BFM Alsace
Alsace

Alsace: des parlementaires demandent à intégrer l'histoire des "Malgré-Nous" dans les manuels scolaires

Une quinzaine de parlementaires ont adressé un courrier au ministre de l'Education nationale pour intégrer l'histoire des "Malgré-Nous" dans les manuels scolaires, une demande qui n'a pas été accordée par Pap Ndiaye.

Un sujet "d'histoire nationale". Plusieurs parlementaires alsaciens ont écrit au gouvernement pour demander l'intégration de l'histoire des "Malgré-Nous", ces Alsaciens et Mosellans incorporés de force dans l'armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale, dans les manuels scolaires.

Une demande refusée par le ministre de l'Education nationale, Pap Ndiaye, qui a expliqué "qu'on ne peut rien imposer à un éditeur de manuel", rapporte Patrick Hetzel, député Les Républicains de la 7e circonscription du Bas-Rhin, invité de BFM Alsace ce vendredi.

"En réalité, on peut imposer un certain nombre de choses", déclare l'élu, qui se dit "déçu" de la réponse du ministre. "Du moins, on peut faire en sorte que cela soit bien au programme."

Une question de "vérité historique"

Familier du domaine de l'enseignement scolaire, puisqu'il a lui-même été recteur de l'Académie de Limoges de 2005 à 2007, Patrick Hetzel dit avoir relevé une "méconnaissance" de l'histoire de l'Alsace et de son rôle pendant la Seconde Guerre mondiale.

Il avait d'ailleurs déjà abordé la question d'intégrer l'histoire des "Malgré-Nous" aux manuels scolaires sous la présidence de François Hollande, lorsque Najat Vallaud-Belkacem était ministre de l'Education nationale. "Elle avait considéré qu'il s'agissait d'un sujet d'histoire locale, et qu'à ce titre, cela n'avait pas à figurer dans les manuels nationaux."

Pour le député, la question des "Malgré-Nous" relève pourtant bien d'un intérêt national, et non pas d'une "question annexe" dans l'enseignement scolaire. Il espère ainsi "faire en sorte que ce soit enfin pris en considération comme il se doit dans notre récit national".

Le parlementaire se dit déçu de la réponse négative de Pap Ndiaye, d'autant plus pour un ministre "qui est lui-même historien, qui sait bien quelle est l'importance aussi de l'enseignement de l'histoire, et notamment de la vérité historique."

En novembre dernier, l'ensemble des parlementaires de la majorité présidentielle en Alsace et en Moselle, soit 16 députés, avaient adressé un courrier au ministre de l'Education nationale pour intégrer l'histoire des "Malgré-Nous" dans les manuels scolaires, rapportent nos confrères de France 3.

Changer le "regard" porté sur l'histoire alsacienne

Au-delà de la "vérité historique", Patrick Hetzel souligne l'importance d'enseigner l'histoire des "Malgré-Nous" pour faire la lumière sur une partie de l'histoire qui peut encore apporter beaucoup de honte à ceux qu'elle a concernés. "Il en va aussi du regard que l'on peut porter sur notre territoire", déclare le député.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, plus de 130.000 Alsaciens et Mosellans ont été incorporés de force à l'armée allemande. À leur retour à la fin de la guerre, beaucoup ont dû faire face au regard des autres Français.

"Les Français nous regardaient de travers, comme si on avait été volontaires dans l'armée allemande, et pas incorporés de force. C'était difficile pour les Français d'admettre qu'on avait été dans l'armée allemande", racontait il y a quelques mois Charles Geisler, l'un des derniers Malgré-Nous, au micro de BFM Alsace.

Armand Peter, commissaire d'une exposition sur les "Malgré-Nous" installée à Schiltigheim jusqu'à la fin du mois de février, pointe également du doigt l'absence de transmission de cette histoire aux générations qui ont suivi.

"On ne les a pas accueillis psychologiquement, et ils n'ont pas transmis cette histoire à leurs enfants. (...) Car souvent, pour eux, c'était une histoire honteuse, parce qu'elle a été vue et présentée comme ça en Alsace", déclare-t-il.

Malgré la réponse négative du ministre de l'Education nationale, Patrick Hetzel espère tout de même que la mobilisation des parlementaires permettra de faire intégrer l'histoire des Malgré-Nous aux manuels scolaires. "Ce qui est en jeu, c'est encore la manière dont on enseigne notre histoire nationale", déclare-t-il.

Laurène Rocheteau