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Concerts: la fréquentation n'a pas encore renoué avec ses niveaux d'avant-crise

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Les facteurs expliquant cette désaffection sont nombreux, pour autant, certains artistes ou styles musicaux tirent leur épingle du jeu, comme la musique électronique.

Très friands de concerts, les Français sont-ils retournés dans les salles depuis juillet dernier, au moment où les concerts debout ont de nouveau été autorisés?

Le bilan est encore en demi-teinte. "À voir les Français prendre d’assaut les terrasses dès qu’elles furent autorisées, on pouvait s’imaginer que les salles de concert connaîtraient un engouement similaire lorsqu’elles rouvriraient leurs portes, après quasiment un an et quatre mois de fermeture. Une vision qui s’est heurtée à une réalité plus mitigée", explique dans une note publiée sur le site de la Sacem (la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), Gérome Darmendrail, journaliste spécialisé dans la musique.

Ainsi, selon l’institut Harris Interactive, 73% des personnes ayant l’habitude de se rendre à un concert au moins une fois par an n’y étaient pas retournées durant l’été. Et cette tendance a perduré pendant l'automne.

"Fréquentation frileuse"

"Il y avait évidemment des gens qui étaient impatients que ça reprenne, ce qui a amené une jolie ferveur sur les premiers concerts mais au final, on n’a pas encore retrouvé le public d’avant les confinements", commente dans cette note Thierry Langlois, patron d'Uni-T, une société de production de concerts. Un constat partagé par Hyacinthe Chataigné, coordinateur de l’observation et des études à la Fedelima, la Fédération des lieux de musiques actuelles (133 salles en France) qui évoque "une fréquentation frileuse".

Sur BFM Business, Angelo Gopee, directeur général de Live Nation France, explique en effet que "les Français boudent les concerts, les gens n'y retournent pas, il faut qu'on encourage les gens à revenir dans les salles".

Les facteurs expliquant cette désaffection sont nombreux. On peut évoquer la peur de la contamination dans un endroit clos où la promiscuité est forte, le prix des places dans un contexte d'inflation, l'absence de pass sanitaire chez les plus jeunes, les différentes restrictions mises en place et changeantes...

Les tourneurs observent ainsi une baisse des achats à l'avance de billets au profit des achats de dernière minute, ce qui illustre un vrai changement de comportement pour le public français.

Cette situation est d'autant plus décevante que l'offre a été cette année été très intense avec beaucoup de concerts programmés en 2020 qui ont été repoussés à cette année. Le secteur a même évoqué un "embouteillage de concerts".

Un modèle économique fragilisé

Autre nouvel écueil subi par les salles de concert, l'essor du phénomène du "no-show". Traduction: il s'agit de spectateurs ayant acheté des places il y a longtemps pour un concert annulé et reporté une ou plusieurs fois et pour lequel ils ne se sont finalement pas présentés. Cela peut représenter jusqu'à 20% des places d'un concert.

Si ce phénomène n'a pas de conséquence sur le chiffre d'affaires de la billeterie puisque les places ont été payées, il en a sur les revenus des bars exploités dans les salles.

Enfin, le modèle économique des salles est également bousculé par la flambée des cachets exigés par les artistes qui entendent ratrapper le manque à gagner de 2020.

Pour autant, cette situation n'est pas homogène. Les professionnels interrogés soulignent que les têtes d'affiche n'ont pas de mal à remplir les salles, notamment dans les grandes villes et ce, malgré des prix élevés. Pour les jeunes artistes, c'est au contraire beaucoup plus compliqué.

Incertitudes pour 2022

Même chose pour les styles musicaux. Si les événements de musique électronique font le plein essentiellement auprès des 18-25 ans, les concerts plus traditionnels (pop, chanson française, folk) qui visent un public plus adulte ont plus de mal.

Le secteur s'interroge désormais sur 2022. D'un côté, l'offre devrait rester très attractive avec des tournées de grandes têtes d'affiche. Angelo Gopee de Live Nation souligne ainsi sur notre antenne "avoir vendu 320.000 billets en 3 jours" pour le prochain concert de Coldplay.

De l'autre, la détérioration de la situation sanitaire avec le variant Omicron inquiète. Tout comme la décision du gouvernement de réintroduire le port du masque dans les lieux publics clos pour les spectateurs vaccinés.

Le secteur demande ainsi au gouvernement de maintenir les aides spécifiques au moins jusqu'au deuxième semestre 2022. Car certains ne misent pas sur un retour à la normale avant 2023.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business