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A la grand-messe de Jackson Hole, les banques centrales visent un resserrement crédible

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Face à l'inflation, la FED comme la BCE relèvent les taux. La hausse des prix devrait être sur toutes les lèvres pour la réunion annuelle outre-Atlantique.

Relever les taux contre l'inflation, mais pas trop pour éviter de mettre l'économie à genoux: ce dilemme, auquel font face les banquiers centraux, devrait être au coeur de leur grand-messe annuelle, jeudi et vendredi dans l'ouest américain, à Jackson Hole.

Les majestueuses montagnes du Grand Teton (Wyoming) accueilleront le président de la Banque centrale américaine (Fed), Jerome Powell, vendredi midi. La présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, ne fera en revanche pas le voyage aux Etats-Unis pour la traditionnelle réunion.

Mais Isabel Schnabel, membre allemande du directoire de la BCE, s'y rendra, et participera à un panel le samedi. Andrew Bailey, le gouverneur de la Banque d'Angleterre (BoE), a lui confirmé qu'il serait présent à Jackson Hole, mais uniquement pour observer les discussions, sans y participer.

"Les cartes sont sur la table au niveau économique: un ennemi commun qui est l'inflation, un risque de trop faire ralentir l'économie. Il faut choisir entre les deux", explique Gregori Volokhine, gérant de portefeuille pour Meeschaert Financial Services. "La Fed ne peut pas dire qu'elle doit choisir d'augmenter le chômage pour faire baisser l'inflation, mais c'est le choix qui s'offre à elle."

L'inflation baisse enfin aux Etats-Unis

Les banquiers centraux resserrent leurs politiques monétaires pour lutter contre l'inflation. Seule exception la banque centrale chinoise, où l'inflation demeure sous les 3%, qui procède à des baisses de taux. La FED a déjà relevé ses taux à quatre reprises depuis mars, et la BCE a mis un terme à onze ans de taux contenus en relevant ses taux cet été.

D'abord de l'habituel quart de point de pourcentage, avant d'accélérer le rythme. Une nouvelle forte hausse est sur la table pour sa prochaine réunion monétaire, fin septembre: un demi ou même trois quarts de point de pourcentage sont annoncés.

En réponse, l'inflation a entamé en juillet un ralentissement bienvenu outre-Atlantique, à 8,5% sur un an, après avoir battu en juin un record de hausse des prix depuis plus de 40 ans, à +9,1%.

"Il est peu probable que la conférence de Jackson Hole (...) apporte de vraies nouvelles sur les plans de la Fed pour les futures hausses de taux", selon Carola Binder. Les taux se situent entre 2,25 et 2,50%, frôlant le niveau dit "neutre", qui ne stimule ni ne ralentit l'économie, évalué entre 2,00% et 3,00%.

Jerome Powell, lors de son discours, "voudra mettre l'accent sur la transition probable qui va se produire avec la politique monétaire à l'avenir. Une chose qu'ils veulent absolument communiquer, c'est qu'ils restent très concentrés sur les problèmes de stabilité des prix", note Jonathan Millar, économiste pour Barclays.

Resserrement économique

Ce focus mis sur la stabilité des prix relègue à l'arrière-plan d'éventuelles conséquences sur l'emploi : le PIB américain s'est, d'ores et déjà, contracté lors des deux premiers trimestres, ce qui correspond à la définition classique de la récession.

Beaucoup d'observateurs estiment aussi que le marché de l'emploi devra ralentir en Europe et aux Etats-Unis - c'est-à-dire que le chômage devra augmenter - pour ramener l'inflation à un niveau proche des 2%, mandat que s'est imposé la BCE.

"Jackson Hole pourrait être très important pour nous éclairer" sur l'hypothèse de conserver des taux élevés, malgré un ralentissement économique, anticipe également Mazen Issa, spécialiste du marché des changes pour TD Securities.

Il y a encore un an, lors de ce "symposium", Jerome Powell évoquait des "facteurs transitoires" et mettait en garde contre les risques d'un resserrement prématuré. Mais depuis, l'inflation s'est avérée plus coriace que prévu, battant en brèche les prévisions des banquiers centraux. La réunion de cette année doit aussi restaurer la crédibilité des banquiers centraux après cette prévision erronée.

VG