"C'est du Kafka": pourquoi le chocolat compte au moins 10 taux de TVA différents

À quel taux de TVA est taxé le chocolat que nous mettons dans nos chariots de courses? C'est avec cette question en apparence simple mais en pratique très complexe que Dominique Schelcher, PDG de Coopérative U, a souhaité illustrer la très grande complexité bureaucratique qui régit les relations commerciales.
"Après Le Château et Le Procès, Kafka aurait pu écrire "Le Chocolat" qui compte pas moins de 10 catégories fiscales pour son taux de TVA", a ironisé ce mercredi le distributeur devant la Commission des affaires économiques du Sénat.
Autrefois considéré comme un produit de luxe, le chocolat se voyait appliquer le taux de TVA normal qui est aujourd'hui de 20%. Mais l'article 278-0 du code général des impôts dresse une liste de produits de première nécessité dont le chocolat fait partie. Mais attention pas tous les chocolats.
"Le chocolat noir est considéré comme un produit de première nécessité, donc il est soumis au taux de 5,5%, explique Dominique Schelcher. Sauf s'il est fourré, là on repasse à 20% comme le chocolat au lait ou blanc. Sauf s'il s'agit d'un chocolat au lait destiné à être fondu en pâtisserie, là on repasse à 5,5%."
Mais ce n'est pas tout. Les formats de chocolat qui ont la taille d'une bouchée (soit précisément moins de 20 grammes et de 5 centimètres) bénéficient du taux réduit qu'il soient noirs, fourrés, au lait ou blancs. Mais attention, encore faut-il que, dans ce bonbon, le chocolat ne représente pas moins de 25% du poids total du produit. Sinon retour au taux de 20%.
Quid des pâtes à tartiner? Les amateurs de Nutella ne paient que 5,5% de TVA. Il s'agirait donc d'un produit de première nécessité.
L'affaire se complique
Mais l'affaire se complique pour certains produits. Que faire avec une friandise composée de différents types de chocolat? Un oeuf ou une poule de Pâques par exemple avec son corps en chocolat noir, sa tête au chocolat blanc, ses oeufs fourrés de la taille d'une bouchée… Le code des impôts fait simple: le taux appliqué est de 20%. À moins bien sûr que le vendeur souhaite ventiler les taux de TVA selon la proportion de chacun des types de chocolat qui composent sa poule de Pâques (c'est autorisé).
Et les produits à base de chocolat? Là c'est aléatoire. Les crèmes dessert? 20%. Les pains au chocolat c'est 5,5%. Sauf si vous le dégustez sur place, auquel cas on passe à 10%. Son prix reste identique mais le boulanger devra payer plus de taxe.
Évidemment, il y a des exceptions à ces exceptions. C'est le cas des orangettes par exemple. Ces friandises à l'orange confite enrobées de chocolat sont considérées comme des bonbons, donc soumises à un taux réduit de 5,5%. Mais certaines font plus de 5 centimètres de long et ont donc besoin de deux bouchées pour être avalées. Logiquement le taux normal devrait s'appliquer. Mais le législateur n'a pas voulu trop compliquer la comptabilité des chocolatiers et c'est le taux réduit qui s'applique.
"On marche sur la tête et on ne sait plus comment le dire, on subit", conclut Dominique Schelcher.
