Moins d'accidents et de pollution grâce au "périph" à 50km/h, vraiment? Une étude remet en cause le bilan (trop) favorable de la mairie de Paris

L'Etat "ne validera pas" fin 2024 la limitation à 50 km/h sur le périphérique parisien voulue par la mairie de Paris après les Jeux olympiques, annonce le ministre des Transports, Clément Beaune - Thomas SAMSON © 2019 AFP
Réduire les accidents et le bruit ou bien sûr diminuer la pollution: tels étaient les objectifs affichés par la mairie de Paris pour justifier la baisse de la limitation de vitesse sur le périphérique de 70 à 50 km/h. Une mesure qui s'applique depuis septembre 2024, mais dont le bilan ne serait pas aussi flatteur que ce que veut laisser croire l'équipe municipale.
C'est ce qu'affirme un communiqué de la Ligue de Défense des Conducteurs, qui avait déposé un recours contre cette baisse de la vitesse, tout comme la Fédération Française des Motards en Colère (FFMC), avec également une action collective des avocats de la plateforme en ligne "Riposte juridique". Ces derniers ont décidé de revenir sur le bilan de cette mesure, avec des conclusions assez éloignées du "bulletin du périphérique". Un service présenté par la mairie de Paris comme "un nouvel outil de transparence et de sensibilisation" avec des bilans hebdomadaires sur six indicateurs.
"En vérité, la mesure d’abaissement de la vitesse est inefficace sur la pollution, les accidents, et apporte une avancée insignifiante sur le bruit", résume l'association de la Ligue de Défense des Conducteurs.
Un périph plus dangereux à 50km/h?
Sur les huit premiers mois après l'abaissement de la vitesse, la mairie de Paris évoque par exemple une baisse de 14% du nombre d'accidents. Or, ce chiffre reste dans la tendance sur une période assez longue et la baisse de la vitesse n'aurait donc pas eu une influence significative sur ce point.
"A minima, depuis 2007, le nombre d’accidents sur le boulevard périphérique diminue en moyenne de 16% par an", souligne Maître Séverine Manna, citée dans le communiqué de la Ligue de Défense des Conducteurs.
Attention aussi, prévient l'association, à une donnée qui peut fortement varier d'une semaine sur l'autre. Pas de chance pour le bulletin officiel de la Mairie de Paris, sur la semaine du 19 au 23 mai 2025, la dernière disponible actuellement, le nombre d'accidents s'affichaient même en hausse de 14% par rapport à la même semaine en 2024 (16 accidents contre 14) et même +69% la semaine précédente (22 accidents contre 13).
Sur ces deux semaines, et malgré la baisse de la vitesse, le périphérique était donc d'une certaine manière plus à risque pour les automobilistes que l'an dernier.
Un effet sur la pollution à relativiser
Malheureusement, on peut faire le même constat sur la pollution:
"Si l’on s’en tient à la lecture stricto sensu des chiffres de pollution au dioxyde d’azote (NO2) et aux particules fines PM10 de ces huit derniers mois, la sentence est la suivante: la pollution a augmenté!", ironise la Ligue de Défense des Conducteurs.
En réalité, ces variation s'expliqueraient davantage par les conditions météorologiques que par les conditions de trafic sur le périphérique:
"Les mois au cours desquels une baisse substantielle des émissions de NO2 a été observée sont ceux ayant connu les précipitations les plus importantes (octobre 2024 et janvier 2025). Réciproquement, les hausses d’émissions de NO2 ont été constatées durant les mois les moins pluvieux (février, mars et avril 2025)", explique Riposte juridique cité par l'association.
Sur les particules fines PM10, la concentration dépend aussi de l'intensité du vent, plus il est fort, plus ces particules se dispersent dans l'atmosphère et inversement.
Une communication excessive sur la baisse du bruit
La Ligue de Défense des conducteurs relativise aussi le bilan flatteur de la mairie de Paris sur la baisse du bruit.
"Sur la globalité de la journée, la diminution est de 1,9 décibel, soit 2% de baisse", relève ainsi Maître Séverine Manna, ce qui serait "imperceptible par l’oreille humaine".
Le bulletin officiel de la mairie de Paris insiste de son côté sur la baisse du bruit la nuit, de -2,3 décibels, là encore insuffisant pour être réellement perceptible d'après l'association et le groupe d'avocats.
Surtout, l'explication ne tiendrait pas seulement à la réduction de la vitesse, mais à la baisse de 9% de la circulation sur la période, avec des automobilistes parfois détournés sur d'autres axes depuis le passage au 50 km/h. Mais aussi avec l'ouverture de la voie dédiée, aux heures de pointe, depuis le 3 mars dernier.