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Youtube, Twitter, Candy Crush: les "publicités" diffusées par Israël contre le Hamas sont-elles légales?

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Sur plusieurs plates-formes en ligne, des publicités, publiées par le compte du ministère des Affaires étrangères d'Israël, dénoncent les attaques du Hamas.

Dès le lendemain des attaques du Hamas sur Israël, des internautes ont pu constater la présence, sur différentes plates-formes, de publicités issues du ministère des Affaires étrangères israélien.

Libération, par son service de fact-checking Checknews, a pu confirmer que ces publicités étaient effectivement issues du ministère israélien. Ces vidéos, sur Youtube, sont diffusées au format publicitaire avant la vidéo cherchée par l'utilisateur. Deux vidéos différentes, d'une trentaine de secondes chacune, ont ainsi été aperçues sur Twitter ainsi que sur des jeux mobiles.

Capture d'écran d'une vidéo du compte du ministère des Affaires étrangères d'Israël
Capture d'écran d'une vidéo du compte du ministère des Affaires étrangères d'Israël © Israël/Youtube

L'une, intitulée "1.300 victimes innocentes", présente des photos que l'on imagine de victimes sur un fond noir. Le texte, en anglais, explique que "le Hamas, une organisation terroriste, a assassiné plus de 1.300 personnes. Des Israéliens innocents - enfants, femmes et personnes âgées - des familles entières ont été massacrés dans leur maison".

La seconde vidéo repérée par les internautes est plus inattendue: elle débute sur un fond rose, avec des arcs-en-ciel et des licornes.

Capture d'écran d'une vidéo du compte du ministère des Affaires étrangères d'Israël
Capture d'écran d'une vidéo du compte du ministère des Affaires étrangères d'Israël © Israël/Youtube

"Nous savons que vos enfants ne peuvent pas lire ça. Nous avons un important message à vous faire passer en tant que parents. 40 nourrissons ont été assassinés en Israël par les terroristes du Hamas (Daech). De la même manière que vous feriez tout pour votre enfant, nous ferons tout pour protéger les nôtres", toujours sur le fond rose décoré d'arcs-en-ciel.

Malgré l'absence visuelle d'images violentes dans ces vidéos, elles ont, selon Numerama, été référencées sur Youtube de manière à ne pas apparaître avant des contenus destinés aux enfants.

Visibles sur Candy Crush

Par contre, dans des jeux mobiles tels que Candy Crush ou Angry Birds, qui sont utilisés par des personnes de tous les âges, ces vidéos apparaissent sans distinction. Le média spécialisé Business Insider rapporte ainsi le témoignage d'un Néerlandais, ayant publié sur Twitter une vidéo de son fils de 6 ans, jouant à Angry Birds sur sa tablette, et exposé à la première vidéo.

"Mon fils (de six ans) joue à Angry Birds sur sa tablette et voit cette publicité. Est-ce normal?" s'interroge ce parent. Rovio, l'éditeur d'Angry Birds, a réagi deux jours plus à ce tweet, directement sur le réseau social.

"Merci de porter ceci à notre attention. Nous avons fait remonter cette publicité à tous nos partenaires. Nous n'acceptons pas que de la violence soit montrée dans les publicités liées à nos jeux. Nous faisons tout notre possible pour que les publicités présentant de la violence soient bloquées de nos plates-formes", a affirmé l'éditeur, le 16 octobre.

Même situation sur le jeu mobile Candy Crush, qui compte des millions d'utilisateurs, où de nombreux joueurs affirment avoir été exposés à la publicité.

Le choix des plates-formes

En France, sur la plupart des réseaux sociaux, les publicités dites à visée politique sont encadrées notamment dans le cadre d'élections: un candidat n'a pas le droit de financer de la publicité en ligne pour appeler à voter pour lui. Mais en dehors de ce cadre, ce sont d'autres règles qui définissent les contenus, et qui sont propres à chaque réseau social ou plate-forme en ligne. Elles peuvent varier selon les pays.

Les conditions d'utilisation de Youtube n'autorisent pas les éléments suivants: "annonces susceptibles de tirer profit d'un événement sensible ayant un impact social, culturel ou politique important, comme les crises civiles, les catastrophes naturelles, les urgences de santé publique, les actes terroristes et associés, les conflits ou les actes de violence de masse", peut-on lire sur le site.

En regard de cette règle, Numerama a relayé l'interaction d'un de ses lecteurs avec Google, auprès de qui il avait signalé la publicité. On y lisait, le 9 octobre dernier, que l'entreprise avait décidé d'analyser ces publicités afin de déterminer si elles devaient cesser d'apparaître en amont des vidéos.

Depuis cette date, les deux vidéos sont toujours disponibles sur le compte du ministère des Affaires étrangères israélien. Elles apparaissaient toujours, sur Youtube, en tant que publicité, à la date du 14 octobre.

"Rien ne l'interdit"

Mais au-delà de la gestion des entreprises du numérique, qu'en dit la loi française? Pour l'avocat spécialisé en numérique Alexandre Archambault, interrogé par Tech&Co, il n'y a ici "aucune raison qu'un Etat ne puisse pas faire passer des messages".

"C'est un Etat souverain dans sa communication qui a publié ces vidéos, il a dû y avoir une analyse de la prise de risque avant, de la réflexion (...). Aujourd'hui, rien ne l'interdit" au niveau de la législation française.

Enfin, quant à la question du revenu issu de ces publicités, le média spécialisé Business Insider n'a obtenu aucune réponse de la part de Youtube, sa maison mère Google, Rovio, l'éditeur d'Angry Birds, ou encore de la part Twitter.

Questionnés par Tech&Co, ni Twitter ni Youtube n'ont répondu.

Victoria Beurnez