L'hôte justifie la facture: 140 euros pour acheter un nouveau meuble et 150 euros pour les frais d'installation.

Une réclamation "totalement ubuesque" selon le Breton qui s'exprime auprès de l'AFP. Un feuilleton de l’été qui passionne les internautes, qui se terminera en faveur du locataire: Airbnb ne lui réclamera rien, après examen de la situation.

Une histoire isolée? Pas vraiment à en croire le nombre de clients qui témoigneront à la suite d'Ewen de leurs propres mésaventures.

Déception

Si les clients sont de plus en plus nombreux à se tourner vers Airbnb pour leurs vacances, c’est aussi parce que la plateforme assure une certaine sécurité: en cas d’arnaque, de logement non-conforme etc., elle garantit au locataire une nouvelle solution d’hébergement. Et pour les propriétaires, c’est normalement l’assurance également d’être payé et dédommagé en cas de dégradations. Mais quand un problème arrive, que se passe-t-il vraiment?

En ce mois d'août, Camille en a fait les frais. La jeune femme de 26 ans qui habite en région parisienne prend la route du Havre avec deux amis: ils souhaitent passer quatre nuits dans la ville portuaire et, pour se loger, ils ont opté pour un petit appartement qu’ils louent un peu moins de 500 euros. À l’arrivée, c’est la déception. "Le ménage n’avait pas été fait", explique Camille à BFM Business. En témoigne, des traces de moisi dans le frigo, des taches sur la cuvette des toilettes… Le groupe décide de ne pas laisser cette situation gâcher les vacances et, muni de lingettes, fait le ménage.

Le frigo dans le Airbnb loué par Camille
Le frigo dans le Airbnb loué par Camille © Autre

Mais à 21h30, Camille décide de contacter Airbnb: un homme hurle dans les couloirs de l’immeuble et ils viennent de découvrir… des cafards dans l’appartement.

Un cafard  dans le Airbnb loué par Camille
Un cafard dans le Airbnb loué par Camille © Autres
"Il y en avait dans tout l’immeuble", raconte Camille, dépitée.

Bruit, saleté, nuisibles… C’en est trop, ils veulent être relogés. Commence alors pour Camille un véritable marathon avec Airbnb, entre échanges téléphoniques et messages écrits.

"Il faut répéter la même chose plusieurs fois, car on n'a jamais la même personne au téléphone. Ils ne nous disent pas la même chose sur les dédommagements, le relogement. C’était une bataille", relate-t-elle.

Le groupe passera une nuit "compliquée" dans l’appartement, mais ne souhaite pas rester une seconde nuit dedans. Ils passeront la journée au téléphone avec Airbnb. Finalement, sans véritable solution, ils prendront la route le soir même pour un retour… à Paris.

"C’est une expérience assez amère. C’était très fatigant", soupire-t-elle.

"Finalement, on aura un interlocuteur à 22h15 au téléphone, et on obtiendra le remboursement des nuits que l’on n’a pas passées dans l’appartement et un petit dédommagement qui compense les frais. Mais il a fallu négocier, en anglais, depuis une aire d’autoroute, car nous étions déjà sur la route du retour. C’est vraiment stressant", poursuit-elle.

Résultat des courses pour le trio: un mauvais commentaire sur le profil Airbnb de Camille, car l’hôte n’était pas content de les voir partir et rejetait leurs critiques, une grosse journée de stress et la déception de mettre fin prématurément à ses vacances. Pour les prochaines weekends, Camille se tournera "plutôt vers un hôtel ou un camping", conclue-t-elle.

Une facture de 2.570 euros

En mai dernier, Emma 25 ans a, elle aussi, vécu une expérience qui "ne lui donne plus envie de louer des maisons". La jeune fille le dit, "j’ai toujours été très dubitative sur la location sur Airbnb, j’avais eu de mauvais échos. Alors quand je pars en vacances avec mon copain, je préfère l’hôtel".

Mais là, il s’agissait de passer le weekend à cinq et le côté "plus convivial" de la maison a fini de convaincre la jeune femme de louer cette villa avec piscine en Corse. Jointe par téléphone par BFM Business, elle nous raconte comment les deux jours de vacances vont se transformer en un mois de bataille avec Airbnb et l’hôte de la maison. Une expérience "terrifiante", selon ses mots.

À l’arrivée, pas d’état des lieux de la part de la mère de la propriétaire qui les reçoit. "On est déjà étonnés, car on découvre que cette personne habite sous la maison, tout proche de nous. L’annonce ne le précisait pas. Et puis au cours de notre séjour, elle va entrer trois fois dans notre logement", souligne la jeune femme. Une pratique totalement interdite par Airbnb.

Le séjour se déroule sans autre encombre. À la sortie, le groupe indiquera à la femme avoir cassé un verre. Le problème sera réglé par une transaction de la main à la main de 3 euros.

"Elle nous a félicité en nous disant que nous n’avions vraiment pas faire de bruit."

L’échange se termine, les clefs rendues, le groupe reprend la route. Quelques heures plus tard ils sont notifiés via Airbnb de l'ouverture d'un litige. "L'hôte nous accuse d’avoir taché la terrasse en bois, abimé le crépis de la maison, cassé plusieurs verres, rayé la table… la liste est longue, et nous aurions pris la fuite à la sortie pour ne pas faire d’état des lieux". Avec cet inventaire, une demande de dédommagement salé de 2.570 euros.

"Je ne gagne pas ça en un mois, c’était l’incompréhension et le stress", témoigne Emma.

Elle contacte Airbnb et essaye de défendre son cas. "Il y avait vraiment un double discours entre nos échanges avec la personne sur place et ce qui était envoyé à Airbnb", observe la jeune femme. Après un mois d’échange "avec plusieurs interlocuteurs, jamais le même, qui n’étaient jamais au courant du dossier", soupire-t-elle, Airbnb clôture le dossier et les cinq jeunes n’auront rien à verser. Ce qui les sauvera? Une simple vidéo.

"Quand je suis arrivée, j’avais filmé pour mes amis qui étaient encore sur la route, pour leur montrer la maison." Et Airbnb le constatera comme eux: les taches sur la terrasse? Déjà là, tout comme le crépis arraché, que l'on voit d'ailleurs sur les photos de l'annonce en ligne… Des preuves matérielles qui permettent à la plateforme de trancher en leur faveur.

"Même les gens les plus accueillants peuvent se retourner contre nous"

Prendre des vidéos, la seule solution? C’est en tout cas l’avis de Nawal, cette jeune mère de famille a vécu une expérience désagréable en 2022, mais continue de louer sur la plateforme. "Je ne fais plus jamais confiance aux hôtes. Malheureusement, même les gens les plus accueillants peuvent se retourner contre nous. Il faut que les gens prennent des photos, des vidéos… Moi, maintenant quand j’arrive dans un Airbnb, et je le dis au propriétaire, je prends tout en photo."

C'est l'été et elle décide d’aller passer une semaine à Perpignan en compagnie de sa mère et de ses deux enfants. "Nous avons été très respectueux de l’appartement. Ma mère est une personne très maniaque, alors je peux vous assurer que quand nous sommes partis tout était nickel. Nous avions fait un ménage complet, même les draps avaient été lavés", se remémore-t-elle. À la fin du séjour, l’hôte, absente, leur indique qu’ils peuvent partir et laisser la clef dans la boite aux lettres.

"On prend la route, je lui laisse un super avis sur la plateforme… je l’ai regretté", se désole Nawal. Car si pendant quelques jours, elle n'a aucun message de l’hôte -"j’avais même oublié cet appartement", rigole-t-elle, c'est près de sept jours plus tard qu'elle reçoit une demande de réclamation directement depuis la plateforme.

On lui reproche des rayures "très profondes" dans le parquet, et d’avoir abîmé "un totem décoratif". Facture: 554 euros. Une grosse somme pour des rayures "minimes sur les photos, et elle nous demandait de rembourser le totem à une valeur plus haute que la valeur d’achat!", s’étrangle Nawal.

"On n’a pas rayé ce parquet et on n’a même pas touché ce totem", se justifie la jeune femme.

Nawal répond donc à la plateforme qu’elle ne paiera "jamais le moindre centime" et, pour appuyer son propos, elle a des preuves. "Je prends systématiquement des photos et des vidéos à l’entrée dans le logement. Franchement, ça m’a énervée, mais ça ne m’a pas stressée, j’en ai même rigolé tellement c’était gros. Elle se réveille une semaine après, alors qu’elle a loué le logement entretemps…"

Un compte "sous surveillance"

Elle envoie donc toutes ces preuves à Airbnb. Le parquet n’était pas franchement neuf à leur arrivée et les photos le montrent. "Airbnb a fait un bon travail dans mon cas, ils m’ont tenu au courant et au bout d’une semaine le dossier était clos.'

Elle écopera juste d’un très mauvais commentaire de la part de la propriétaire sur son profil. Un avis négatif qui ne l’empêche pas de louer à nouveau sur la plateforme: "J’ai plein d’autres commentaires positifs. Je continue de louer sans problème, mais je suis très sélective et je fais très attention aux avis, à la qualité des échanges avec l’hôte… et je photographie et filme tout à l’arrivée et au départ!".

Pour Airbnb, contacter par l'AFP, ces problèmes sont "rares". Mais la plateforme de location a rouvert une enquête sur la propriétaire de la maison corse louée par Emma et ses amis. "Ils m'ont contactée mercredi pour me le dire, sûrement suite à mon tweet, car je n'avais pas eu de leur nouvelle depuis juin, où il m'indiquait avoir mis mon compte Airbnb 'sous surveillance'", relate la jeune femme.

"Bien que nous ne demandions pas aux voyageurs d'effectuer un inventaire complet à leur arrivée, nous leur recommandons d'informer l'hôte de tout dommage à leur arrivée afin qu'il puisse en prendre connaissance", rappelle Airbnb dans une note transmise à l'AFP vendredi.

https://twitter.com/AnneKatell Anne-Katell Mousset Rédactrice en chef adjointe BFM Éco