"C'est la fin de la crise inflationniste": les grandes marques et les produits bio garnissent à nouveau les chariots des Français

Un chariot rempli de légumes dans les rayons d'un hypermarché Casino Hyperfrais, à Villefranche-sur-Saône, dans le centre de la France, le 28 avril 2023. (Photo d'illustration) - JEFF PACHOUD / AFP
Après trois années marquées par l’inflation, le paysage de la grande consommation commence à changer de visage. Longtemps dominantes dans les rayons, les marques de distributeurs (MDD), prisées pour leurs prix plus accessibles, enregistrent leur plus fort recul depuis un an le mois dernier, avec une baisse de 0,3 point de part de marché, selon une étude de Circana pour LSA.
Une évolution notable, alors que les MDD représentaient encore 35,8% des ventes de produits de grande consommation (PGC) en 2024, toutes enseignes confondues. Après plus de trois ans de supériorité pour les MDD, le vent tourne.
Une hausse des prix qui dessert
Les MDD perdent du terrain et l'inflation n'y est pas étrangère. 60 millions de consommateur dévoile des chiffres sans appel : entre décembre 2021 et décembre 2024, les prix des MDD avaient explosé de 20% dans l'alimentaire, contre 15% pour les grandes marques. Cette différence de rythme a grignoté leur avantage. Les MDD restent moins chères, certes, mais cette hausse des prix les rend moins attractives, poussant les consommateurs à reconsidérer leur choix face à des alternatives souvent plus stables.
Parallèlement, les grandes marques nationales reprennent des couleurs. D’après les données de Circana, leurs ventes ont progressé de +1,6% en valeur et +1,8% en volume entre le 14 février et le 23 mars 2025. Une tendance qui semble s’installer : en mars, les grandes marques ont enregistré une croissance de +0,3%, grignotant peu à peu des parts de marché à leurs concurrentes MDD, que ce soit dans les magasins de proximité ou sur les sites e-commerce des grandes surfaces.
Une désaffection des marques de distributeurs qui peut aussi s'expliquer par la mauvaise presse de certains produits. En février dernier, une étude de 60 millions de consommateurs pointaient les mauvais nutri-scores de nombreux produits et le recours à des additifs moins coûteux.
Le bio reprend des couleurs
Le bio, lui aussi, semble sortir la tête de l’eau. Après plusieurs années de désaffection — jugé trop cher, concurrencé par les produits locaux ou perçu comme perdant ses valeurs —, le marché bio affiche des signes de reprise. Biocoop annonce une hausse de 8% de son chiffre d’affaires et une fréquentation en hausse de 8% de ses magasins.
Et la tendance semble s'étendre au-delà d’une seule enseigne : selon l’Agence Bio, la consommation de produits bio repart à la hausse sur les deux premiers mois de l’année 2025, notamment dans les circuits spécialisés et en vente directe.
Une reprise du marché bio qui se voit dans les rayons avec des produits désormais plus abordables. Pour cause, certaines grandes enseignes spécialisées ont annoncé baisser leurs prix. Biocoop a lancé une opération massive de baisse de prix sur 400 produits du quotidien. De son côté, La Vie Claire a décliné une offre anti-inflation en mars 2025 sur 446 références.
"La fin de l’inflation"
Les grandes marques qui progressent, du bio qui sort la tête de l'eau... Pour Emily Mayer, directrice Business Insight chez Circana, ce regain marque un tournant : "C’est un facteur marquant de la fin de l’inflation."
Selon elle, les Français retrouvent leurs habitudes de consommation. Comme l’explique l’analyste : "Historiquement, la France est un pays où l’on consomme majoritairement des grandes marques." Et le retour à cette normalité devrait s'accélérer: selon Emily Mayer, "le rapport de force se resserre assez fortement". Portées par une image de fiabilité et une promesse de qualité plus constante, les marques nationales séduisent à nouveau, dans un contexte où les arbitrages prix ne sont plus aussi radicaux qu’en pleine crise inflationniste.
Face à ce recul, les MDD n’ont d’autre choix que de revoir leur image de marque : impossible désormais de se contenter du seul argument prix.
"Elles vont devoir capitaliser sur d’autres discours pour regagner du terrain", prévient-elle, qu’il s’agisse de transparence, d’une meilleure composition, ou d’engagements environnementaux plus clairs.