Une citadine électrique à moins de 7.000 euros: pourquoi Pékin réclame aux marques automobiles d'arrêter de baisser leurs prix

Pékin dit stop à la guerre des prix dans l'automobile. Le gouvernement chinois veut en effet casser la spirale de déflation qui touche différents secteurs, mais en particulier les fabricants de voitures neuves.
Spirale déflationniste
Avec une concurrence féroce, les industriels ont en effet tendance à réduire leurs marges pour afficher des tarifs plus compétitifs: un phénomène dit du "Neijuan", concept chinois qui signifie littéralement "s'enrouler vers l'intérieur", et traduit en anglais et en français par le terme d'involution, résume un article du Courrier International, qui reprend un texte publié sur le portail Sina Finance le 31 juillet dernier par Wang Mingyuan.
"Dans l’industrie manufacturière, cette involution se traduit par une baisse de la marge bénéficiaire, passée de 6,6% en moyenne en 2011 à 5,3% en 2024", estime cet expert au sein du Centre de recherche sur la réforme et le développement de Pékin et chroniqueur pour le magazine économique chinois Caixin.
Le chercheur évoque notamment les surcapacités industrielles dans l'automobile, avec un taux d'utilisation des capacités de production à 71% et donc sous le seuil de rentabilité de 75%.
Sur l'électrique, les chiffres cités se révèlent à la fois impressionnants et inquiétants: dans les voitures dites à "énergies nouvelles" (100% électriques et hybrides rechargeables), la Chine dispose d'une capacité de production de 25 millions d'unités, avec la volonté de doubler cette capacité à terme. Mais la tendance du marché n'est pas encore là, avec une demande mondiale l'an dernier de seulement 18,3 millions de véhicules.
Parmi les raisons de cet emballement, le président chinois Xi Jinping a récemment "critiqué les gouvernements provinciaux pour leurs investissements aveugles dans l'intelligence artificielle, la puissance de calcul et les véhicules à énergies nouvelles, des secteurs que Pékin a identifiés comme des priorités stratégiques, mais qui risquent également de surchauffer", note un article du Guardian. Dans l'automobile, des dirigeants de constructeurs ont ainsi été sommés par Pékin de réduire ces surcapacités.
L'export pour compenser une faible demande intérieure
L'excès d'offre entraîne en effet des baisses de prix chez les marques automobiles chinoises. Le quotidien britannique cite l'exemple de BYD, qui a récemment baissé le prix de sa citadine électrique d'entrée de gamme, la Seagull (commercialisée depuis peu en Europe sous le nom de "Dolphin Surf"), à 55.800 yuans, soit 6.735 euros, soit une réduction de 20% par rapport à son précédent prix de vente. Même baisse en proportion pour Great Wall Motor et sa citadine Ora 3 par rapport à son tarif de septembre dernier.
Problème, même avec ces baisses de prix, la demande chinoise ne peut pas absorber cet excès d'offre, avec un niveau des salaires encore trop faible.
"En 2022, les salaires ne représentaient que 24% du PIB chinois. Un pourcentage non seulement loin du niveau américain (près de 57%), mais aussi inférieur à celui des pays dont le niveau de développement est comparable à celui de la Chine (autour de 40 %)", explique Wang Mingyuan, cité par le Courrier International.
L'idée serait donc d'augmenter les exportations, en particulier vers l'Europe, en pleine transition vers l'électrique. Mais la crainte d'un afflux massif de véhicules et une concurrence déloyale face aux industriels européens a déjà provoqué la hausse des droits de douane de l'Europe sur les véhicules électriques chinois l'an dernier.
En réaction, les constructeurs chinois ont développé leurs ventes de modèles hybrides, non touchées par ces surtaxes et alors que cette motorisation attire de plus en en plus d'acheteurs. La part de marché des marques chinoises en Europe a ainsi atteint 10% des ventes en juin dernier, alors qu'elle n'était que de 3,6% en juillet 2024.