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Etats-Unis: les femmes qui avortent pourraient être identifiées par leurs données personnelles

Un cintre, symbole des avortements illégaux, brandi lors d'une manifestation pour le droit à l'IVG, le 21 mai 2019 à West Hollywood (Californie)

Un cintre, symbole des avortements illégaux, brandi lors d'une manifestation pour le droit à l'IVG, le 21 mai 2019 à West Hollywood (Californie) - Robyn Beck © 2019 AFP

Alors que le droit à l'avortement risque d'être remis en cause dans certains Etats américains, le rôle des géants de la tech dans de potentielles enquêtes pourrait être crucial.

Une femme pourra-t-elle bientôt être envoyée en prison après avoir effectué des recherches liées à un centre médical pratiquant l'avortement? C'est une théorie qui semble plausible aux yeux d'experts interrogés par le site américain Axios.

Alors que les Etats-Unis pourraient remettre en cause le droit fédéral à l'avortement et laisser certains Etats interdire cette pratique, l'utilisation des données personnelles des internautes par les forces de l'ordre pour enquêter sur des femmes ayant avorté pourrait rapidement devenir une réalité.

Données transmises aux autorités

Comme le rappelle Axios, une immense quantité de données personnelles, parmi celles récoltées par nos applications et nos smartphones, peuvent être utilisées pour identifier une internaute cherchant à avorter. A commencer par les recherches sur les moteurs de recherche, l'historique des achats en ligne, mais aussi les informations de géolocalisation.

Outre-Atlantique, plusieurs lois, à commencer par le Cloud Act, obligent les acteurs des nouvelles technologies à communiquer aux autorités les données qu'ils possèdent sur des internautes, par exemple dans le cadre d'enquêtes.

A ce titre, des entreprises comme Google, Apple, Amazon, mais aussi les principaux opérateurs téléphoniques, pourraient être mis à contribution par les autorités des Etats où l'avortement serait interdit pour identifier des femmes s'étant rendue dans une clinique pratiquant l'IVG.

Pour limiter de tels risques, Apple a exclu de sa collecte une large part des données personnelles des utilisateurs, notamment les informations de localisation. De son côté, Google - qui contrairement à Apple a besoin de ces données pour afficher de la publicité ciblée - permet aux utilisateurs de supprimer leurs données en quelques clics.

Un accès aux données médicales?

Comme le rappelait le site Vice le 3 mai dernier, des courtiers en données personnelles commercialisent par ailleurs des lots regroupant des internautes ayant consulté dans des cliniques pratiquant l'avortement.

De telles données peuvent ainsi être récupérées, pour un échantillon d'une semaine, à partir de 150 euros auprès d'entreprises telles que SafeGraph, précisait alors le média américain.

Plus problématique encore, les autorités américaines pourraient se procurer les dossiers médicaux des patientes, et ce en dépit de la loi HIPAA, qui limite l'utilisation de telles données par les acteurs privés.

"Je ne pense pas que les gens puissent compter sur la loi HIPAA pour les protéger dans le cadre d'une enquête criminelle", précise Jennifer Granick, spécialiste des données personnelles à l'Union américaine pour les libertés civiles, à Axios.

Dans certains Etats américains comme le Texas, une femme ayant avorté ou toute personne l'ayant aidée à avorter pourrait risquer la prison à vie, comme le rappelait le site Politico ce 6 mai.

https://twitter.com/GrablyR Raphaël Grably Rédacteur en chef adjoint Tech & Co