Les banques regrettent d'avoir prêté de l'argent à Elon Musk pour racheter X (ex-Twitter)

Les banques s'en mordent les doigts. Pour conclure le rachat du réseau social X (ex-Twitter) en octobre 2022 pour la modique somme de 44 milliards de dollars, Elon Musk a dû emprunter une grosse somme. Plus précisément, 13 milliards de dollars à 7 grandes banques, dont Morgan Stanley, Bank of America ou encore la BNP Paribas.
Vers une vente à perte?
Selon le Wall Street Journal, il s'agit de la pire opération de financement pour les banques, depuis la grande crise de 2009. Lorsque les banques prêtent de l’argent pour des rachats, elles revendent généralement cette dette à d’autres investisseurs peu de temps après l'acquisition, en percevant des commissions sur la transaction.
Mais cela n’a pas été possible avec X en raison de la faiblesse de ses finances. La valeur de la plateforme s'est d'ailleurs effondrée depuis son rachat par le milliardaire sud-africain. Résultat, pour revendre cette dette, les banques auraient dû les céder à un prix inférieur aux montants prêtés. Ce qui signifierait vendre à perte. Les établissements ont donc été obligées de garder le prêt dans leurs comptes, ce qui pèsent sur leur santé financière. C'est ce qu'on appelle dans le jargon du secteur des "accords suspendus".
Toujours selon le média américain, la dette de X est restée suspendue plus longtemps que toutes les transactions similaires non vendues depuis la fin de la crise financière de 2009. Près de deux ans après le rachat du réseau social, les sept banques n'ont d'ailleurs toujours pas réussi à revendre la dette.
"A un certain moment, elles pourraient la vendre à perte", analyse Steven Kaplan, professeur de finances à l'Université de Chicago. "Mais avec Elon Musk, on ne sait jamais. Elles pourraient peut-être limiter la casse et ne pas perdre d'argent."
Fuite des annonceurs et chute des revenus
Le problème, c'est que pour le moment, la plateforme n'est pas sur le bon chemin. Management d'Elon Musk, vagues de licenciements - et notamment dans les équipes chargées de la modération - retour des personnalités problématiques sur la plateforme, désinformation en hausse... Les décisions d'Elon Musk et ses mesures ont fait fuir de nombreux annonceurs, comme Coca-Cola ou Apple.
Or, les publicités constituaient l'essentiel des revenus de la plateforme avant son rachat. Le milliardaire a bien tenté de diversifier ces ventes en promouvant les abonnements payant sur le site, avec des résultats mitigés.
Les revenus du réseau social ont donc fondu. D’après le New York Times, qui a eu accès à des documents internes, le réseau social n’a réalisé que 114 millions de chiffre d’affaires aux Etats-Unis au second trimestre 2024. Une baisse de 25% par rapport au premier et de 53% comparé à la même période l’année dernière.
Depuis, Elon Musk a décidé de porter plainte contre les annonceurs, les accusant d'avoir "illégalement boycotté" sa plateforme et ainsi, de lui avoir fait perdre des milliards de dollars. Ce qui ne risque pas de donner envie aux annonceurs de revenir sur la plateforme.
Un prêt difficile à supporter
Et les audiences ne sont guère plus encourageantes. Selon des chiffres internes obtenus par le Financial Times, depuis qu'Elon Musk a pris les rênes du réseau social, la plateforme n'a connu qu'une augmentation de 1,6% de ses utilisateurs actifs quotidiens sur une période de 12 mois. A titre de comparaison, le réseau social réalisait une croissance d'environ 15% par an entre 2019 et 2022.
Or, la dette de X ne peut pas être gardée infiniment par les établissements bancaires. En effet, elle limite la capacité des banques à prêter à d'autres entreprises, plus solvables. Particulièrement depuis la faillite de Silicon Valley Bank, sauvée par le gouvernement américain. Les régulateurs du monde entier scrutent désormais de près la quantité de dette inscrite aux bilans des banques.
Résultat, Bank of America et Morgan Stanley, qui occupaient les deux premières places du classement des banques d'investissement à effet de levier aux États-Unis en 2021 et 2022, ont depuis été dépassées par JP Morgan et Goldman Sachs. Deux établissements qui n'ont pas financé le rachat de X.
Une des solutions pourrait être qu'Elon Musk rembourse une partie de la dette impayée de X, en échange d'intérêts moins élevés. Mais le principal intéressé n'a pas donné suite à ce projet.