Centrale nucléaire de Fessenheim: la Cour des comptes met en garde contre le coût de sa fermeture

La centrale de Fessenheim - Sébastien Bozon- AFP
La Cour des comptes a mis en garde mercredi contre le coût pour l'Etat de la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, demandant plus généralement que les charges pour démantèlement soient mieux évaluées et provisionnées.
"La fermeture de la centrale de Fessenheim, caractérisée par un processus de décision chaotique, risque d'être coûteuse pour l'État", écrit-elle dans un rapport demandé par la commission des finances du Sénat.
Le réacteur n°1 de la centrale alsacienne a été mis à l'arrêt le 22 février et le second doit l'être le 30 juin, dans le cadre de la politique de réduction de la part du nucléaire dans la production électrique française. EDF recevra 370 millions d'euros de l'État pour la fermeture anticipée de la centrale, auxquels s'ajoutent des sommes variables représentant son manque à gagner, dans le cadre du protocole d'indemnisation signé l'an dernier.
"Ce protocole présente sur de nombreux points des risques de divergence d'appréciation et donc un risque financier pour l'État", et ses dispositions sont "favorables à l'entreprise", critiquent les magistrats.
Ils recommandent la signature d'un avenant pour limiter les risques pour les finances publiques ainsi qu'un paiement dès cette année de l'indemnité initiale, plutôt qu'en différé, ce qui pourrait permettre d'économiser plusieurs dizaines de millions d'euros.
Des dépenses "inéluctables" pas prises en compte
La Cour prône au passage une programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), la feuille de route énergétique de la France, sur 15 ans et non 10 ans, afin de mieux anticiper les évolutions futures. Le rapport étudie plus généralement le coût du démantèlement des 56 autres réacteurs nucléaires d'EDF ou encore des installations d'Orano et du CEA. Les entreprises ont aujourd'hui l'obligation de provisionner les charges futures correspondant aux démantèlements.
"L'évaluation des charges de démantèlement produite par les exploitants peut encore gagner en exhaustivité et en prudence", écrit la Cour des comptes. Elle réclame "une meilleure prise en compte des incertitudes et des aléas attachés aux estimations de coûts prévisionnels". Le montant total des charges futures de démantèlement s'élevait à 46,4 milliards d'euros fin 2018, selon la Cour des comptes.
Mais certaines dépenses pourtant jugées "inéluctables" ne sont pas prises en compte dans les dépenses d'EDF et Orano: en les intégrant, ces deux entreprises augmenteraient leurs provisions respectivement de 7 et 1 milliards d'euros, indiquent les magistrats. En outre, le provisionnement "ne repose pas toujours sur les calendriers de démantèlement les plus réalistes".