Dans quelles régions les consommateurs sont-ils les plus fidèles à leurs marques locales?

Le village de Kaysersberg, en Alsace (photo d'illustration). - Pixabay
Indétrônable dans les supermarchés, l'Alsace garde sa couronne, suivie par son éternelle rivale, la Bretagne. Selon des données du panéliste Circana obtenues par BFM Business, les Alsaciens restent les plus grands acheteurs de marques locales* en France métropolitaine, devant les Bretons.
Les deux départements alsaciens occupent la première place du classement national, resserré sur le territoire métropolitain à l'exclusion de la Corse. Dans le Bas-Rhin et le Haut-Rhin, les marques locales y représentent respectivement 9% et 7,9% du chiffre d'affaires des achats alimentaires de produits de grande consommation (PGC) et de produits frais en libre-service (FLS) en hypermarché et supermarché sur une période de douze mois arrêtée au 24 novembre 2024.
Trois départements bretons suivent, à une distance raisonnable, leurs homologues alsaciens: le Finistère (7,3%), les Côtes-d'Armor (6,4%) et le Morbihan (6,1%). La Savoie, le Pays basque et une bonne partie de la Franche-Comté complètent le top 10 du palmarès hexagonal avec le Jura (5,4%), les Pyrénées-Atlantiques (5,3%), la Haute-Savoie (5,2%), le Doubs (5,1%) et la Savoie (4,7%).
Sans surprise, l'Île-de-France stagne au bas du tableau. L'agglomération parisienne monopolise les dernières places, avec une part de marché souvent inférieure à 1% pour les marques locales. De manière générale, ces dernières émergent difficilement dans l'ensemble du Bassin parisien, tel que dans l'Oise (0,7%), l'Eure (0,9%), la Seine-Maritime (1,1%), le Loiret (1,2%) ou encore l'Aube (1,2%) et l'Eure-et-Loir (1,3%).
2,7% au niveau national
Sur l'ensemble de l'Hexagone, les marques locales représentent 2,7% du chiffre d'affaires des produits alimentaires en grande distribution, un chiffre inchangé d'une année à l'autre en dépit de l'appétence déclarée des consommateurs français pour ces références régionales. Elles perdent même 0,1 point de part de marché sur trois ans. Au niveau départemental, les variations sont moindres ou nulles sur les dernières années, voire traduisent "une perte de position" pour ces marques locales, note Emily Mayer, spécialiste de la consommation chez Circana.
"Même si les Français déclarent vouloir davantage de marques locales, qu'ils se déclarent enclins à payer plus cher pour elles, cela reste difficile concrètement de le faire", explique Emily Mayer.
La crise sanitaire, et surtout la crise inflationniste, est passée par là. Les marques locales, généralement plus chères que les autres marques présentes dans les rayons, ont pu faire les frais des arbitrages des consommateurs – d'autant plus que la consommation demeure encore morose en France. En outre, sans être cachée, l'offre "n'a pas été poussée dans les rayons" des magasins, ajoute-t-elle, les distributeurs ayant préféré donner davantage de visibilité aux premiers prix.
Pas assez de prospectus
Les prospectus publicitaires, scrutés par les budgets serrés, ont également un rôle à jouer. Les marques locales "y restent assez peu visibles", précise Emily Mayer. Ces dernières ne réalisent aujourd'hui que 2,1% de leur chiffre d'affaires en prospectus, contre 1,7% si l'on remonte trois années en arrière. Dans le Bas-Rhin, leur champion, elles ne grimpent qu'à 3,3% à l'heure actuelle.
Pour autant, si elles s'étiolent, les marques locales ne se sont pas effondrées avec l'inflation, signe que les Français y sont attachés. "Elles ne percent pas, mais elles tiennent bon la barre", nuance-t-elle, y discernant un "potentiel de croissance" pour les prochaines années. Le retour de la déflation pourrait peut-être leur dégager l'horizon.
Pourquoi les marques locales sont-elles plus fortes dans certaines régions?
À première vue, la forte identité culturelle et culinaire semble la justification la plus évidente du succès des marques locales en Alsace, en Franche-Comté ou en Bretagne. À elle seule, elle n'est toutefois pas suffisante.
Outre l'importance du secteur agricole, un système productif dense et structuré, appuyé sur des PME de taille suffisante pour rayonner dans toute la région voire au-delà, est nécessaire pour permettre l'existence et la distribution des marques locales dans un grand nombre de catégories, des pâtes aux biscuits en passant par les confitures, les yaourts et les condiments.
*Marque qui réalise plus de 50% de son chiffre d'affaires dans une seule région, sur la base des 22 régions administratives existantes en France métropolitaine avant la réforme de 2015