Comment la Birkenstock a gommé son image ringarde pour devenir une sandale iconique

Le premier modèle de Birkenstock est sorti en 1963 mais ce n'est que récemment que la sandale orthopédique est devenue un véritable "must-have".

Longtemps moquée en France pour son côté ringard, la Birkenstock a gagné ses lettres de noblesse. La très germanique sandale à simple ou doubles brides s'affiche désormais aux pieds des Français les plus branchés. Même Bernard Arnault a cédé à la mode des "Birk". Son fabricant allemand a vendu l'année dernière une majorité de ses parts au fond d'investissement franco-américain L Catterton, cofondé par le groupe LVMH, et à la holding familiale Financière Agache, société d’investissement privée de Bernard Arnault.

Dans le milieu de la mode, il n'est pas rare que le ringard devienne un "must-have", et inversement, jurisprudence Crocs oblige. Mais ce n'est que récemment que les Français se sont appropriés la Birkenstock et qu'ils la portent comme n'importe quelle autre chaussure. Réputée robuste et durable, cette sandale s'est imposée comme un véritable accessoire de mode.

La marque elle-même remonte à 1774, date à laquelle on retrouve dans des registres officiels le nom de Johann Adam Birkenstock, cordonnier à Langen-Bergheim. Il faudra cependant attendre un siècle avant que l'entreprise familale prenne son envol. En 1896, le maître cordonnier Konrad Birkenstock met au point la première semelle orthopédique flexible et six ans plus tard, il dessine et confectionne le célèbre arc bombé, qui épouse la voûte plantaire.

Un demi-siècle plus tard, en 1963, son petit-fils, Karl Birkenstock a l’idée de confectionner une chaussure autour de cette semelle devenue une référence dans le milieu orthopédique. Il lance alors le modèle Madrid, la Birkenstock à simple bride encore vendu aujourd’hui.

Symbole de la contre-culture

Trois ans après, une Américaine appelée Margot Fraser, décide d'importer la sandale aux Etats-Unis. Le succès est fulgurant. La "Birk" devient le symbole de la contre-culture et s'affiche aux pieds des hippies. Un côté "peace and love" qui ne l'empêche pas de conquérir le grand public.

Ses atouts? Le monde médical se met à en porter au quotidien, achevant de parfaire sa réputation de chaussure orthopédique. La Birkenstock commence alors à atteindre d'autres tranches de la population, particulièrement en Allemagne. En Europe et dans le monde, la sandale devient alors le symbole du touriste allemand. Une source de moqueries.

Dans les années 90, tout bascule. Les créateurs Jean-Paul Gaultier et Paco Rabanne font défiler leurs mannequins en Birkenstock. La vision de cette sandale ringarde sur les podiums fait vasciller les certitudes du milieu de la mode et les "fashion victim" se mettent à l'adopter.

En 2002, Birkenstock crée une collection en collaboration avec la mannequin star de l'époque, Heidi Klum. Des stars sont "paparazziées" en Birkenstock, ce qui achève de séduire les derniers réticents qui se mettent à réviser leur conception de l'esthétisme. La "Birk" devient cool.

Collaborations avec des marques de luxe

Dans les années 2010, les descendants de la famille Birkenstock laissent la main à Olivier Reichert et à Markus Bensberg. Le duo repense la chaîne de production et la décentralise pour mieux coller aux spécificités de chaque marché. Les délais de livraison passent alors de deux semaines à deux jours et la capacité de production sextuple en dix ans. Birkenstock est désormais présent dans 90 pays.

Ils multiplient aussi les collaborations avec de grands noms du luxe. En 2019, l'actrice américaine Frances McDormand troque ses talons contre une paire de "Birk" pour fouler la scène des Oscars. Un modèle jaune citron signé Valentino. Cet été, l'entreprise allemande désormais dans le giron de LVMH a collaboré avec Dior et lance plusieurs modèles dont les prix avoisinent les 1000 euros, quand les modèles classiques sont vendus entre 50 et 140 euros.

Depuis 2014, les ventes des sandales à semelle en liège ont bondi de 150 %, et en 2018, il s'était vendu 27 millions de Birkenstock dans le monde. Il n'y a qu'à baisser les yeux dans la rue pour deviner que ce chiffre a depuis été largement dépassé.

https://twitter.com/Pauline_Dum Pauline Dumonteil Journaliste BFM Tech