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"On vit avec tous les jours": un an après l'incendie du gîte de Wintzenheim, les familles entre deuil et colère

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Plusieurs familles ont rendu hommage aux 11 personnes mortes il y a un an dans l'incendie d'un gîte à Wintzenheim. En colère, elles partagent leur incompréhension et estiment que les faits "n'auraient jamais dû se produire".

Les familles des victimes de l'incendie du gîte de vacances à Wintzenheim (Haut-Rhin), où 11 personnes ont péri il y a un an, ont laissé percer leur amertume ce vendredi 9 août lors du premier anniversaire du drame.

"On est en colère", a éclaté Sandra, sœur de Jérome Watremetz, mort lors de l'incendie à l'âge de 38 ans. "On ne laisse pas des handicapés sans surveillance dans de telles circonstances", a-t-elle déclaré à l'AFP à l'issue d'une cérémonie commémorative sur les lieux de la catastrophe.

Trois familles sur 11 ont accepté de commémorer sur place l'anniversaire de l'incendie. "On ne pouvait pas ne pas venir", a affirmé la sœur endeuillée.

Le bilan le plus lourd depuis 2016

Le 9 août 2023, un violent incendie ravageait ce gîte alsacien, où était organisé un séjour pour des adultes handicapés. Très rapidement, la mairie indiquait que le bâtiment, une ancienne grange rénovée, n'était ni déclaré, ni conforme aux normes.

Le bilan de 11 morts, 10 personnes en situation de handicap et un accompagnateur, était le plus lourd enregistré en France dans un incendie depuis celui d'un bar à Rouen en 2016.

28 personnes se trouvaient sur place lorsque le feu s'est déclenché à l'aube. Celles qui logeaient au rez-de-chaussée ont pu s'échapper mais la plupart des pensionnaires hébergés à l'étage sont morts.

Pour la mère de Thibaud Roth, l'accompagnateur de 33 ans qui avait donné l'alerte lors du drame et est mort asphyxié, se rendre à la commémoration n'était pas envisageable. "Je sais que j'irai un jour voir ce site mais je ne peux pas, c'est trop difficile", a-t-elle déclaré à des journalistes avant la commémoration.

L'incendie avait engendré un débat national sur la sécurité des séjours adaptés aux personnes handicapées, lorsqu'il était apparu que le gîte n'était pas conforme aux normes.

"Ça n'aurait jamais dû se produire"

Sarah et Candy, les soeurs de Jimmy Michel mort à 33 ans, partagent la colère de Sandra. "Si les contrôles avaient été correctement faits, il serait encore là. Comment ont-ils pu laisser un endroit pareil sans sécurité?", questionne l'aînée Sarah.

"Je ne comprends pas, je ne comprends sincèrement pas comment ça a pu arriver, ça n'aurait jamais dû se produire", regrette-t-elle.

"On a de la colère contre la propriétaire, de la colère contre la ville aussi, n'importe qui peut ouvrir un gîte dans n'importe quelle ville et personne ne contrôle rien, c'est normal, nous on vit avec tous les jours", ajoute Sarah au micro de BFM Alsace.

La colère des familles se porte contre la propriétaire du gîte, mais elles regrettent aussi que les noms des défunts n'aient pas été gravés sur la stèle inaugurée devant le gîte, situé au lieu-dit La Forge.

"À la mémoire des victimes de l'incendie survenu à La Forge le 9 août 2023", peut-on simplement lire sur la pierre en grès rose des Vosges.

"En inaugurant ce monument, nous nous engageons à (...) mettre tout en œuvre pour éviter qu'une ligne de plus vienne à être gravée sur le livre des victimes", a déclaré le maire de Wintzenheim, Serge Nicole.

Une information judiciaire en cours

La gérante du gîte a été mise en examen en octobre dernier pour "homicide involontaire" et placée sous contrôle judiciaire par le pôle des accidents collectifs du parquet de Paris.

Il lui est reproché d'avoir exploité "un établissement recevant du public sans autorisation" et de ne pas avoir déclaré "la destination du bâtiment ni la capacité d'accueil du public lors du dépôt des permis de construire ou déclarations de travaux auprès de la mairie". Sollicité par l'AFP, le parquet a indiqué que l'information judiciaire était toujours en cours et qu'il n'y avait pas de nouvelle mise en examen.

Un an après le drame, les contrôles se sont intensifiés auprès des organismes organisant des séjours adaptés. Ainsi, un séjour en Dordogne a été interrompu sur décision préfectorale fin juillet après un contrôle où l'administration a relevé "une incapacité à assurer la sécurité et le bien-être moral des vacanciers" alors qu'ils étaient accueillis dans "des locaux et sanitaires inadaptés aux handicaps".

La société organisatrice de ce séjour interrompu, Escapades Adaptées, basée dans le Jura, appartient au même groupe qu'Oxygène vacances adaptées, qui avait organisé le séjour de Wintzenheim. L'agrément de cet organisme n'a pas été renouvelé.

Emilie Roussey avec AFP